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Centre Terre : 7ème continent – Kevin Connor

centreterre

At the Earth’s core. 1976

Origine : Royaume-Uni / États-Unis 
Genre : Aventures fantastiques 
Réalisation : Kevin Connor 
Avec : Doug McClure, Peter Cushing, Caroline Munro, Cy Grant…

C’est avec une joie toute enfantine que le vieux savant Abner Perry (Peter Cushing) s’apprête à faire la démonstration publique de sa “taupe”. Fleuron de la science victorienne, ce vaisseau-perceur sera destiné à emmener l’Homme dans les entrailles de la Terre. Mais pour l’heure, on devra se contenter d’une colline, que le Dr. Perry va traverser avec son financier et ancien élève David Innes (Doug McClure). Manque de bol, la machine s’emballe dès son lancement, et hop, ça y est, les deux hommes se retrouvent au “septième continent”, dominés par des bestiaux préhistoriques ailés et télépathiques nommés les Mahars. Aidés par les Sagoths, sorte de grands singes, les Mahars ont asservi une humanité tribale, et profitent à l’occasion de quelques sacrifices de jeunes filles. Capturés par les Sagoths, les deux scientifiques britanniques vont essayer de libérer leurs semblables, ou au moins Dia (Caroline Munro), une bien gentille princesse locale elle aussi maintenue en captivité. Pour cela, ils devront s’enfuir de la tanière des Mahars, puis y revenir en sauveurs, avec l’aide d’un autochtone nommé Ra (Cy Grant).

Pour la Amicus, pour le réalisateur Kevin Connor et pour l’acteur Doug McClure, l’heure fut à Edgar Rice Burroughs. Ensemble, en l’espace de deux ans, ils s’invitèrent à trois reprises dans son univers des mondes perdus, rappelant ainsi que cet auteur n’est pas que le créateur de Tarzan mais aussi un Jules Verne anglais. Ces trois films furent Le Sixième continent en 1975, puis Centre Terre : 7ème continent et Le Continent oublié (en fait la suite du Sixième continent) en 1976. Des trois, le second est probablement le plus intéressant lorsque l’on constate que trois noms en particulier y sont rattachés. En premier lieu Peter Cushing, dont la carrière s’apprêtait à aller en déclinant, parallèlement à la production de la Hammer, alors quasi-éteinte. Vient ensuite Caroline Munro, qui ne se fut jamais une star, qui tint rarement d’autres rôles que ceux d’une belle plante, mais dont la présence ravit à chaque fois les gens de bon goût. Enfin, le producteur et (pour la dernière fois) scénariste Milton Subotsky, le fondateur de la Amicus lui-même. Toutefois, l’expérience montre que plusieurs noms ronflants ne font pas forcément un grand film. Et c’est encore à peu près le cas ici. Centre Terre : 7ème continent est finalement assez peu différent de tous les films d’aventures fantastiques qui depuis l’invention du cinématographe sont arrivés sur les écrans. La raison en est peut-être que ces films de “mondes perdus” sont souvent adaptés de livres il faut bien admettre déjà assez proches les uns des autres, et que les divers réalisateurs qui s’y sont attelés ont rarement cherché à innover… A la différence par contre des concepteurs d’effets spéciaux, qui disposaient à travers ces films de terrains de jeu propices aux expérimentations. Ray Harryhausen, qui s’y est aventuré plus qu’à son tour, est certainement plus connu que les réalisateurs pour lesquels il a œuvré. Mais point de Harryhausen ici, ce qui constitue d’emblée un désavantage sérieux. Les divers monstres que l’on croise, des Mahars tout-puissants jusqu’au premier lézard géant venu en passant par une plante carnivore géante, sont tous de grandes réalisations caoutchouteuses, ni ébouriffantes ni ridicules. Ce n’est pas leur apparence qui dérange, mais plutôt la manière dont ils sont animés. Patauds et rigides, ils ne brillent guère lors des combats, ce qui pousse le réalisateur à monter ceux-ci de façon très hachée, si possible en évitant d’avoir à inclure à la fois les monstres et les personnages en intégralité dans le cadre (il a ainsi recours à pas mal de gros plans, ou à la surcharge des décors). Trop de contraintes pour que les batailles soient homériques, quand bien même certains bestiaux explosent lors de leur trépas.

Sur un plan scénaristique, le film ne se fait pas non plus remarquer par son audace. Il reste dans les sentiers battus, avec cette association entre un vieux professeur et un jeune comparse, le premier étant le cerveau et le second les muscles. A ce duo s’ajoute la présence d’une sorte de guide, recruté ici parmi les autochtones, et qui est clairement inféodé à ses employeurs / maîtres. Ce petit groupe n’est pas différent de celui qui figurait déjà en 1864 dans Voyage au centre de la Terre. Jules Verne se bornait cependant à faire de ses héros de simples explorateurs d’un monde encore sauvage, tandis que Connor, suivant Burroughs et d’autres avant lui, fait d’eux des sauveurs en puissance. Une certaine fibre britannique très patriotique parcourt ainsi le film, qui frise parfois le paternalisme colonial… Ces deux anglais débarquent dans un monde inconnu et à eux deux entreprennent de sauver toute une humanité asservie (et ils réussiront, on peut le dire, de toute façon ce n’est pas une surprise) en réussissant en un coup de cuillère à pot à unir dans la lutte toutes les tribus divisées depuis des lustres. Sous-entendu : les humains souterrains avaient bien besoin de la civilisation pour réussir à s’affranchir. Un peu facile ! Autant que les bravades de David, qui subjugue l’assistance en réussissant à vaincre les monstres en un-contre-un et qui se paye même le luxe d’infliger une raclée au guerrier barbare qui convoitait la belle Dia. Celle-ci s’en pâme de joie, et tombe bien entendu dans les bras de son noble chevalier, non sans que celui-ci ait fait preuve d’humilité suite à une boulette initiale due à un malentendu culturel, ce qui prouve bien qu’il est un gentleman britannique. Cette romance est un peu schématique, elle vient rappeler que le film est une adaptation, et qu’à ce titre certains pans du livre de Burroughs doivent être condensés, quitte à paraître un peu trop sommaires. Le cas du langage est plus irréaliste encore, puisque l’on passe sans transition des mimiques pour faire comprendre son prénom à une conversation en anglais des plus fluides. Un peu comme si la seule compréhension du prénom “David” permettait aux indigènes de maîtriser toute la langue anglaise… Passons sur ces quelques points de détail, et abordons ce qui est de loin l’élément le plus décevant du film : Peter Cushing. Non seulement son personnage ne parvient pas à s’imposer face à l’intrépidité de son jeune partenaire, mais il sert en plus de subterfuge comique destiné à mettre en valeur le vrai moteur de l’aventure, David. Le cerveau importe décidément très peu : les raisonnements scientifiques font bien pâles figures face aux nombreuses cocasseries du personnage, voire ils sont même parasités par elles lorsque le Dr. Perry refuse de s’évader avec David au motif qu’il préfère observer ses tortionnaires. Ressemblant déjà à un vieillard squelettique (il fait franchement peine à voir), Cushing passe pour un sénile complet à travers ses nombreuses répliques laissant entendre que son excentricité est telle qu’il n’a plus aucune conscience de la situation dans laquelle il se trouve (ce qui permet à Connor de faire relativiser un peu l’aspect “colonial” de son film). Nous sommes bien loin des fanatiques pratiquement aussi inquiétants que Dracula lui-même qu’il incarnait pour les meilleurs films de la Hammer. C’est bien triste (et puis bon, voir Cushing servir la soupe à Doug McClure et à ses costumes à rayures, quelle honte !).

Les seules traces un tant soit peu originales à mettre au crédit de Kevin Connor sont encore les décors. Pour une fois dans ce genre de films, l’accent n’est pas mis sur la végétation luxuriante mais sur la caverne volcanique des Mahars, qui donnent l’impression que le film se déroule dans un milieu quasi industriel. Le centre de la terre n’est alors plus un milieu d’émerveillement, mais bien un endroit peu glamour où le danger prime sur tout autre chose. Dommage que le film n’ait pas voulu suivre cette voie pour se montrer un peu plus mature. Centre Terre : 7ème continent ne souffre pas de grands défauts… Il est juste d’une banalité affligeante, et à ce titre il pourra vite être confondu avec n’importe quel autre film portant sur le même sujet.

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