CinémaHorreur

L’Avion de l’apocalypse – Umberto Lenzi

avionapocalypse

Incubo sulla città contaminata. 1980

Origine : Italie / Mexique / Espagne
Genre : Horreur
Réalisation : Umberto Lenzi
Avec : Hugo Stiglitz, Mel Ferrer, Laura Trotter, Francisco Rabal…

Panique à l’aéroport ! Là où on attendait un scientifique spécialisé dans le nucléaire débarque un avion qui ne s’annonce pas et qui libère des contaminés mangeurs de chair ! L’armée tente tant bien que mal de contenir l’épidémie et d’éviter que l’info circule. Mais c’est mal barré, comme l’a bien compris le journaliste Dean Miller (Hugo Stiglitz).

Dans une époque cinématographique profondément influencée par George Romero, ses zombies, son gore et son apocalypse, quoi de plus normal pour les réalisateur italiens que de surfer sur le mouvement ? Ce ne serait pas la première fois qu’ils procèdent ainsi, loin s’en faut. A première vue, L’Avion de l’apocalypse n’est pas autre chose qu’une repompe de Zombie. Rien de mal à ça, bien au contraire : il n’y a pas si longtemps, Lenzi lui-même marchait encore fort adroitement sur les plates-bandes de L’Inspecteur Harry. Et pourtant, il nie catégoriquement que son film ait été inspiré par celui de Romero, rappelant avec virulence que ses créatures sont des “infectés” et non des zombies. Contrairement à ceux-ci, les infectés courent partout et disposent encore d’un minimum d’intelligence, par exemple lorsqu’ils ont l’idée d’utiliser des objets contondants pour tuer leurs vis-à-vis bien portants. Incontestablement plus malin que d’essayer de les agripper en plein élan. Sacré Umberto ! Il faut une bonne dose de mauvaise foi pour contester l’incontestable : ce n’est pas parce qu’ils gambadent sans s’essouffler que ses infectés diffèrent des zombies classiques. Malgré l’origine un peu anachronique du mal qui les ronge (les radiations, comme aux belles heures des années 50), malgré l’explication sur leur besoin de boire du sang (le virus détruit leurs globules rouges et il faut bien les remplacer), leurs buts sont similaires, tout comme les conséquences de leurs morsures. Lenzi a beau se cacher derrière de fallacieux prétextes scientifiques, son épidémie évoque bien plus le Zombie de Romero que le Rage de Cronenberg. On peut lui concéder l’originalité de voir les créatures courir, mais est-ce bien assez pour affirmer que L’Avion de l’apocalypse est un film 100% original ? C’est douteux… Du reste les 28 jours plus tard ou autre Armée des morts, deux films aux zombies bondissant produits quelques vingt ans après, n’essaieront pas de se faire passer pour ce qu’ils ne sont pas. Avec ses zombies lents et revendiqués comme tels, L’Enfer des zombies de Fulci était bien plus innovant. Et puis le principal est ailleurs : comme son titre l’indique, le film de Lenzi cherche à montrer le début de l’apocalypse, le remplacement de l’humanité telle que nous la connaissons par une pâle copie poussant à fond ses penchants destructeurs. Si la frénésie des zomb… des infectés aboutit à des scènes plus spectaculaires, il est difficile de croire une seconde à cette fin de civilisation par trop modeste. Aucun vent de panique ne semble souffler sur la ville, pour la bonne raison que personne ne semble être au courant de la situation. Quand bien même les militaires cherchent à éviter que la rumeur se propage, il est très difficile de concevoir que les infectés puissent mettre à sac un aéroport, liquider en direct toute une chaîne de télévision et plonger un hôpital dans le chaos sans que personne ne s’en émeuve. Lenzi semble avoir en fait souffert d’un cruel manque de moyen qui aura dû le contraindre à faire l’impasse sur les scènes d’hystéries collectives. Il faut dire également que ses acteurs sont d’une médiocrité excessive (infectés inclus, et ne parlons pas de la VF qui sonne faux), ce qui n’aide pas à rendre tangible le qui-vive. Y compris lorsque la musique tente de singer celle des meilleurs films de Fulci. Aussi modeste que stupide, le scénario s’appuie sur quelques groupes de personnages séparés, dont nous suivons la destinée agitée tout en ayant conscience de n’avoir à faire qu’à des cas dramatiques individuels. Une apocalypse en bonne et dû forme aurait tiré avantage à suivre le périple d’une poignée de survivants luttant conjointement pour leur survie (comme le faisait Romero). En éclatant ainsi son intrigue entre des militaires réfléchissant aux méthodes à employer, entre le journaliste qui cherche à fuir avec sa copine médecin (avec quelques scènes de mélo à la clef) et entre quelques autres énergumènes insignifiants, Lenzi se tire lui-même une balle dans le pied. Ce n’est pas exactement que son film manque de rythme, car après tout chaque destin contient les mêmes ingrédients, mais au final il se disperse pour rien en plusieurs sous-intrigues stériles trahissant un scénario qui ne mène nul part.

L’évidence s’impose alors : tout semble avoir été écrit au jour le jour, en fonction des nouvelles idées de plans gores. Hélas, là encore le film pâtit d’un budget trop réduit : les maquillages et divers effets spéciaux sont d’une laideur saisissante. Les pires infectés se voient ainsi recouverts d’une pâte noirâtre n’évoquant rien, ni la décomposition, ni des blessures, ni d’éventuelles brulures. Elle est là parce qu’il faut bien reconnaître les gentils des méchants, et elles laissent parfois des trous béants laissant entrevoir la peau indemne des acteurs (principalement au niveau des yeux). De plus l’aspect outrancier de ces maquillages s’accommode fort mal de la nature gesticulante des infectés, qui ne devraient même plus être en état de bouger. Au lieu de quoi nous nous retrouvons avec ces mauvais acteurs qui se lâchent totalement sous l’œil complice d’un réalisateur ne parvenant plus à distinguer la plaisante méchanceté gratuite du ridicule zédifiant. Le traitement réservé à l’inévitable nudité laisse songeur : sans crier gare, les infectés se piquent parfois de déchirer les chemisiers des plus jolies victimes, permettant au réalisateur de s’attarder sur les bustes de ces demoiselles entre deux plans vaguement gores assez vite répétitifs (les effets spéciaux sont trop moches pour les rendre convaincants). Le plus absurde dans l’affaire étant encore la défense utilisée par les humains sains de corps et d’esprit, tels que ce docteur qui se prend pour Guillaume Tell avec son scalpel en pleine opération, ou encore cet autre gus qui parvient à assommer un infecté avec une serviette. On ne peut enlever à Lenzi cette générosité qui le caractérise, mais il ne s’agit plus du même genre de générosité immorale et sadiquement complaisante dont il se faisait le chantre dans ses polars. Tout ici n’est qu’horreur involontairement bon enfant, davantage Z que B. Et au milieu de tout ça surgissent quelques velléités politiques aussi grossières que succinctes, généralement limitées à de rares scènes de dialogues (l’armée nous ment et le progrès c’est mal) essayant piteusement de reprendre le côté politique de Romero avec des poncifs éculés. D’un point de vue qualitatif, effectivement L’Avion de l’apocalypse n’a rien à voir avec Zombie. C’est peut-être pour cela que l’italien tente de faire croire que son film ne doit rien à l’américain : pour faire oublier son ratage (ou plutôt semi-ratage, puisque d’un point de vue subjectif, L’Avion de l’apocalypse et son heure dix-huit de gore au rabais se laisse regarder sans peine).

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.