CinémaWestern

Le Retour de Sabata – Gianfranco Parolini

retoursabata

È tornato Sabata… hai chiuso un’altra volta. 1971

Origine : Italie / France / R.F.A. 
Genre : Western 
Réalisation : Gianfranco Parolini 
Avec : Lee Van Cleef, Giampiero Albertini, Ignazio Spalla, Reiner Schöne…

Le Retour de Sabata, oui, d’accord, mais avant tout le retour de Lee Van Cleef dans le rôle, puisqu’après qu’il eut commencé la série en 1969, il dût laisser sa place à Yul Brynner dans le second volet, Adios Sabata (pendant que lui-même remplaçait le même Brynner dans La Chevauchée des sept mercenaires !). Le réalisateur, par contre, n’a jamais changé et Gianfranco Parolini demeure fidèle au poste, toujours planqué derrière le nom de Frank Kramer, son pseudonyme habituel. Nous sommes à une époque où le western spaghetti évolue vers la comédie, et Sabata est une figure importante de cette tendance, qui peut (un peu trop) hâtivement être taxée de dérive.

Ici, le style d’humour est donné dans l’introduction : le film sera un vrai cirque. Il démarre donc avec une troupe de saltimbanques qui dans des éclairages saturés mettent en scène un faux réglement de compte dans lequel Sabata tient le role du pistolero triomphant. Le public est content, et Sabata est loin de se vexer d’être passé du rang d’officier confédéré pendant la guerre à celui d’amuseur public dans la petite ville texanne de Hobsonville. Egalement arnaqueur dans les jeux d’argent et gros utilisateur de gadgets divers et parfois meurtriers, il se contente d’amasser de l’argent. Mais il en attend plus : un de ses anciens collègues de l’armée présent dans la ville lui doit également un bon pécule, et le mécène de la citée, le bon catholique irlandais Joe McIntock, est à la tête d’une fortune amassée en ayant produit un impôt sur les produits de luxe, les gains de jeux ou encore la prostitution. C’est en refusant de payer ces taxes que Sabata va provoquer du remous dans cette ville en apparence tranquille, mais dont les principaux citoyens ne sont pas forcément aussi sages qu’il n’y paraît…

Pour être le cirque, on peut dire que c’en est un beau ! L’intrigue, au début assez simple, évolue ensuite vers un embrouillamini plein de rebondissements, d’alliances naissantes et rompues, de plans foireux, de magots planqués un peu partout et de personnages versatiles, y compris Sabata lui-même, qui au départ passe aux yeux du monde pour un salaud qui refuse de payer un impôt permettant de construire de nouvelles structures à tendances sociales et qui finit en héros populaire sans qu’il n’ait pourtant jamais rien eu à faire avec bon peuple. Tout ceci est visiblement volontaire, car dans la démarche qui est la sienne, Parolini cherche en permanence à surprendre son public, voir à le faire tourner en bourrique. Il y a un certain côté vaudevillesque dans ce Retour de Sabata dont les personnages vont et viennent de l’hôtel au saloon, des chambres de putes (des putes par ailleurs très décomplexées) au désert aride, de la maison de McIntock aux toits desquels des embuscades se préparent. Les comploteurs vont et viennent, sont parfois graciés, parfois pas, et les duels armés tiennent eux-mêmes du burlesque. Sabata, en fin truqueur, utilise des méthodes fort peu conventionnelles, avec ses flingues planqués sous ses semelles, son petit flingue minuscule qu’il cache dans ses manches ou encore avec ses “crache-mitrailles” qui remplacent avantageusement les armes habituelles. Ses quelques hommes ne sont pas en reste et sont eux aussi formés à l’école du cirque : ils se permettent ainsi de jouer de la fronde avec leurs pieds, ou encore de faire des acrobaties en plein milieu du théâtre d’une fusillade.

A travers ces fantaisies, Parolini cherche volontiers à parodier l’invincibilité des héros westerniens classiques à la Clint Eastwood, Franco Nero ou Giuliano Gemma (ainsi, Sabata met en scène sa mort avec du faux sang, renforçant par la même son côté invulnérable). Lee Van Cleef est excellent dans un rôle très éloigné de celui de “La Brute” : son stoicisme de facade, son visage émacié ainsi que son regard sournois lui permettent de verser dans un humour décalé, très très ironique, s’appuyant en outre sur des répliques souvent adressées à la même personne, et renvoyant aux fraises les quolibets que s’échangeaient par exemple Clint Eastwood et Eli Wallach dans Le Bon, la brute, le truand (“S’il n’y avait pas une dame, je te dirais d’aller te faire… A moins que ça ne soit déjà fait.”… même la chanson du film fait dans le sarcasme : “If you wanna be rich, you gotta be a son of a…”). La technique se fait elle aussi gaudriolesque, avec une réalisation pleine de furieux décadrages parfois agrémentés de contre-plongées (pour voir sous les semelles !) et avec une musique proche de celle des séries télés british à tendance humoristique (Chapeau melon et bottes de cuir, Amicalement vôtre) ou venant outrageusement accentuer les scènes à forts enjeux dramatiques (de grandes plages d’orgue à la Bach !). Le grand méchant du film, lui, est une caricature d’irlandais confinant parfois au racisme : il est à la tête d’un clan, c’est un catholique convaincu, c’est un rouquin à la peau rougie par le soleil, et enfin il défend son or avec une abnégation toute égoïste…

Le Retour de Sabata, si l’on rentre dans son jeu il est vrai particulier, est assurément un bon film : construit avec une certaine logique qui se maintient pendant toute sa durée, il assure en permanence le spectacle. C’est quoi qu’il en soit plus amusant à regarder qu’une soirée Bouglione sur France 3.

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