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Piège de cristal – John McTiernan

piegedecristal Die Hard. 1988

Origine : États-Unis
Genre : Action
Réalisation : John McTiernan
Avec : Bruce Willis, Alan Rickman, Reginald Veljohnson, Bonnie Bedelia…

John McClane se rend à Los Angeles où il doit passer le réveillon de Noël au Nakatomi Plaza, un immeuble d’affaires. Ce n’est pas par gaieté de cœur que le flic new yorkais se rend là-bas, mais tout simplement parce qu’il s’agit de la dernière chance pour réparer les pots cassés avec sa femme Holly (Bonnie Bedelia), qui pour sa carrière a préféré partir sur la côte ouest, emmenant les enfants et laissant un mari trop attaché à lutter contre la délinquance new yorkaise. McClane ne faisant pas dans la dentelle, y compris pour l’explication qui s’annonce, ce réveillon promet d’être animé. Il le sera d’une toute autre manière : le Nakatomi Plaza va être investi par des pseudo-terroristes qui vont boucler toutes les issues et prendre les convives en otage, le temps de percer les multiples sécurités des coffres forts. A charge pour McClane, à l’écart au moment de l’arrivée de Hans Gruber (Alan Rickman) et de sa bande, de gérer la situation au mieux, guère aidé par les contacts extérieurs malgré le soutien réconfortant d’un seul et simple flic, Powell (Reginald Veljohnson).

Les films d’action des années 80 ont aujourd’hui une bien piètre réputation. C’était l’époque des Rambo et des acteurs monolithiques à gros bras (Stallone et Schwarzenegger en tête) qui déjouaient avec fracas les plans grossiers des vilains communistes / terroristes / trafiquants. Die Hard ne partait pas pour être autre chose, puisque le film fut initialement envisagé comme un Commando 2. Une œuvre peu ambitieuse, voire le recyclage éhonté d’un livre signé Roderick Thorp paru en 1979 et déjà écrit pour être la séquelle d’un livre de Thorp adapté au cinéma en 1968. Schwarzenegger devait bien entendu en être, mais son refus, suivi de celui de nombreux autres acteurs, contribua à lui amener un nouveau rival dans la catégorie musculeuse en la personne de Bruce Willis, tout frais sorti de deux Blake Edwards (Boire et déboires et Meurtre à Hollywood). Ce n’est pourtant pas la présence de Bruce Willis en lui-même qui fit de Die Hard autre chose qu’un énième film d’action passe-partout, mais celle de John McTiernan à la réalisation. Les gros bras, McTiernan n’a rien contre, mais ne s’en contente pas. Déjà dans Predator, il dépassait ce simple cadre du héros intouchable en mettant Schwarzenegger à la merci du prédateur ultime, utilisant cette opposition pas banale pour mieux ravaler son acteur au rang de bête sauvage, assumant ainsi l’animalité instinctive d’un genre de héros finalement très peu humain (c’est en voulant jouer sur un registre humain en même temps que sur la force qu’un personnage comme Rambo a fini par devenir une véritable parodie de lui-même). Dans Die Hard, McTiernan a recours au même genre de personnage invincible. Le but du film n’est certainement pas le suspense, et encore moins la vraisemblance des diverses prouesses accomplies par John McClane. Son originalité tient à toute l’adversité à laquelle McTiernan le confronte, et qui aurait pu contribuer à démythifier cette figure de flic plein de muscles.

Déjà, l’intrigue héritée du livre de Thorp, auquel McTiernan est paraît-il assez fidèle, place McClane dans un milieu feutré, un immeuble de standing (qui est en fait le siège de la Fox et dont certains étages étaient encore en travaux) loin des champs de bataille habituels. Magnifiquement utilisé, ce cadre place l’action à la verticale et utilise les cages d’ascenseur, les conduits d’aération, les fenêtres et autres escaliers pour transformer McClane en un grain de sable dans le rouage bien huilé de l’organisation de Gruber. Il y a contraste entre la froide précision calculée de Gruber et la besogne laborieuse de McClane, qui, tapi dans des endroits peu commodes, se manifeste avec une ironie fort prononcée, entraînant au passage quelques bons mots dont ce genre de héros est friand (le fameux “Yippie-Kay-yee, pauvre con“). Et pourtant, si ce décor constitue un grand avantage pour McClane, il exige malgré tout énormément d’efforts. Bruce Willis s’impose par un jeu finalement plus axé sur la résistance physique que sur la force brute, et les nombreux obstacles en travers de son chemin de croix sont là pour éprouver un héros qui se doit de payer de sa personne pour mériter ce titre. Il s’agit de crapahuter un peu partout, de monter ou descendre une cage d’ascenseur, de se jeter derrière tout un tas d’accessoires pour éviter des balles, de faire de la haute voltige pour ne pas se ramasser 30 étages plus bas, et même de marcher pieds nus sur des débris de verre, puisque McClane, écoutant le conseil de son voisin dans l’avion, avait retiré ses chaussures pour se relaxer -“faisait le point avec ses orteils”- au moment où Gruber est venu perturber le réveillon. Non content de lui envoyer tout cela, McTiernan lui oppose aussi les agissements de la police à l’extérieur de l’immeuble, dont les décisions inconsidérées (entrer en force, par exemple) contribuent grandement à rendre encore plus périlleuse la tâche du poissard flic new-yorkais. John McClane appartient certes à la catégorie des héros intouchables, il est de plus iconisé par sa musculature mise en avant (le marcel en lambeaux, désormais indissociable du personnage) mais il en paye le prix. Il n’en sort que plus grandi, et avec la conception originale et la réalisation aux petits oignons de McTiernan, ses aventures sont bien plus palpitantes que la moyenne.

Si le film se contentait d’en rester là, ce serait parfait. Hélas, McTiernan tombe dans le piège de la démagogie. Il avait pourtant essayé de l’éviter en faisant passer Gruber et sa bande pour de simples voleurs, là où le roman de Thorp en faisait des terroristes politiques. L’intention du réalisateur était d’éviter les critiques qui tombèrent sur des films comme les deux derniers Rambo, qui il est vrai étaient aussi ineptes politiquement que cinématographiquement. Il n’y a donc rien à redire sur Gruber et ses hommes, des européens, surtout allemands, qui dissimulent leurs véritables intentions en se faisant passer pour ce qu’ils ne sont pas, c’est à dire des terroristes luttant soi-disant contre l’impérialisme yankee. McTiernan déplace en fait la démagogie en s’en prenant aux autorités policières, que ce soit l’un des chef de la police de Los Angeles ou le FBI. Ils ne se contentent pas de prendre de mauvaises décisions et de provoquer de nouvelles difficultés pour McClane : ce sont de véritables personnages, sur lesquels McTiernan force le trait de l’antipathie. Incompétent en plus d’être flagorneur face aux fédéraux et dictatorial sur ses subalternes, le sous-chef de la police régulière est remis régulièrement à sa place par McClane et par les évènements. Guère plus habiles, les fédéraux sont pour leur part des personnages prétentieux jusqu’au grotesque, prêts à sacrifier bon nombre d’otages dans un grand élan de nostalgie de la guerre du Vietnam. De beaux salauds que ces policiers. Rayon salopards, on peut également ajouter le reporter prêt à tout pour un scoop, y compris à mettre en péril la situation de la famille McClane qu’il prétend honorer (c’est lui qui révèle à Gruber que la femme de McClane est une des otages), ainsi que l’un des otages, yuppie particulièrement arrogant qui prétend négocier avec Gruber comme il le fait sur les marchés. Tous ces pourris font sortir Die Hard de la démagogie classique des années 80, celle du patriotisme écervelé, mais le font s’approcher d’une démagogie plus typée années 70, celle du far west, de la glorification de l’individu et de la remise en cause des autorités façon Un justicier dans la ville. Esseulé dans son immeuble, McClane est bien un cowboy dont l’action est entravée par la bureaucratie et la corruption morale. Il n’a pour tout soutien extérieur qu’un simple flic, lui aussi méprisé par les chefs (bien que ses raisonnements soient infaillibles), et qui tout comme McClane parviendra à prendre sa revanche pour faire triompher le bon sens du pékin de base, légitimement indiscipliné car détenteur de la vérité absolue. McTiernan flatte non pas l’auto-justice mais l’individualisme de base d’une façon aussi simpliste que John Rambo fait triompher les valeurs américaines. Serait-on en France que l’on taxerait ce raisonnement de poujadiste, mais puisque l’on est aux Etats-Unis, on se contentera de le qualifier de démagogique, faute de mieux. C’est en s’attardant autant sur de telles élucubrations primaires que McTiernan empêche son film d’être considéré comme le summum du cinéma d’action des années 80. Pour autant, Piège de cristal est un film important qui contribua à faire enfin sortir ce cinéma de l’ornière où il était enfoncé. Certains acteurs comme Sylvester Stallone ou Chuck Norris ont eu bien du mal à s’en remettre… quand ils s’en sont remis.

5 réflexions sur “Piège de cristal – John McTiernan

  • sam gray

    J’ai jamais pu voir le film en entier tant le personnage de Mclane m’apparaissait antipathique, et je suis content qu’une critique ne soit pas extasié, devant ce film qui est pour moi suréstimé

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  • Au moins, ne pas aimer ce premier volet t’a certainement épargné la ressortie du formol de McClane durant les années 2000, laquelle a réellement rendu le personnage antipathique.

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  • Si le personnage de John Mclane avait un passé dans les forces spéciales ou avait fait la guerre du Vietnam dans une section spéciale, j’aurais pu accepter qu’il arrive à bout de mercenaires entrainés. Mais le coup du flic au mauvais moment et au mauvais endroit, ça justifie pas qu’il ne se fasse pas tuer par un des méchants.

    Rambo avait un entrainement de soldat spécialisé dans l’infiltration. C’était un soldat aguerri et expérimenté, normal qu’il arrive à bout d’une faction de soldats, pareil pour Dutch dans Predator et accessoirement Braddock dans Portés disparus.

    Ce qui fait que cela m’a donné plus de sympathie pour les méchants dont je souhaite que le plan réussisse, plutôt que voir ce Mclane les vaincre et faire échouer leur plan.

    Le fait de le montrer comme quelqu’un de vulnérable soit en tombant dans un conduit de ventilation ou de se blesser en courant sur des morceaux de verre ne change rien à ce que je pense de Mclane, qui a toujours le bon mot pour se foutre de la gueule des méchants et aussi de l’inspecteur de police, ce qui le rend encore plus détestable pour moi.

    Autre raison pour lequel je ne l’apprécie pas c’est que pour un simple flic, il n’a aucun remord pour tuer ou abattre ses ennemis, et surtout le voir dans Die Hard 3

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  • Ta détestation du personnage t’aveugle quelque peu. S’il fallait absolument que tous les héros aient un passé de bidasse, on s’ennuierait ferme. Ici, Mclane joue à la fois sur l’effet de surprise et le côté trop sûr d’eux des méchants. Il ne fonce pas bêtement dans le tas et prend le temps de réfléchir à son mode d’action. Nous ne sommes pas dans un récit réaliste. Le personnage n’a pas vocation à lire les droits de chacun des terroristes. C’est un héros d’action au caractère affirmé, une sorte de tête de lard mû par la volonté de sauver son épouse. Il est le grain de sable qui enraye la belle mécanique de Hans Gruber et sa clique.

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  • Peut etre qu’il y a une certaine detestation de ma part, mais c’est comme tu dis une tete de lard qui me revient pas, à la limite aussi psychopathe que les méchants qu’il bute. Après c’est mon avis, et il n’est pas du tout majoritaire, je crois qu’il est même pas minoritaire, mais je suis comme ca. J’adore Chuck Norris qui fait ressortir tout sa virilité dans son visage implacide mais déterminé et je m’attache à ce personnage en butte aux sadisme des viets congs, qui refuse de s’agenouiller devant l’ennemi, et qui n’hésite pas à le défier dès que l’occasion se présente.

    A l’opposé, on a John McLane qui va voir sa femme à Noel et se retrouve dans une prise d’otage, oui il devra, faire preuve inventivité pour tuer les méchants, sauf que son coté gouailleur, et grande gueule me le rend peu sympathique et son coté humain par sa fragilité me laisse de marbre.

    Je préfère les héros taciturnes, à l’exception de Jean Claude Van Damne qui a l’air de vraiment s’investir dans ses rôles.

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