CinémaHorreur

La Femme reptile – John Gilling

femmereptile

The Reptile. 1966

Origine : Royaume-Uni 
Genre : Horreur 
Réalisation : John Gilling 
Avec : Ray Barrett, Noel Willman, Jennifer Daniel, Michael Ripper…

Un petit village des Cornouailles est en proie à la terreur depuis que plusieurs citoyens furent frappés de la “mort noire”, cette malédiction faisant agoniser les gens bien portants à grand renfort de peau noircie et de bave aux lèvres. Frère d’une des victimes, Harry Spalding (Ray Barrett) hérite d’un petit cottage au milieu de la lande, où il emménage aussitôt en compagnie de sa femme Valerie (Jennifer Daniel). Les Spalding sont très mal reçus par les habitants, qui les évitent eux et leurs questions sur la mort de leur parent. Seules deux personnes acceptent leur compagnie : l’aubergiste Tom Bailey (Michael Ripper) et le fou du village. Ce dernier viendra bientôt agoniser à la maison Spalding, victime lui aussi de la mort noire. Ce pourrait-il que cette étrange affliction soit liée au peu avenant Dr. Franklin (Noel Willman), anthropologue vivant en reclus avec sa fille et avec un mystérieux domestique indien ?

Tout célèbre soit-elle, toute importante qu’elle fut, la Hammer n’en était pas moins une compagnie indépendante qui à ce titre utilisait les mêmes méthodes économiques que ses confrères américains de la AIP. La Femme reptile n’a sûrement pas été le film le plus ambitieux qu’ait sorti le studio de James Carreras et Anthony Hinds, et fut tourné consécutivement à L’Invasion des morts-vivants. Même réalisateur (John Gilling), équipe technique en grande partie inchangée, quelques seconds couteaux en commun (Michael Rippert, Jacqueline Pearce), et même lieu de tournage, à savoir les studios Bray et le manoir adjacent de Oakley Court, là où bien d’autres films Hammer furent tournés (mais aussi quelques autres, puisque le manoir du Frank-N-Furter du Rocky Horror Picture Show n’est autre que Oakley Court). Bien que les personnages du Dr. Franklin et de son domestique s’y seraient fort bien prêtés, point de Christopher Lee et de Peter Cushing à l’horizon. Juste un modeste film, tourné rapidement par un collaborateur régulier de la Hammer avec des techniciens chevronnés. Les similitudes avec L’Invasion des morts-vivants ne s’arrêtent pas là, puisque là où celui-ci s’essayait aux zombies (qui n’avaient encore pas eu droit aux faveurs de George Romero), La Femme reptile tente aussi de renouveler le stock de créatures malignes en inventant cette fois purement et simplement une femme reptile pas piquée des hannetons, dont la remarquable allure (révélée en fin de film) fut conçue par Roy Ashton à base de véritable peau de reptile.

Si les morts-vivants sont originaires des Caraïbes et du vaudou, la femme reptile nous vient quand à elle d’Orient et de sectes maléfiques. Restait à créer le mode d’action de la bête, ce qui ne pose pas grand problème : une morsure au cou façon vampire et le tour est joué (dès l’introduction, encore que la créature elle-même reste dans l’ombre). Restait aussi à lui trouver un “background”. Mais cela, John Gilling et le scénariste Anthony Hinds (voilà un patron qui n’a pas peur d’aller au charbon) se gardent bien d’en faire trop tôt référence, préférant miser sur le côté mystérieux, davantage à même de créer l’épouvante. D’où les divers événement singuliers auxquels sont confrontés les Spalding et leur ami Bailey : mort de Peter le fou, musique orientale se faisant entendre dans toute la lande, attitude menaçante du Dr. Franklin envers sa fille brimée… Tout cela cache un terrible secret, que le spectateur parvient cela dit aisément à deviner. Regrettable, mais pas dramatique : Gilling n’est pas un tâcheron (on ne dira jamais assez à quel point son Impasse aux violences est superbe), et il ne se laisse jamais aller à expédier son sujet : le style Hammer, avec ces esthétiques superbes (la lande automnale, le petit village en pierre, les maisons modestes mais accueillantes), avec ce sérieux papal, n’est jamais pris en défaut et rapproche même La Femme reptile du Chien des Baskerville version Terence Fisher. Les acteurs aussi demeurent impliqués et ne trahissent jamais les émotions de leurs personnages. Il en résulte une certaine naïveté consciencieuse, très attachante, prouvant que les qualités de la Hammer ne se limitent pas aux films avec Peter Cushing et Christopher Lee.

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