Nightmare Cinema – Mick Garris, Alejandro Brugués, Joe Dante, Ryûhei Kitamura, David Slade
Nightmare Cinema. 2018.Origine : États-Unis
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L’aventure des Masters of Horror s’est achevée en 2007, mais l’ami Mick Garris semble avoir bien du mal à tourner la page. Depuis, il s’est évertué à décliner le même format avec une politique fondée sur le recrutement de grands noms (du moins autant que possible)… Cela a commencé quelques mois après la fin de sa série avec un job de co-producteur sur les Masters of Science-Fiction, qui malgré la prestigieuse tutelle du physicien Stephen Hawking n’auront connu que 6 épisodes. Puis il a poursuivi avec Fear Itself, officieuse saison 3 (au rabais) des Masters of Horror qui n’eut même pas l’insigne honneur d’aller jusqu’au bout de sa diffusion, la chaîne commanditaire NBC ayant profité des jeux olympiques de 2008 pour faire l’impasse sur les 5 derniers épisodes d’une saison qui aurait dû en compter 13. Enfin, entre 2010 et 2016 Garris se retrouva aux manettes d’un talk-show à son nom (et pour cause, il en est le producteur avec sa boîte Nice Guy Production) : “Post Mortem with Mick Garris”, un podcast paraissant épisodiquement dans lequel il interviewe des grands noms de l’horreur. Des collègues des Masters of Horror, bien sûr (Joe Dante, John Carpenter, John Landis, Tobe Hooper), mais d’autres également (William Friedkin, Wes Craven, le maquilleur Rick Baker…). Les plus curieux pourront aller voir le site qui héberge tout ça, avec en page d’accueil les selfies du brave Mick avec tous ses copains. Dans le même temps, il a aussi rejoint la petite troupe formée par Joe Dante pour le site internet “Trailers from Hell”, présentant des films “de genre” plus ou moins rares illustrées par des bandes-annonces. Et donc voilà qu’en 2018 il produit le film à sketchs Nightmare Cinema, dans la lignée d’un Trapped Ashes sorti en 2006 et qui -sans que Garris ne soit impliqué- surfait déjà sur le concept des Masters of Horrors (et dans lequel Joe Dante était déjà présent, en compagnie de Sean S. Cunningham, Ken Russell, Monte Hellman et John Gaeta). Même principe : un fil rouge signé Mick Garris lui-même pour donner du liant à tous ces sketchs, au nombre de 5 : un pour le maître d’œuvre, un pour Joe Dante qu’on ne présente plus, un pour Ryûhei Kitamura (auteur de Midnight Meat Train et de l’épouvantable Godzilla Final Wars), un pour David Slade (Hard Candy, 30 jours de nuit) et enfin un pour le relativement novice Alejandro Brugués (Juan of the Dead, des épisodes de la série Une nuit en enfer). Soit deux vétérans, un quasi-débutant et deux “entre-deux”.
Le Rialto est un cinéma à l’ancienne dans lequel des badauds isolés sont attirés par la présence de leurs noms sur la marquise. Une fois dedans, point d’autres spectateurs, mais un inquiétant projectionniste aux propos nébuleux et vaguement menaçants. Lequel diffuse des films montrant aux 5 visiteurs de ce soir-là les très malencontreuses aventures auxquelles ils risquent d’être confrontés… Inutile de s’appesantir là-dessus, ce n’est qu’un fil rouge. Un peu brouillon (on voit mal à quoi veut en venir le projectionniste), mais qui a le mérite de se dérouler dans un chaleureux cinéma à l’ancienne et de donner à ce bizarre énergumène qu’est devenu Mickey Rourke le rôle bienvenu d’un monsieur Loyal de l’épouvante.
Place donc à “The Thing in the Woods”. Une entrée en matière confiée à l’argentin Alejandro Brugués, auteur de la farce horrifico-politique Juan of the Dead (2011) dans laquelle les zombies faisaient plus ou moins office de dissidents dans la Cuba socialiste. C’est probablement sur la foi de cette farce qu’on lui a confié cet épisode, le plus ouvertement humoristique du lot. Il se penche sur le cas de Samantha, une jeune fille confrontée dans les bois à un psycho-killer masqué : le “soudeur”. Rapport à son masque et au chalumeau dont il aime a faire usage.
Si Jason Voorhees est le roi des tueurs forestiers, il est loin d’être le seul sur ce créneau. Pourtant, probablement de façon totalement inconsciente de la part de Brugués, son tueur et même tout son épisode auraient bien plus tendance à évoquer une toute autre figure, principalement connue des spectateurs francophones, à savoir celle du tueur de “Red is Dead”, le film autour duquel tourne La Cité de la peur. Le film des Nuls s’ouvrait avec une grossière parodie de films d’horreur qui est en fait ce qui se rapproche le plus de “The Thing in the Woods”. Commençant en plein milieu de l’action, avec déjà de nombreux cadavres et très peu de survivants éparpillés, Brugués s’évite par conséquent les affres d’une longue exposition qui de toute façon ne présenterait aucun intérêt. C’est qu’ici, les victimes potentielles autant que leur bourreau sont d’une crétinerie à toute épreuve, faisant virer le sketch dans un humour certes moins absurde que dans le film des Nuls, mais qui suffit à faire virer le tout à la parodie. L’horreur passe alors au second plan, et ce malgré les efforts consentis en terme de gore. Il n’y aurait rien de répréhensible à cela si la parodie réussissait à faire autre chose qu’à se gausser bêtement des conventions du slasher… Ce n’est clairement pas le cas, et lorsque Burgués sort enfin des sentiers battus de la parodie, ce n’est pas en changeant le fond mais bien la forme… C’est que la parodie slasher à la Vendredi 13 se transforme soudainement par la grâce d’un deus ex machina scénaristique en espèce de parodie d’Evil Dead. L’improbabilité de cette réorientation incarne bien l’esprit du réalisateur, féru d’incongruité. Si Brugués avait vraiment voulu surprendre, il aurait mieux fait de renouveler sa façon d’aborder l’humour…
Le deuxième Sketch, “Mirari”, voit débarquer la véritable tête de gondole de tout le projet Nightmare Cinema : Joe Dante. L’héritier spirituel de Roger Corman se fait bien rare sur grand écran, et sa dernière prestation sur ce format (Burying the Ex) était malheureusement bien décevante. L’ex monteur de la New World qui importa l’esprit cormanien à Hollywood semblait avoir perdu toute forme d’envie, régressant à une forme d’humour assez facile et démagogique, pas si éloignée que cela de la tonalité du sketch précédent. A ceci près qu’il parodiait les comédies sentimentales adolescentes. En dehors de cela, il s’est plongé dans l’anonymat de la réalisation d’épisodes de séries télévisées. Tant et si bien que sa seule véritable motivation ces derniers temps semble avoir été son site “Trailers from Hell”. Mais enfin, bon bougre, il accepta l’invitation du copain Mick Garris et le voici donc qui illustre le séjour de Anna dans un établissement de chirurgie esthétique recommandé par son petit ami David. Non parce qu’il la préférerait sans cette disgracieuse cicatrice laissée sur sa joue par un vieil accident de voiture, mais bien parce qu’il sait que Anna sera mieux dans sa peau sans elle. Et puis après tout, le docteur Mirari n’a-t-il pas déjà fait des miracles pour la future belle-mère d’Anna, qui doit la rencontrer bientôt ?
Au moins Joe Dante abandonne l’humour facile de Burying the Ex. C’est déjà ça. Par contre il se lance dans un style auquel il ne s’était jamais confronté : celui du thriller à forte tendance onirique, un peu à la manière de David Lynch. Autant dire que l’on ne reconnaît pas dans “Mirari” la patte du féroce défenseur de la sous-culture populaire des années 50 et 60. Du reste, entre les décédés (Dick Miller, Kevin McCarthy, Henry Gibson, Rance Howard…) et ceux qui ont mystérieusement disparus de ses castings (Robert Picardo, Mary Woronov, Wendy Schaal…) il est devenu très rare de croiser les membres de la petite troupe qu’il trouvait toujours le moyen d’intégrer à ses films d’antan. Enfin au moins, pour sauver l’honneur, on retrouvera ici Belinda Balaski, absente de la filmographie de Joe Dante (et mêmes des écrans en général) pendant 20 ans, après l’avoir suivi depuis l’époque New World. Sa seule présence -modeste- reste cela dit bien mince lorsqu’il s’agit d’apposer à “Mirari” la patte Joe Dante. Le sketch aurait plus tendance à porter celle du scénariste, Richard Christian Matheson, fils du grand écrivain et abonné aux séries télévisées fantastiques (de L’Incroyable Hulk dans les années 70 aux deux épisodes de Tobe Hooper des Masters of Horror en passant par Les Contes de la cypte et Histoires fantastiques). Dans le milieu extrêmement aseptisé -fort éloigné de la folie des meilleurs films de Dante- de cette clinique, sous les apaisantes paroles d’un docteur Mirari (Richard Chamberlain) que l’on devine trompeur, Anna est plongée dans un monde de cauchemar. Elle devine bien assez tôt que l’endroit, avec sa luminosité d’un bleu maladif, s’apparente à une prison d’où elle ne peut s’échapper. Elle se retrouve à la merci des sombres desseins du bon docteur, de ses infirmières, voire même de David qui l’a traînée ici. Bref, nous sommes dans une simple histoire de paranoïa et d’apparences trompeuses. Toute balafrée qu’elle soit, Anna est bien plus sensée que le gourou de la beauté chez qui elle se trouve. Rien de vraiment palpitant là-dedans, et malgré une mise en scène qui essaie de retranscrire le malaise censé être ressenti par l’héroïne, et malgré un final plutôt percutant, Joe Dante a du mal à sortir “Mirari” de l’ornière. Un petit exercice de style sans grande ingéniosité, avec un vague relent de malice quant à l’acharnement sur le personnage principal. Un peu comme si le réalisateur avait abordé ceci comme il aborde les épisodes de séries télé qui lui fournissent ses revenus : machinalement… Il réalise l’épisode le plus quelconque de Nightmare Cinema. Bien triste, tout ça.
En revanche, celui qui n’est pas triste, c’est bien Ryûhei Kitamura. “Mashit”, son sketch, se déroule dans un pensionnat catholique où un enfant vient de se suicider devant ses camarades. Le père Benedict, responsable de l’institution, secondé par une bonne sœur qui se trouve également être son amante, devra faire face à la réalité : un démon sévit en ses murs et provoque une épidémie de possessions…
Appartenant à cette vague de cinéastes asiatiques portés sur l’action autant que sur l’horreur, Kitamura s’est fait remarquer par une poignée de films qui l’ont conduit en 2004 à la lourde tâche d’organiser la (soi-disant) cérémonie d’adieux du Godzilla nippon : Godzilla Final Wars, dans lequel tous les amis et antagonistes du lézard géant étaient de la fête. Une fête plus que bien arrosée, dans laquelle tout le monde a fini rond comme une queue de pelle. Ce fut un vaste foutoir hystérique, indigeste jusqu’à la nausée. Si Joe Dante était méconnaissable dans “Mirari”, Kitamura est par contre fidèle à lui-même dans “Mashit”, n’hésitant pas une seconde à combiner avec hardiesse l’épouvante démoniaque des années 70 et la branchitude du cinéma d’action asiatique des années 90 / 2000. Un mélange peu ragoûtant sur lequel le réalisateur n’a pas lésiné sur les doses, ceci expliquant peut-être cela… Ainsi il n’hésite pas à en faire des caisses pour donner du style à sa présence maléfique, et faire naître la peur à grand coup de tambours et trompettes. Ses cadres semblent avoir été travaillés dans l’unique but de fournir leur quota d’images iconiques, puisant allégrement au passage dans La Malédiction (les enfants démoniaques) ou L’Exorciste (les maquillages, les images subliminales). Un abus de stéréotypes tournant autour d’une intrigue fumeuse sur laquelle va se greffer une dernière ligne droite à coups de sabres et de membres tranchés pendant que les acteurs prennent la pose et que le démon ne se cache plus et que y’a de la révélation et pis aussi des sentiments et burp, n’en jetez plus… On ne sait même plus si le tout essaie d’effrayer, de faire sourire ou de donner du plaisir, ou tout à la fois. Ce sketch, le plus mauvais de tous, donne l’impression de s’enivrer jusqu’à avoir le tournis. Heureusement qu’il n’a pas duré 15 minutes de plus…
Faisant une nouvelle fois une alternance entre l’outrancier et l’introspectif, David Slade nous ramène avec “This Way to Egress” dans le milieu médical. Alors qu’elle attend depuis déjà trop longtemps avec ses deux enfants dans la salle d’attente de son médecin, Helen est prise d’une forme sévère d’hallucinations : la réalité s’efface petit à petit, la secrétaire commence à être défigurée et l’environnement à se décrépir. L’entretien avec le Dr. Salvadore se montre inquiétant, l’homme cernant tout de suite ses symptômes, mais doit partir en urgence, lui donnant rendez vous pour le lendemain. Une fois revenue dans le couloir, non seulement Helen ne retrouve plus ses enfants mais elle se tient dans un univers purement et simplement vicié, avec des monstres se livrant à diverses tâches du quotidien.
Bien étrange épisode que celui-ci, qui avec son noir et blanc et sa métaphore de la dépression (Helen vient de se faire larguer et redoute le ressentiment de ses enfants) s’apparente assez à une parenthèse fortement “auteurisante”, voire prétentieuse diront certains. Au niveau formel, David Slade réussit son coup : effectivement son essai se montre inquiétant, non seulement à cause de la décrépitude du monde dans lequel évolue Helen -un labyrinthe de salles et de couloirs vides suintant de crasse-, mais également et peut-être surtout par la présence des quelques monstres croisés ici ou là, s’adonnant à des tâches professionnelles basiques (il ne sont en réalité que la version parallèle des employés vus par les yeux d’une femme au bout du rouleau). Les effets de maquillage sont très réussis, et le total décalage entre leurs faciès sinistres et la banalité de leurs actes contribue fortement à la singularité de “This Way to Egress”. Pour un peu, ce dernier pourrait servir de carte de visite à David Slade, si un jour il voulait se lancer dans une nouvelle adaptation filmique du jeu Silent Hill, dont le concept est fort similaire. Notons tout de même que le format sketch est adapté : avec une durée supérieure, l’accoutumance à ces décors viendrait annihiler les efforts entrepris et laisseraient le champs libre à une histoire qui ne va pas très loin, son enjeu étant en réalité les relations de Helen avec ses enfants. En un sens, ce sketch est une sorte de version plus inventive du “Mirari” de Dante, assez similaire dans leurs déroulements. Ce sont en gros deux intrigues à base de femme paranoïaque enfermée dans des couloirs menaçants…
Et c’est donc à Mick Garris qu’il revient de fournir le dernier tronçon, qui -comme les autres- se conclura par le “retour” au cinéma de Mickey Rourke en compagnie du personnage principal du sketch écoulé. Ici, il s’agit du jeune Riley, un pianiste virtuose qui vient de conclure un brillant récital et est en passe de rentrer chez lui avec ses parents lorsqu’un cinglé fait irruption, assassine père et mère et tire sur Riley également. Emmené à l’hôpital en état critique, l’adolescent survit, et possède désormais un don : celui de voir les morts. Un talent que seule une autre jeune miraculée du service peut comprendre, l’ayant développé en revenant elle aussi du monde des morts.
Si Nightmare Cinema prétendait rendre hommage à la tradition horrifique, et bien jusqu’ici c’était raté. Entre deux épisodes très contemporains et deux autres bien trop maniérés pour évoquer quoi que ce soit, les citations directes ou les évocations plus subtiles tombaient à l’eau. Tant et si bien que seul “Dead”, ce sketch, ressemble réellement à de l’horreur “old school”. Lorsqu’il ne travaille pas avec ses amis cinéastes, Mick Garris collabore avec une pointure littéraire, Stephen King, dont il est le fidèle adaptateur à l’écran. Et plus qu’au Sixième sens de Shyamalan auquel le sujet de “Dead” pourrait faire penser de prime abord, c’est bien à l’auteur de Dead Zone auquel on pense ici. Non seulement parce que le don de Johnny Smith trouve un écho dans celui de Riley, mais surtout parce que la nature du personnage évoque maints équivalents nés de la plume de King. Un gamin qui se sent isolé, confronté à des forces qu’il semble être trop frêle pour supporter, une impossibilité de communiquer avec les adultes et enfin un traumatisme familial, tout ceci est du pur Stephen King. Ainsi Riley doit-il faire face à sa nouvelle réalité (le retour de sa mère, qu’il pense d’abord être encore vivante et qui voudrait le voir la rejoindre), apprendre à ne pas redouter son pouvoir (avec l’aide d’une autre jeune “marginale”) et lutter contre le tueur qui a détruit sa vie, déterminé à le retrouver. Cela fait beaucoup pour un seul sketch, mais assez étonnamment Garris ne s’en sort pas trop mal. Riley en particulier se révèle attachant, tout comme la punkette qui le prend sous son aile. En revanche, au niveau purement horrifique, rien que de très classique, un peu agrémenté de gore. Garris n’échappe pas au syndrome du film de couloir (encore !), avec par conséquent des passages obligés, mais rien de véritablement répréhensible. D’autant qu’il peut également faire preuve d’audace en inventant certains “rebondissements”. En somme, une fois n’est pas coutume, Mick Garris offre la meilleure prestation du lot, du moins celle qui est la plus en phase avec ce que l’on attendait d’un “Nightmare Cinema”.
Il est facile de se moquer de Mick Garris et de son abnégation qui, qualitativement, a rarement porté ses fruits (à part peut-être pour quelques épisodes de la saison 1 de Masters of Horror). Ce n’est toujours pas le cas ici, quel que soit le pedigree des réalisateurs concernés. Cela part dans tous les sens, entre la parodie démago, les exercice de styles auteurisants, le grotesque et l’horreur standard, le plutôt bon et le franchement mauvais en passant par la cruelle déception. Bien entendu, le but de ce film, ainsi que de toutes les productions du même acabit estampillées Mick Garris, n’a jamais été d’offrir au cinéma d’horreur des classiques aussi retentissants que L’Exorciste, Massacre à la tronçonneuse, Halloween, Zombie ou autres Evil Dead en leurs temps. Plutôt que de renouveler, il s’agit de le célébrer avec ce qu’il faut de modernisme, et en cela la démarche profite du sillon tracé par Quentin Tarantino tout en s’en démarquant puisqu’il ne s’agit pas faire des resucées, et encore moins des remakes / reboots / préquelles et autres qualificatifs fumeux. Et si l’expérience démontre qu’en pliant les gaules une bonne fois pour toute John Carpenter est le “master of horror” qui s’est montré le plus sage vis-à-vis de la qualité générale de sa filmographie, le cœur s’avoue malgré tout bien heureux de voir des grandes figures continuer à tourner. Wes Craven, George Romero, Tobe Hooper -auxquels Nightmare Cinema est dédié- et plus récemment Larry Cohen, Stuart Gordon, sans parler de l’italien Umberto Lenzi, de l’espagnol Narciso Ibáñez Serrador ou du brésilien José Mojica Marins alias “Zé do Caixao”… Toutes ces figures ont désormais disparu, et quel que puisse être le résultat, on ne peut que saluer les derniers coups de manivelles qu’offre Mick Garris à toute une génération qui avait pris le relais de leurs aïeux Terence Fisher, Jacques Tourneur, Mario Bava ou autres Roger Corman (tient bon la rampe Roger !)… Mais enfin, au bout d’un moment, il serait bienvenu qu’un des “grands anciens” encore debout accouche véritablement de quelque chose digne de l’aura glanée à la grande époque.
Nightmare Cinema m’a désemparé par le style et le ton de chaque sketch. Comme il n’y a pas une sorte d’homogénéité, comme les Masters of Horror, le résultat m’a pas un peu rebuté, tout comme Trapped Ashes d’ailleurs. Je lui préfère encore des classiques comme Body Bags, ou Terror Tract plus classiques dans leurs mises en scène et leur approche.
Généralement, les films à sketches ont la réputation d’être inégaux. Dans le cas présent, ce n’est pas le cas puisque on peut constater une belle homogénéité. Dommage que ce soit dans la médiocrité…
Je rejoins un peu ton avis mais c’est vrai que l’histoire de Joe Dante m’a un peu desarçonné. Je pensais pas qu’il pouvait faire un épisode aussi glauque. J’avais vu des épisodes de lui dans la série Les Nuits de l’étrange dont un avec feu Brian Dennehy, et j’y ai ressenti plus le Joe Dante que je connaissais que dans ce sketch.
Pour David Slade c’est différent, il avait un épisode en noir et blanc pour Black Mirror qui jurait un peu avec le thème de la série, et quand j’ai vu cette histoire avec cette femme qui voit le monde dans une ambiance suintante, visqueuse en noir et blanc, je me dis que l’on peut faire un diptyque avec ces deux épisodes sortis de leur cadre respectif. L’épisode m’a vraiment marqué même si je n’ai pas trop compris l’histoire.
Quant à Ryuhei Kitamura, il a probablement fait le plus mauvais épisode et pourtant j’ai adoré son Midnight Meat Train, adaptation d’une nouvelle des Livres de Sang de Clive Barker, et dernièrement Downrange, thriller à ciel ouvert ou des jeunes sont la proie d’un sniper, coincés malgré eux sur une route déserte. Son histoire de possession partait dans le grand guignol, et j’avais du mal à retrouver le réalisateur de Downrange dans ce massacre final qui fait plus série Z qu’autre chose.
L’histoire de Mick Garris est ironiquement celle à sauver, et aurait plus mérité d’être dans une anthologie ou une série que dans ce long métrage. Il est plus classique sur le fond et la forme et rappelle naturellement Sixième sens et jure même avec le reste du film, ce qui est à son avantage. On a souvent considéré Mick Garris comme le canard boiteux parmi les Masters of Horror: Stuart Gordon, Tom Holland, Wes Craven, Georges Romero, John Carpenter, Tobe Hooper etc…. et pourtant il aura su tirer pour ma part deux excellents films: un tour sur Riding the Bullet et Desolation, deux adaptations de Stephen King.
Reste le réalisateur le moins connu de l’anthologie: Alejandro Brugués, qui tourne un pastiche des slashers des années 80, limite une parodie pour bifurquer dans un revirement qui change complétement l’histoire, la menace n’étant pas forcèment ce qu’elle a l’air de paraitre. Pour avoir vu la saison de American Horror Story 1984, qui utilisait les codes des slashers pour les détourner mais pas pour en faire n’importe quoi, je trouve que Alejandro Brugués a apporté fraicheur et nouveauté comme l’a fait La Cabane dans les bois, ou Tucker et Dale fightent le mal.
En conclusion, j’ai pas trop aimé cette anthologie. Ça reste la moins pire que j’ai vue mais elle est loin du haut du panier comme Creepshow.