Gogs – Deiniol Morris & Michael Mort
Gogs, the complete collection (Gogs, Gogs II, Gogwana). 1993 – 1998.Origine : Pays de Galles
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En Angleterre, on aime l’animation en volume et les studios Aardman l’ont largement prouvé avec, en têtes de pont Wallace et Gromit. Au Pays de Galles, on aime aussi l’animation en volume et là-bas ce sont les studios Aaargh! animation (sic) qui s’y sont collés avec la famille préhistorique de Gogs. A savoir un grand-père moustachu, barbu et tout le temps cul nu, un père chasseur plutôt maladroit, une mère irascible qui n’a d’égards que pour son petit dernier, lequel pleure, hurle, mange, pète, rote, et fait plus de bruit qu’un groupe de métal un soir de concert, enfin un fils crétin qui fait de jolies bulles de morve verte avec son nez et une fille à la coupe de cheveux rappelant les Beatles quand elle ne vire pas à l’afro, l’intellectuelle du clan.
Très lointains cousins des Pierrafeu ou des personnages de La Guerre du feu, les Gogs sont nos ancêtres dégénérés, passant leurs temps à se taper dessus, à chercher à manger ou à fuir devant les créatures monstrueuses qui peuplent ces contrées. Car ici, comme dans nombre de films “préhistoriques”, foin de réalisme, et les dinosaures côtoient les humains sans vergogne. Qui plus est, tout est destiné à faire rire, et si possible grassement. Les auteurs n’ont pas choisi de faire dans le subtil ou le raffiné mais n’hésitent pas à charger la barque en jouant la carte du pipi-caca-prout qui, pour n’être pas neuve, obtient toujours son petit succès. Comme en plus tous ces personnages ne s’expriment que par cris, grognements et autres borborygmes (à moins que cela ne soit du gaélique), il n’est nul besoin de dictionnaire pour comprendre ce qu’ils expriment, les voir suffit largement.
C’est ainsi qu’on les suit dans leur petit coin en bordure de forêt dans la première série et dans la seconde (constituées d’épisodes de 5/6 minutes), avant de les voir prendre le large et partir découvrir le monde dans l’opus qui clôt cette collection et s’étale sur une petite demi-heure. S’ils nous ont démontré qu’ils étaient nuls en techniques de chasse et bêtes à un point qui donne une idée de l’infini (à l’exception de la fille, donc), on y apprend quand même des choses intéressantes, comme la signification réelle des monuments de pierre façon Stonehenge, et l’on y voit les prémices de l’art et de la science s’exposant sur les murs en peintures rupestres du plus bel effet.
Les animateurs Gallois sont-ils féministes ? Je ne sais pas mais force est de reconnaître que les femmes ont finalement presque le beau rôle dans l’histoire. La mère est plus forte que les hommes, plus intrépide aussi et, par un renversement des rôles les plus couramment attribués, c’est elle qui les ramène à la maison, en les traînant par les cheveux ou par la barbe. La fille, de son côté, est un peu l’équivalent de Léonard de Vinci transposé à l’âge de pierre. Les idées s’entrechoquent dans sa tête et, parfois, lorsqu’elle n’est pas contrecarrée par un grand-père à la masse ou mise en fuite par un T-Rex affamé, elle arrive à en réaliser quelques unes, visionnaires et futuristes, qui donnent de l’envol à la série et font décoller les personnages, au sens propre…
On retrouve dans Gogs, Gogs II et Gogwana, des tas d’idées visuelles qui prennent leurs sources dans les dessins animés (yeux exorbités d’effroi par exemple) mais aussi dans le cinéma de genre, celui mettant en scène des mondes perdus ou préhistoriques (les diplodocus et autres tyrannosaures font moins penser à Jurassic Park qu’à La Planète des dinosaures, certes), celui d’aventures (avec cette rencontre des pygmées cannibales ou d’une sorte de yéti) ou celui d’horreur (la séquence du grand-père revenant d’entre les morts et les déplacements en caméra subjective parmi les arbres font fortement penser à Evil Dead par exemple), sans oublier le burlesque du temps du muet, ses gags visuels et ses coups de pied au cul qui imprègnent eux-aussi certains passages.
Série à succès outre-manche, Gogs n’est pas franchement un film familial, contrairement aux Wallace et Gromit qui peuvent se voir à tout âge. Sans comporter de scènes vraiment choquantes ou “pouvant heurter la sensibilité du jeune public”, comme on dit, il faut bien admettre que la cible visée est plutôt adulte ou adolescente, adepte d’un humour débridé parfois teinté d’absurde mais surtout lourdingue et irrévérencieux.
A déguster par épisodes plutôt que d’un coup, mais toujours avec le sourire en coin.