CinémaHorreur

Macabre – Kimo Stamboel & Timo Tjahjanto

macabre

Darah / Rumah Dara. 2009

Origine : Indonésie / Singapour 
Genre : Horreur 
Réalisation : Kimo Stamboel & Timo Tjahjanto 
Avec : Ario Bayu, Shareefa Daanish, Julie Estelle, Ruly Lubis…

Adjie et sa femme Astrid, enceinte de 8 mois, fêtent leur départ pour l’Australie avec quatre de leur amis. Mais, alors qu’ils prennent la route de l’aéroport ils croisent une jeune femme perdue sous la pluie, qu’il décident de raccompagner chez elle, dans une maison perdue au milieu de la forêt…

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J’avoue assez mal connaître le cinéma Indonésien, pourtant le plus grand pays musulman du monde peut se targuer de quelques titres plus où moins prestigieux auprès des amateurs éclairés, notamment dans le genre du cinéma d’horreur. Et si vous vous intéressez un peu au genre, il y a de fortes chances que vous ayez entendu parler de La Reine de la magie noire et ses célèbres décapitations ! Et ce n’est là que le plus célèbre titre de tout un pan du cinéma de ce pays, qui mêle allègrement horreur et arts martiaux, le tout dans un déluge d’effets spéciaux dont l’amateurisme n’a d’égale que leur audace et leur inventivité.
L’Indonésie a donc un vrai passé de cinéma bis. Et ce Darah, qui en représente la “nouvelle vague” n’y fait absolument pas référence.

Les frères Mo qui scénarisent et réalisent ce film préfèrent largement se tourner vers des références occidentales, parmi lesquelles l’inévitable Massacre à la tronçonneuse qui n’a pas fini de faire des émules, mais également notre A l’intérieur national, ce qui est plus surprenant. C’est en tout cas la preuve d’une relative bonne santé du genre en occident, qui n’a pas fini de marquer les esprits par le biais de son cinéma d’horreur. Mais ça on le savait déjà un peu, et pour ma part je confesse avoir été déçu de ce relatif manque d’exotisme… qui se ressent finalement dans tout le cinéma de l’Asie du Sud, qui semble pris en étau entre les identités culturelles extrêmement fortes du Japon et de l’occident, pour ce qui est du film d’horreur en tout cas ! Mais l’on remarque ce même phénomène dans le récent 13B jusqu’au curieux Hell’s ground (qui se revendique être le premier film gore pakistanais !)… Cette assimilation de cultures dominantes dans le film d’horreur est à chaque fois dommageable, et me porte à croire que ce cinéma est encore trop inscrit dans une culture spécifique alors même qu’il prétend explorer un thème universel (la peur !). A croire que les réalisateurs pensent que la culture occidentale est indissociable du genre et qu’il n’est du coup pas compatible avec la culture islamique des pays sus-cités… regrettable car c’est ce qui aurait été intéressant !

Mais je ferme là cette parenthèse un peu générale pour parler plus spécifiquement de Darah (retitré Macabre pour la distribution internationale, le mot Darah signifie “sang” en malais mais renvoie aussi au nom de la méchante du film. Notons enfin que ce titre a été utilisé pour l’exploitation à Singapour, tandis qu’en Indonésie le film est appelé Rumah Dara).

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Car si le film emprunte beaucoup de références et d’éléments narratifs au cinéma d’horreur occidental, il n’en demeure pas moins très plaisant dans la mesure où tout est plutôt très bien exécuté.
Et si l’histoire est des plus convenues, elle ne sert finalement que de cadre général à un petit jeu de massacre des plus plaisants. Darah fonctionne un peu à la manière d’un bon slasher, qui compense son manque d’originalité générale par des effets spéciaux soignés et des meurtres très graphiques, où l’arme du crime et le modus operandi sont sans arrêt renouvelés. Bref largement de quoi combler l’amateur lambda de cinéma bis. Dans cette histoire, il aura droit à une bonne quantité de mutilations faites au moyen d’armes blanches les plus diverses (dont une serpe, et un arc), une jolie décapitation, de belles fusillades et enfin l’inévitable démembrement à la tronçonneuse, qui compte cette fois sur une astuce de mise en scène plutôt amusante pour renouveler la scène (la caméra est fixée à la lame de la tronçonneuse !). Bref, le sang coule de manière assez généreuse, et la couleur rouge sera de plus en plus présente à l’écran, jusqu’à un final tout dégoulinant d’hémoglobine.
Cette profusion d’humeurs ne nuit par ailleurs pas à l’installation d’une ambiance assez macabre, voire inquiétante. En effet, si l’exotisme fait cruellement défaut dans le scénario (qui aurait très bien pu sans changer d’un iota se passer au fin fond de la Louisiane, ou pire, des Ardennes…) on se rattrape un peu sur les décors et les costumes. En effet la maison de nos affreux découpeurs, la forêt, etc. tout respire cette fois l’Indonésie. Ce qui est plutôt bienvenu, et contribue, avec l’usage d’une photographie donnant la part belle aux teintes chaudes, à l’installation d’une atmosphère poisseuse et lourde. C’est en outre assez intéressant de voir le survival sanglant américain gicler ainsi au milieu de ce cadre Indonésien. L’affiche originale illustre d’ailleurs (involontairement ?) cette dichotomie en opposant une héroïne sanglante qu’on dirait tout droit sortie d’un massacre texan et une Barbara Steele locale tout en beauté inquiétante.

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D’ailleurs parlons-en de cette inquiétante beauté ! Il s’agit évidemment de la Dara du titre, maîtresse de maison et grande organisatrice du carnage qui est promis au spectateur ! Son personnage constitue sans aucun doute l’attrait majeur du film, tant il en impose. Charismatique et effrayante, Dara est incarnée pour la seconde fois par l’actrice Shareefa Daanish, qui officiait déjà dans ce rôle dans un court-métrage sobrement intitulé Dara également réalisé par les frères Mo. Et l’actrice d’imposer une image angoissante et fascinante par son port aristocratique, sa diction étrange et surtout, par son regard terrible. On sent là qu’un soin particulier a été porté à la construction du personnage. D’ailleurs, les autres protagonistes ne sont pas en reste. Et même s’ils sont forcément moins marquants que cette Dara qui fait ici figure de mal absolu, leur psychologie n’est pas pour autant négligée et rapidement ils pourront devenir attachants. En tout cas, point ici des traditionnels ados stéréotypés. Cela confère au film un petit surplus d’efficacité assez bienvenu.
Et au final, quand bien même le scénario pêche par un vrai manque d’originalité, de plus alourdi par des ellipses parfois difficilement compréhensibles, Darah demeure un film efficace qui donne au spectateur ce qu’il était venu voir, et parvient du même coup à gagner ma sympathie.

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