Freddy vs Jason – Ronny Yu
Freddy Vs. Jason. 2003Origine : Etats-Unis
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Le film s’ouvre sur Freddy Krueger, en direct de l’Enfer. Il s’adresse ouvertement au public, à son public, pour lui expliquer les raisons de sa si longue absence (8 ans, quand même!). Freddy souffre d’un patent manque de reconnaissance de la part des adolescents qui habitent Elm street. Ils ne croient plus en lui, et par conséquent, Freddy se trouve dans l’incapacité de hanter leurs rêves, puisque pour se faire, il nous apprend que ceux-ci doivent le craindre. Bien embêté par cette situation inédite, notre croquemitaine en pull rayé est contraint de se triturer les méninges pour trouver une solution à son problème. Il la trouve en la personne de Jason Voorhees, dont il va hanter les rêves pour l’inciter à reprendre du service en son nom. Ca va de nouveau saigner à Elm Street !
Cet affrontement entre les deux croquemitaines emblématiques des années 80 étaient dans les tuyaux depuis longtemps. Il fut un temps question que ce soit Tom McLoughlin (Vendredi 13 chapitre 6 : Jason le mort-vivant, le meilleur de la saga) qui le réalise. Et puis on crut que les choses allaient s’accélérer lorsque la New Line récupéra les droits de Jason Voorhees à l’issue de Vendredi 13 chapitre 8 : L’Ultime retour. Dans les deux cas, le projet resta lettre morte. Et puis alors que plus personne n’y croyait, le film se fit enfin, sous la houlette du réalisateur hong-kongais Ronny Yu, l’homme par lequel ce brave Chucky a connu une seconde jeunesse (La Fiancée de Chucky).
Ce combat des chefs intervient à un moment où les deux croquemitaines ne font plus recette. Toutefois, ils ne trônent pas sur un pied d’égalité. Si Jason Voorhees reste plus frais dans les mémoires (Jason X est sorti 2 ans plus tôt), Freddy Krueger demeure l’incontestable maître du genre, par son bagoût et la richesse de son univers. Il apparaît donc normal, et même attendu, que cet affrontement se fasse à son instigation. Avant que les deux têtes d’affiche ne s’affrontent de visu, Ronny Yu s’attache d’abord à confronter leurs deux univers. A charge pour lui de ne pas s’adresser uniquement aux inconditionnels des deux sagas, mais d’élargir au plus grand nombre.
En tant que “bras vengeur”, c’est à Jason qu’incombe le déclenchement des hostilités. Après avoir quitté Crystal Lake, sa terre d’adoption, il s’en va instiller la peur au sein de la jeunesse d’Elm street. Il s’invite à une petite soirée entre amis et tue l’un des convives, meurtre qui ouvre la brèche au souvenir longtemps refoulé de Freddy Krueger par les habitants du quartier. Ce dernier demeure encore trop faible et doit se contenter de simples effets à la The Mask pour effrayer les adolescents dans leur sommeil. Il fait donc encore appel à Jason qui, entièrement dévoué à son “maître”, accomplit sa tâche avec application. Trop même, puisqu’il en vient à voler les victimes sous le nez de Freddy lors d’une séquence parfaitement représentative des méthodes de chacun. Lorsque l’un, Freddy, palabre durant des heures et affectionne tout particulièrement jouer au chat et à la souris avec ses proies, l’autre, Jason, tue le plus sobrement possible.
Dans sa première partie, Freddy vs Jason s’articule autour d’un Jason Voorhees tout heureux de reprendre du service. Il s’en donne à coeur joie dans le massacre d’adolescents, sa spécialité. Un Jason tout feu tout flamme qui s’offre même une petite virée dans une rave party. Pendant ce temps, Freddy ronge son frein en attendant des jours meilleurs. Mais qu’on ne s’y trompe pas, c’est bel et bien Freddy Krueger / Robert Englund la vedette du film. C’est donc avec un plaisir non dissimulé qu’il manipule son rival de toujours et qu’il constate que, malgré tous les efforts déployés par le tueur de Crystal Lake, c’est de lui que les gens ont peur. Le constat qui ressort du film est sans appel. Jason ne suscite plus qu’un vague effroi lorsque Freddy provoque une véritable psychose. Tant et si bien que les habitants de Elm street ont usé de multiples subterfuges pour que leurs enfants effacent son nom de leur mémoire, quitte à les droguer. Ce pauvre Jason a beau avoir trucidé bon nombre de leurs camarades sous leurs yeux, Lori et ses amis persistent à ne voir en lui que l’unique moyen pour mettre un terme aux agissements de Freddy. Ils n’hésitent alors pas à venir en aide à Jason lorsque celui-ci est chahuté dans ses rêves par Freddy afin de ramener ce dernier dans le monde réel. Le combat tant attendu peu enfin commencer. Un combat qui débute sur fond de hard rock (énorme faute de goût), et durant lequel les deux figures majeures du cinéma horrifique des années 80 se rendent coup pour coup, jusqu’à l’overdose.
Sans surprise, ce “versus” s’avère franchement indigeste. Véritable pot-pourri de l’univers des deux croquemitaines, Freddy vs Jason ne cherche jamais à surprendre. Le film préfère capitaliser sur les acquis des deux sagas, jusqu’aux séquences oniriques impersonnelles qui émaillent le récit (on nous ressort les gamines en robe blanche faisant de la corde à sauter). Et puis il y’a Lori et ses amis, dont Kelly Rowlands des Destiny’s Childs, à l’omniprésence éprouvante. Même lors de l’affrontement entre les deux boogeymen, ils trouvent encore le moyen de ramener leur fraise. Mais le pire dans tout ça, reste encore le clin d’oeil final adressé aux spectateurs, annonciateur d’une suite qui ne viendra pas. Plutot que de relancer l’une ou l’autre des franchises, Freddy vs Jason a eu raison des deux, du moins dans leur forme initiale.