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Beach Shark – Mark Atkins

beach-shark-affiche

Sand Sharks. 2011.

Origine : États-Unis
Genre : Monstres ensablés
Réalisation : Mark Atkins
Avec : Corin Nemec, Brooke Hogan, Eric Scott Woods, Vanessa Lee Evigan…

Rien ne va plus à White Sands depuis la tragique attaque de requins qui a fait 15 morts lors d’un festival organisé par le fils du maire, Jimmy Green (Corin Nemec). Économiquement, la localité se porte au plus mal. Les commerces ferment les uns après les autres, faute d’estivants, et les locaux quittent l’île pour trouver du travail sur le continent. Maintenant que de l’eau a coulé sous les ponts, Jimmy revient sur l’île, bien décidé à relancer l’économie locale, et accessoirement s’en mettre plein les poches. Son idée ? Organiser un autre festival dans la tradition du springbreak. S’il obtient aisément l’aval de son père, son projet va se heurter à un problème inédit : l’irruption de requins d’un nouveau genre, qui se meuvent aussi bien dans l’eau que dans le sable.

Le petit monde de la vidéo est un milieu fascinant. Du moindre succès cinématographique découle une ribambelle d’ersatz sans le sou qui trouvent toujours preneurs. Avec la pléthore de chaînes télévisées auxquelles nous avons accès, il s’en trouve toujours une susceptible de mettre quelques billets sur un titre, si ce n’est accrocheur au moins suffisamment évocateur quant à son contenu, et propice à remplir paresseusement les grilles de programme. Dans ce contexte, la vente des DVDs devient accessoire, ce qui explique des éditions la plupart du temps très pauvres, à l’image de ce Beach Shark, disponible uniquement dans une médiocre version française.

Œuvre de Mark Atkins, un spécialiste du direct-to-video bâclé auquel on doit notamment un Dragonquest chroniqué en ces pages, Beach Shark s’enorgueillit tellement de sa trouvaille (des requins dans le sable !!!) qu’il ne propose rien d’autre qu’une compilation de poncifs tout droit hérités des Dents de la mer. Mieux, tout en reprenant les principales caractéristiques du film de Steven Spielberg (le maire qui s’oppose à la fermeture des plages, la capture du mauvais requin, le concours d’un vieux loup de mer pour traquer le monstre, la venue d’un spécialiste en requins…), Beach Shark réussit l’exploit de singer d’autres films qui s’en sont réclamés, à commencer par Tremors dont il reprend la menace souterraine, et le Piranha d’Alexandre Aja pour l’irruption des bestioles au beau milieu d’une fête étudiante. Le tout soutenu par des effets spéciaux numériques d’une nullité sans commune mesure qui non seulement desservent la moindre attaque des squales, mais qui en outre ne respectent jamais les proportions desdits bestiaux. Et puis ils sont d’une discrétion à toute épreuve, ne laissant jamais de traces dans le sol en dépit de leurs jaillissements sauvages, si ce n’est parfois le sang de leurs victimes. Ah, la magie de l’informatique !
De toute évidence, Mark Atkins se moque de la cohérence de son récit. En fait, c’est de la structure du film dans son intégralité dont il se fiche éperdument. La petite bourgade n’existe pour ainsi dire pas, se résumant à ses plages, sa mairie, le commissariat et la chambre d’un hôtel. La détresse des habitants –une quinzaine à tout casser– ne transparaît que lors d’une réunion municipale placée au début du film pour ne plus se manifester par la suite. Le récit délaisse toute ébauche de progression dramatique (le scénario est tellement éculé qu’on en devine le moindre rebondissement) au profit de son acteur vedette, un Corin Nemec en roue libre (les séries Parker Lewis ne perd jamais, Stargate SG1, mais aussi Le Fléau ou encore Mosquito Man). Il règne sur un casting hétéroclite au sein duquel on découvre Brooke Hogan, la fille de Hulk (le catcheur, pas le monstre vert !), dans le rôle de la spécialiste des requins, davantage remarquée pour ses formes sculpturales que pour ses compétences, et Edgar Allan Poe IV (oui, monsieur !) qui joue les père et maire. A leurs côtés, Corin Nemec incarne donc le magouilleur Jimmy Green, le prototype même de la grande gueule qui croit toujours avoir trouvé l’idée du siècle. A ses yeux, rien d’autre n’a d’importance que la pleine réussite de son projet, et tant pis si ses proches viennent à mourir sous ses yeux. Le spectacle doit continuer. Et quel spectacle ! Baptisé le Festival de l’Homme de Sable, il considère son baroud d’honneur comme le plus grand concert en plein air jamais organisé. Il n’a visiblement jamais eu vent de Woodstock. Nanti d’une cinquantaine de convives (la production n’avait sans doute pas les moyens de recruter davantage de figurants), ledit festival est d’une pauvreté absolue. En outre, pas un stand de boissons et de nourriture pour satisfaire la faim et la soif des fêtards. Jimmy repassera pour la relance de l’économie locale. En somme, il a tout du personnage détestable, et pourtant on ne le prend pas en grippe, sans doute parce que Corin Nemec est le seul à jouer la carte du second degré à outrance, qui se prête mieux à la bêtise de l’ensemble que l’indéfectible sérieux de ses partenaires. Cela manque bien évidemment de nuance, ça frôle parfois le hors sujet (la confession à son ex petite amie Brenda) mais au moins ces facéties offrent par instant un sas de décompression bienvenue au sein d’un spectacle des plus navrants.

En grand habitué de ces produits sans saveur, Mark Atkins déroule le cahier des charges sans se fouler. Beach Shark est donc gore mais pas trop, bénéficie d’un casting riche en jolies femmes peu vêtues mais jamais nues, et se montre d’une moralité à toute épreuve, conformément aux impératifs télévisuels en vigueur. Toutefois, on sent poindre au détour d’une réplique l’envie de se lâcher un peu plus. Par deux fois, il lance un clin d’œil à des grands noms du cinéma fauché : Roger Corman et la firme Troma. Le premier, excellent réalisateur lorsqu’il s’en donne la peine (et parfois les moyens), est aussi –surtout– connu pour avoir mis le pied à l’étrier à de futurs grands noms du cinéma contemporain (Francis Ford Coppola, Martin Scorsese, Joe Dante). Quant à la firme Troma, elle est réputée pour sa liberté de ton alliée à sa folie, qui donne des œuvres iconoclastes, certes souvent plus proches de la série Z que de la série B, mais dotées d’une belle énergie foutraque. Las, le bonhomme n’en finit plus de pondre des versions fauchées de blockbusters, comme emprisonné de son petit confort.

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