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Short Circuit – John Badham

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Short Circuit. 1986

Origine : Etats-Unis
Genre : Infantile
Réalisation : John Badham
Avec : Ally Sheedy, Steve Guttenberg, Fisher Stevens, Austin Pendleton…

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Cinquième et dernier prototype d’une lignée de robots que la NOVA aimerait commercialiser à des fins militaires, Numéro 5 donne des sueurs froides à la direction le jour où, suite à un court-circuit qui le chamboule quelque peu, il prend la poudre d’escampette. Parvenant à échapper au service de sécurité du laboratoire, Numéro 5 croise la route de Stephanie Specks, une gentille fille un brin naïve qui le prend pour un extraterrestre. Très vite, une réelle complicité se noue entre la célibataire et la machine, que vient troubler l’entêtement des gens de NOVA à vouloir retrouver leur onéreux joujou… pour le détruire.

Lorsque Short Circuit sort sur les écrans, le public commence à être rodé par ces rencontres inter espèces qui fleurissent depuis la déferlante E.T. Et en règle générale, celles-ci laissent présager de spectacles bon enfant, où les bons sentiments ne gravitent jamais bien loin. Short Circuit ne déroge pas à la règle, présentant en outre une structure similaire au film de Steven Spielberg. Néanmoins, il s’avère au final plus proche de D.A.R.Y.L., partageant avec lui une même défiance pour les nouvelles technologies utilisées à des fins militaires. A ce titre, retrouver John Badham aux manettes d’un tel sujet ne surprend guère au regard de sa filmographie récente. Il pourrait même s’agir là du troisième volet d’une trilogie officieuse relative aux dangers du tout technologique entamée en 1983 avec coup sur coup Tonnerre de feu et Wargames. Par contre, là où les deux précédents films prenaient des allures de paraboles, Short Circuit déploie des efforts colossaux pour tout tourner en dérision.

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Sous prétexte de pondre un spectacle familial, John Badham s’est totalement laissé aller à une effarante puérilité, condamnant ses personnages à n’être que des stéréotypes au fil d’un récit paresseux. Le pompon revient au chef Skroeder, caricature du haut gradé qui ne comprend rien d’autre que la politique des armes. La présence sous le képi du comédien G.W. Bailey dans un rôle similaire place d’emblée Short Circuit sous l’égide peu flatteur de Police Academy (auquel a aussi participé Steve Guttenberg). Les deux films partagent une même finesse de propos, et un humour pataud. Dans le marasme ambiant, c’est encore Ally Sheedy qui s’en tire le mieux. Quand bien même son personnage témoigne d’une naïveté confondante, elle réussit à lui insuffler suffisamment de naturel et de fraîcheur pour que l’on n’ait pas envie de lui fiche des baffes à longueur de réplique. En outre, son duo avec Numéro 5 fonctionne plutôt bien, autrement mieux qu’avec Newton Crosby, dont le rapprochement opportun (et cul-cul la praline, il faut bien l’admettre) n’est là que pour éviter au film de prêter le flanc à une relation contre-nature, parfaitement envisageable compte tenu de ce qui précède. Après tout, la jeune femme ne nous est-elle pas dépeinte comme une personne en mal d’amour, substituant l’affection que lui refusent les hommes par celle d’animaux blessés auxquels elle offre le gîte ? Sa fragilité émotionnelle explique en tout cas son engouement rapide pour ce robot qui bouleverse son existence… mais tout de même pas au point de s’adonner à des actes que la morale réprouve. Stephanie et Numéro 5 ne pousseront pas le rapprochement au-delà d’une danse esquissée en guise de clin d’œil au grand succès de John Badham, La Fièvre du samedi soir. Par ailleurs, Stephanie n’ira guère plus loin avec Newton. D’une part parce que les péripéties ne le leur permettront pas, et d’autre part parce que ledit savant souffre lui aussi d’infantilisme. Enfermé durant 5 années dans son laboratoire, Norman en est réduit à s’émoustiller à l’idée que sa main a failli frôler celle de Stephanie. Lui aussi est un gentil naïf, mais qui frôle la bêtise. Il a beau travailler pour un laboratoire à vocation militaire, le bougre joue les étonnés qu’on ait pu à ce point pervertir ses créations qu’il cantonnait aux seules tâches du quotidien. Il conforte cette image du savant si haut perché qu’il n’est plus très au fait de la société. Avec son collaborateur Ben Jabituya, un frustré de premier ordre au doublage français insupportable dans sa volonté de souligner ses origines étrangères, il forme un duo d’inadaptés qui a vocation à faire rire, mais sans grande réussite. Traités par-dessus la jambe, les humains du film ne sont là que pour servir la soupe au Numéro 5, LA vedette du film, et sa raison d’être.

Short Circuit est donc un film qui se repose essentiellement sur ses effets spéciaux. Et quels effets spéciaux ! Numéro 5 est une petite merveille, ancêtre du Wall-E des studios Pixar, dont aucun des mouvements ne trahit le travail des manipulateurs. Qu’il saute, s’enfuie à toute vitesse, fasse la cuisine ou conduise, tout est d’une fluidité diabolique. Les trucages sont bluffants, à l’image de la scène où il danse en singeant John Travolta, un morceau de bravoure en soi. En outre, la machine jouit d’un capital sympathie non négligeable. Devenu « vivant » à la manière de la créature de Frankenstein grâce à l’électricité jaillie du ciel, Numéro 5 agit comme un enfant émerveillé face à ce qui l’entoure. En conséquence, il a une approche quelque peu maladroite du monde qu’il découvre, ce qui occasionne des passages savoureux. Je pense notamment à ce «Non, pas démonter Stephanie !» au double sens imparable, adressé à son ex petit ami alors que ce dernier tente de la maîtriser. Un petit trait d’humour que nous devons certainement au doublage, se rachetant ainsi modestement de l’ignoble caractérisation de Ben Jabituya. Par ailleurs, l’humour du film joue énormément sur le mimétisme de Numéro 5, reproduisant à la virgule près les gestes et répliques de personnages vus à la télévision. Une constante du cinéma américain des années 80 qui des Gremlins aux Goonies démontre l’omniprésence et l’influence de la télévision dans la vie quotidienne. Un élément qui achève de faire de Short Circuit un film bien de son époque.

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Jusqu’alors artisan respectable, John Badham s’est ici fourvoyé dans un film creux et risible, entièrement sacrifié sur l’autel d’effets spéciaux certes splendides, mais qui ne suffisent pas à rendre le film attachant. Le pire est qu’il ne laisse guère planer le doute quant à la vacuité de l’ensemble, le malaise étant palpable dès l’entame et cette succession de scénettes sans rythme ni ligne directrice. Compte tenu de l’intrigue, un minimum de suspense aurait été souhaitable. Or, les personnages n’étant que des fantoches, le service de sécurité de la NOVA au premier chef, nous ne nourrissons aucune crainte quant au devenir de Numéro 5. A l’impossible immersion s’ajoute un ennui tenace jusqu’à la consternation. Et dire qu’une suite en a découlé…

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