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Une virée en enfer – John Dahl

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Joy Ride. 2001.

Origine : États-Unis
Genre : Course poursuite
Réalisation : John Dahl
Avec : Paul Walker, Steve Zahn, Leelee Sobieski, Jessica Bowman…

Lewis (Paul Walker) est plutôt fier de lui. Depuis le temps qu’il convoitait Venna (Leelee Sobieski), il a su saisir l’occasion qui s’est présentée à lui de faire un bout de route avec elle. Seule ombre au tableau, il doit d’abord passer récupérer son frère aîné Fuller (Steve Zahn) à sa sortie de prison. Après 5 ans d’incarcération, ce dernier est toujours le gamin qu’il était en y entrant. A leur première halte, il fait installer une radio CB avec laquelle les deux frangins élaborent un canular aux dépens d’un routier. Cette blague va se retourner contre eux et prendre des proportions effrayantes.

Jusqu’à Last Seduction, son meilleur film, John Dahl s’imposait non seulement comme un fier représentant du polar moderne mais également comme un réalisateur à suivre. Alors que Mémoires suspectes devait entériner cette montée en puissance, il a en réalité marqué un brutal coup d’arrêt. Prometteur sur le papier, le film s’est avéré n’être qu’un banal thriller teinté de fantastique. Loin de le relancer, et en dépit d’un casting clinquant, son film suivant Les Joueurs se présente comme une ennuyeuse immersion dans le monde des joueurs de poker. Avec Une virée en enfer, il s’essaie au road-movie tendance tout public, rentrant dans le rang des réalisateurs interchangeables au service des studios.

Calibré pour un public jeune, Joy ride (en V.O) n’est qu’une pâle copie de Duel saupoudrée d’un soupçon de Hitcher. L’insignifiance des deux frères n’a d’égale que leur bêtise, tandis que le personnage interprété par Leelee Sobieski se contente de subir les événements, et de pousser le cas échéant quelques cris stridents comme la première scream queen venue. Voir un personnage féminin aussi passif dans un film de John Dahl alors qu’il nous avait habitué à leur confier des rôles forts démontre à quel point il a renoncé à toute ambition pour ce film.
En présence de “héros” bien fades, on aurait pu espérer un “méchant” charismatique. Peine perdue puisqu’ici, le parti pris est de ne pas visualiser “le mal”. On devra se contenter du son de sa voix et de sa silhouette, entraperçue au hasard d’une scène. Dommage car le personnage avait du potentiel. Un homme constamment sur les routes, rongé par la solitude, et tout disposé à se raccrocher à la voix d’une inconnue pour peu que celle-ci soit prête à lui offrir un peu de chaleur humaine. Déconfit devant ce qui s’avère être un canular, et profondément blessé dans son amour-propre, il entre dans une rage froide, bien décidé à faire payer sa déception au centuple aux mauvais plaisantins. Ce qui aurait pu être la matérialisation d’une détresse profonde prend alors la banale forme d’une course poursuite peu spectaculaire entre le croquemitaine et ses victimes. Un jeu du chat et de la souris pervers, durant lequel le routier prendra un malin plaisir à ridiculiser à son tour les deux frangins avant que sa libido bafouée ne reprenne le dessus et l’enjoigne à se montrer de nouveau plus pressant. Enfin, dans les limites d’une production tout public, qui fuit comme la peste toute imagerie sexuellement trop chargée. Ainsi, le combat fratricide qui pourrait se jouer pour les beaux yeux de Venna demeure du domaine de l’ébauche, tandis que le routier meurtri oubliera bien vite tout appétit sexuel au moment de la capture de la jeune femme. Ces choix malheureux, bien que mûrement réfléchis, font d’Une virée en enfer un film quelconque et d’une fadeur rébarbative.

A sa manière, Une virée en enfer perpétue la vision moralisatrice des slashers, prenant des airs de film préventif à destination de la jeunesse sur le mode : “On ne se moque pas impunément d’autrui !”. A la différence que dans les slashers, nous avions au moins droit à quelques punitions bien violentes. Rien de tel ici, les sévices corporels laissant place à une gentille tape sur les doigts avec la promesse que ces vilains garnements ne recommenceront plus.

Une réflexion sur “Une virée en enfer – John Dahl

  • J’ai une meilleure opinion du film que monsieur Arellano. Ça a été pour moi un thriller d’enfer où une voix pouvait faire flipper plus que l’apparition d’un camion menaçant.

    Quand on a des scènes aussi marquantes comme celle de la blague du Motel qui tourne très mal, ou quand le shérif décrit les méfait du camionneur sur une victime qui n’avait rien demandé. Jamais on a l’image de ce qui s’est passé mais l’imagination aux bruit de lutte dans la chambre ou à la description des mutilations qu’a fait clou rouillé, on ne peut qu’être saisi d’effroi.

    La deuxième partie redescend la pression pour mieux revenir à un sentiment d’inquiétude, qui monte en crescendo, quand Clou Rouillé décide de punir les adolescents dans un jeu tout d’abord humiliant puis de plus en plus sadique.

    La voix de Clou Rouillé est la seule chose qui incarne le camionneur et pourtant elle apparait si menaçante, stressante, qu’elle donne l’impression qu’elle est presque plus puissante que l’image même du camionneur.

    Si c’est l’acteur Ted Levine, le tueur en série Le Silence des agneaux, qui fait la voix originale de Clou Rouillé, en France, c’est la voix de Yves Marie Maurin qu’on entend et qui est pour beaucoup dans la qualité de cette menace qu’est Clou Rouillé. Malheureusement, il nous a quitté en 2009. Mais je peux conseiller Joy Ride avec un autre doubleur Serge Biavan.

    Contrairement à ce qui est dit, le film ne donne pas l’impression que John Dahl a l’air d’être en bout de course, le scénario étant de J J Abrams et Clay Tarver, il restera meilleur que tout ce qu’il fera par la suite, à savoir des épisodes de séries télés, complétement anonymes et que n’importe qui aurait pu le réaliser.

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