CinémaHorreur

Le Club des monstres – Roy Ward Baker

 

clubdesmonstres

The Monster Club. 1980

Origine : Royaume-Uni
Genre : Fantastique
Réalisation : Roy Ward Baker
Avec : Vincent Price, John Carradine, Donald Pleasence, Britt Ekland…

Produit par l’Amicus, la compagnie anglaise rivale de la Hammer tout au long des 60’s et des 70’s, Le Club des Monstres se permet un casting 3 étoiles composé de vieilles gloires du cinéma d’horreur, avec bien entendu en tête d’affiche l’immense Vincent Price, complété par des gens aussi glorieux que Donald Pleasence, John Carradine, Britt Ekland, Patrick McGee…Il s’agit d’un film composé de trois sketchs introduits, reliés entre eux et conclus par un fil rouge, à savoir Vincent Price, un vampire, qui fait visiter le fameux club des monstres (un bar, quoi) à sa victime d’un soir, un célèbre écrivain donnant dans l’horreur interprété par John Carradine. En lui parlant de la vie des monstres, le personnage de Price est amené à lui raconter trois histoires sur trois genres de monstres différents. Entre chaque histoire, un peu de généalogie monstrueuse, et systématiquement, une chansonnette. Malheureusement, malgré la prestation des deux acteurs, force est d’admettre que ce sont ces interludes qui constituent le gros point faible du film. En effet, le but de départ est clairement de reconstituer l’atmosphère bien particulière des films fantastiques britanniques des 60s. Or, à part l’introduction avec l’agression de Carradine dans la rue, les scènes hors des trois sketchs sont saccagées par de faux-monstres costumés très très kitsch, dont le ridicule est encore renforcé par le fait qu’ils se trémoussent au rythme des mauvaises chansons punks jouées par des rockers ridicules, filmés comme dans un très mauvais clip (zoom et dézoom à répétition). On retiendra quand même les conversations Price-Carradine, ainsi que le numéro de strip-tease intégral, tout en suggestion. Mais n’empêche que pour recréer l’ambiance traditionnelle du ciné fantastique anglais, c’est raté. On pourra toujours avancer que le but était d’ancrer le film dans son époque, ce que j’en dis, moi, c’est que dans ce cas-là Baker aurait pu faire ça plus discrètement, plutôt que de nous sortir tout l’attirail punk en vogue en 1980.
Enfin de toute façon, le principal reste les trois sketchs. Irréprochables.

Le premier nous parle d’un antiquaire, forcé de rester chez lui. C’est un Shadmock (une race de monstre au sifflement capable de faire pourrir ceux qui l’entendent). Et il est seul, et il en a marre. Il embauche donc une femme, a la base pour l’aider à faire l’inventaire de ses biens, mais en réalité pour ne plus être seul… Celle-ci va se servir de l’affection que lui porte le Shadmock pour tenter de lui extorquer des biens…
Ce sketch se déroule quasi-intégralement dans le château du personnage du monstre. Un château très anglais, loin des bâtisses gothiques en ruines avec toiles d’araignées à tous les coins de pièce. Un château très sombre, mais aussi très luxueux. Témoin d’une aristocratie décadente dont fait partie le Shadmock. L’intrigue également met l’accent sur le fait que le véritable monstre n’est pas celui que l’on croit, mais bien l’humaine qui exploite ce pauvre monstre déjà victime de sa malédiction… Un sketch bien à tous les niveaux, même si un peu simpliste. On y retrouve en tout cas un esprit classique hérité du cinéma horrifique des années 60. Impossible de dire que ce segment fut réalisé en 1980…

Le second nous parle tout simplement de la vie d’une famille dont le père est un vampire, traqué par une agence de chasseurs de vampires menés par des hommes en noirs dont le chef est Donald Pleasance (autre chose que les chasseuses de vampires blondes karatekates, alliées à des jeunes aux problèmes existentiels comme l’amour, la drogue, le lycée…). Il s’agit peut-être du segment le plus faible, sans pour autant etre honteux. L’histoire est vue à travers les yeux du gamin, qui ne sait pas exactement ce qu’est son père, mais qui va le découvrir. Encore une fois ce sont les humains qui apparaissent comme les plus stupides… L’humour qui domine ce sketch, un humour bien vu, mais qui ne cache pas une naïveté assez gratuite, avec happy-end familial. L’ambiance est moins travaillée que celle du sketch précédent, mais reste vraiment bonne, notamment lors des scènes d’intérieur, la maison n’étant rien d’autre qu’un petit chateau semblable à celui du premier sketch.

Enfin le troisième sketch nous présente un réalisateur partit seul en repérage sur le lieu de tournage de son film. En s’y rendant, il va traverser une mystérieuse brume qui va le conduire dans un village style XIXème siècle, peuplé par des habitants qui ne sont en fait rien d’autres que des goules assoiffées de sang. Sauf une fille, une bâtarde, croisement entre une goule et un humain. Probablement le meilleur segment des trois. Un brouillard nous renvoyant tout droit aux films Hammer, des villageois dégénérés qui évoquent un peu du Lovecraft, et un village au milieu de nul part, qui pourrait aussi bien sortir de La Quatrième Dimension. La fin réserve un sort particulier au héros, avec un humour très british, et très macabre.

C’est d’ailleurs ce qui ressort de tout le métrage : l’humour macabre, celui auquel Vincent Price est habitué. Bref un humour très british, très classique, qui relie aussi le film aux films des deux décennies précédent les 80s. Et il n’y a pas que ça : la structure du film a sketchs est elle même héritée d’une tradition d’époque, puisque ce genre connut son plein essor du temps béni de la Hammer, de Corman, de Bava etc etc… Bref un film en tout point rétro, rendant un large hommage aux monstres d’antan, au cinéma traditionnel, devenu source de nostalgie suite à l’évolution du genre via des œuvres plus modernes comme L’Exorciste, Massacre à la Tronçonneuse ou Zombie. A ce titre, les noms figurant au casting ne sont pas juste des éléments gratuits : ils contribuent à l’objectif que vise Roy Ward Baker (lui-même un ancien réalisateur attitré de la Hammer) et ses producteurs de chez Amicus (compagnie old school également). Tout juste regrettera-t-on les interludes musicaux avec des chansons moches mais qui ont le mérite d’affirmer que Baker a pleinement conscience de l’évolution du cinéma horrifique (le côté kitsch de ces chansons étant même peut-être une petite pointe d’ironie envers cette nouvelle génération).

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