CinémaDrame

Le Dernier testament – Lynne Littman

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Testament. 1983

Origine : Etats-Unis
Genre : Péril atomique
Réalisé par Lynne Littman
Avec : Jane Alexander, William Devane, Rossie Harris, Roxana Zal, Lukas Haas.

Dans la petite ville de Hamlin, la vie s’écoule paisiblement pour la famille Wetherly et les autres habitants. Cette sérénité disparaît après l’explosion d’une bombe atomique non loin de là. Isolés, les habitants doivent s’organiser et maintenir un semblant de calme malgré les craintes des retombées radioactives. A mesure que les jours passent, les décès s’enchaînent et certains décident de quitter la ville pour tenter leur chance ailleurs. Toujours dans l’espoir d’un retour de son mari, lequel se trouvait à San Francisco pour son travail au moment de l’explosion, Carol Wetherly maintient coûte que coûte l’unité familiale.

L’onde de choc des bombes atomiques ne s’est pas limitée aux seules Hiroshima et Nagasaki. Elle s’est propagée durant toute la seconde moitié du 20e siècle à la faveur de la Guerre Froide, laquelle laissait planer la menace d’un possible basculement dans un conflit nucléaire d’envergure, cette Troisième Guerre Mondiale tant redoutée. Le cinéma s’en est bien sûr fait l’écho, poussant toujours plus loin le curseur en dépeignant des mondes post-apocalyptiques où l’humanité sombre plus avant dans la barbarie (New York ne répond plus, Mad Max 2, Les Nouveaux barbares). Réalisatrice venue du documentaire, Lynne Littman prend le parfait contre-pied de cette tendance avec Le Dernier testament, film qui se consacre aux civils, victimes impuissantes de la folie de leurs dirigeants.
Le choix d’une petite bourgade comme lieu de l’action en dit long sur les intentions de la réalisatrice ainsi que sur la modestie du projet. Le film se veut anti spectaculaire au possible et se détache de toute imagerie militaire. Après l’explosion de la bombe atomique, dont on ne connaîtra jamais la nature exacte (Déclaration de guerre de l’URSS ? Accident malheureux?), il n’y aura nulle mise en quarantaine des populations touchées ni aucun déploiement des forces armées. A aucun moment Lynne Littman ne nous donnera une vision globale de l’événement, nous laissant dans le même flou que les habitants de Hamlin, et plus particulièrement de la famille Wetherly. Cette dernière demeure le principal référent du spectateur, essentiellement à travers la figure héroïque de la mère. Se dessine en creux le portrait d’une mère courage, laquelle n’a pas eu besoin de ce drame pour en acquérir les attributs. C’est qu’on est un brin vieux jeu chez les Wetherly. Alors que le père s’emploie métaphoriquement à faire de son fils un homme à la faveur de balades à vélos matinales, la mère affronte vaillamment les caprices de ses enfants tout en assurant l’intendance de la demeure familiale. Dans l’absolu, l’explosion atomique ne change guère son quotidien. Vaille que vaille, elle s’échine à maintenir la cohésion de la cellule familiale dans un environnement en plein délitement. En dépit des vivres qui viennent à se raréfier et des morts qui s’accumulent, Carol Wetherly tente de faire bonne figure, de rester hermétique au chaos et de continuer à transmettre tout son amour à ses enfants voire à ceux des autres puisque les événements l’amèneront à en accueillir deux de plus. En somme, elle continue de faire ce qu’elle a toujours fait avec une abnégation qui force le respect. Dans ce contexte, la figure paternelle ne vaut que par l’espoir que son retour induirait. L’espoir d’une situation qui irait en s’améliorant, que les pires heures seraient enfin derrière eux. Or de l’espoir, le film n’en distille aucun.
Le Dernier testament baigne dans un climat morbide de plus en plus pesant à mesure que le récit avance. Imperceptiblement, les retombées radioactives font leur office, inoculant la mort à une population abandonnée et sans défense. Lynne Littman filme ces conséquences très froidement, évitant tout effet larmoyant, même lorsqu’une mère se retrouve à enterrer son enfant. Cependant, ce regard distancié se heurte à une certaine édulcoration des événements. Outre les retombées radioactives, une grosse chape de fatalisme semble être tombée sur les habitants de Hamlin. Le chaos ne prend jamais possession de la ville, chacun demeurant d’une urbanité à toute épreuve. Par souci d’exhaustivité, la réalisatrice montre bien quelques légers remous. Là, une voix qui s’élève – timidement – contre les décisions de la municipalité lors d’une assemblée ; ici, une femme qui proteste – mollement – contre Carol, coupable à ses yeux de passer devant les gens pour rejoindre son fils aîné lors d’une distribution de denrées ; ou encore ce camarade de classe de Brad, surpris en train de chaparder des vivres. C’est peu, d’autant que cela se retrouve noyé sous la respectabilité à toute épreuve de Carol et de son fils aîné, toujours prêts à faire le bien, quand bien même tout part à vau-l’eau. En outre, pour louable que soit la noirceur et le ton désespéré affichés, le manque de nuance devient contre-productif. Une fois qu’on a compris les partis-pris de la réalisatrice, le film se révèle sans surprise. Le récit s’enfonce alors doucement mais sûrement dans la monotonie, n’échappant pas à quelques facilités de caractère, notamment tout ce qui a trait à la trajectoire de Brad, dont le cheminement l’amène à occuper peu à peu la place du père. Sans non plus céder au happy end, la conclusion ajoute de la dignité à la figure déjà bien angélique de Carol.

Dans un genre qui cède de plus en plus au bruit et à la fureur, Le Dernier testament apporte un contre-point louable – et féminisé –  même s’il s’embourbe dans sa vision unidimensionnelle de l’événement. A défaut d’être passionnant, le film demeure intéressant par sa volonté de ne pas pointer du doigt un coupable tout désigné. D’où qu’elle provienne, la menace atomique demeure une abomination qu’aucun peuple n’aimerait se voir infliger. A noter que parmi les habitants de Hamlin, on croise les débutants Rebecca de Mornay et Kevin Costner en jeunes parents dévastés, ainsi que Lukas Haas, pas encore sous la protection d’Harrison Ford (Witness).

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