CinémaHorreur

Cauchemar – Tjut Djalil

cauchemar

Ranjang Setan. 1986

Origine : Indonésie 
Genre : Horreur 
Réalisation : Tjut Djalil 
Avec : Chintami Atamanegara, Richie Ricardo, Linda Lolita Husein, Gusti Randa…

Des adolescents sont victimes de vilains cauchemars dans lequel un homme défiguré les persécute à l’aide de sa main prolongée de lames acérées. Après le trépas d’une fille sous les lames du monstre, la panique va gagner les survivants.

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Ne vous fiez pas aux quelques sources internet qui affirment que ce film indonésien signé d’un des plus grands artisans du bis local, Tjut Djalil, date de 1983 et serait donc antérieur aux Griffes de la Nuit de Wes Craven, faisant passer ce dernier pour un honteux plagiaire ne faisant que s’approprier les créations de cinéastes étrangers inconnus pour se forger une gloire fantoche. Non, Cauchemar est bel et bien postérieur aux Griffes de la Nuit et daterait selon des sources plus crédibles de 1986, voire de 1988. La VHS française elle-même ne saurait apporter plus de précisions, puisqu’on ne peut pas se fier à une version commençant par étaler deux fautes d’orthographe énormes, une anglophone dans le contexte sous-titrant le pré-générique (“Desember”) et une autre, francophone, dans le titre même du film (“Cauchemard” nous dit ainsi le générique !). Et puis que dire de cet ignoble pan-and-scan, qui semble bouffer la moitié du format d’origine et qui rogne furieusement sur certains moments clefs. Non, décidément, cette VHS typiquement bis vaut essentiellement pour sa superbe affiche de Melki, justifiant à elle seule l’existence du film dans nos contrées tout en entrant dans la même logique que lui : la repompe. Mais, las ! La repompe filmique de Tjut Djalil sera bien moins belle que la repompe dessinée de Melki. Là où le second mèle habillement Freddy et l’une des scènes de Vendredi 13 chapitre 7, le réalisateur se contente lui, pendant la majeure partie de son film, de repiquer des pans entiers des Griffes de la Nuit. Plus qu’une repompe, plus qu’un remake, Cauchemar est un copié/collé du film de Wes Craven ! La quasi intégralité des scènes d’action des Griffes de la Nuit sont reprises à l’identique, quoique l’ordre chronologique de la narration diffère. On retrouve ainsi la fille aspirée dans son bain, le meurtre au lit de Tina (appelée Nina dans le film de Djalil, du moins en VF !) avec la course-poursuite qui le précède, le Freddy local qui s’élève sous les draps, le même qui se coupe les doigts pour impressionner ses futures victimes, les marches gluantes, le tueur qui amène l’héroïne assister au meurtre d’un de ses copains… Même des scènes a priori plutôt anodines des Griffes de la Nuit sont reprises, telle que l’arrestation du meurtrier supposé de Nina (l’équivalent de Rod dans le film de Wes Craven). Les parents de l’héroïne eux-mêmes sont repris du couple Ronee Blakeley / John Saxon : des parents séparés, elle qui se met à boire et lui qui professionnellement parlant est impliqué dans l’histoire (mais c’est un avocat et non un policier). Les mouvements de caméra sont exactement les mêmes d’un film à l’autre et les dialogues sont tout à fait identiques ! Un peu plus et Cauchemar virait au gigantesque stock-shot. Bien entendu, Djalil bénéficia certainement d’un budget encore moindre que celui, déjà réduit, de Wes Craven, et les effets spéciaux en pâtirent énormément. Le faciès de l’avatar de Freddy Krueger se distingue ainsi par son côté papier-mâché, le meurtre de Nina se fait moins spectaculaire (surtout avec les cables apparents), les effusions de sang ne sont pas aussi nombreuses… Le monstre, en plus exagérément mal interprété (il faut le voir courir au ralenti pour rattraper une victime qui cours encore moins vite que lui !) en perd tout son charisme.
Dans son entreprise de repompe, Djalil fait pourtant des concessions, laissant de côté toute la partie “mythologique” de Freddy ou réaménageant quelques détails, certainement pour se réserver un tournage plus confortable. Mais en faisant cela, non seulement il ne retient strictement rien de Freddy si ce n’est l’aspect graphique (à la trappe la confusion rêve /réalité !), mais il tombe en plus dans de flagrantes incohérences scénaristiques et dans d’atroces approximations techniques (et le pan and scan n’arrange rien) qui font du film un bordel monstre. Pour preuve, la bifurcation aux-deux tiers de métrage orientant l’ensemble dans la direction du Poltergeist de Tobe Hooper, mâtiné d’un soupçon d’Amityville. Comme le laissait suggérer la séquence pré-générique, la présence du monstre n’est ainsi dû qu’à un meurtre perpétré dans la bâtisse. C’est ainsi que les exorcistes vont investir la maison, et vas-y que j’entre dans un monde parallèle, et vas-y que je me demande si la maison n’aurait pas été construite sur un cimetière, et vas-y que le promoteur immobilier est un pourri… Il n’y aura dès lors plus grand chose des Griffes de la Nuit (dont la quasi intégralité a déjà à ce stade été pillée), mais il y aura en revanche de l’horreur grand guignolesque, avec des squelettes sortant d’on ne sait où si ce n’est d’un labo de science, avec des éclairages clignotant interdits aux épileptiques, avec des meurtres pour le moins confus…
Et au milieu de tout cela subsistent deux choses qui sont propres au film. Toutes deux en rajoutent dans le surréalisme ambiant. La première est la présence d’un mélodrame incroyable entre les parents de l’héroïne, leurs problèmes conjugaux et extraconjugaux, qui viennent parfois rompre totalement l’ambiance horrifique du film par des dialogues très “Feux de l’Amour“. Et la seconde est la présence d’un jardinier attardé aux longues dents pourries qui drague la bonne, grosse dondon qui ne s’en laisse pas compter. Ce duo apportera l’indispensable touche comique, parfois greffée avec fort peu d’à-propos à des scènes on ne peut plus sérieuses (ainsi, lors de la découverte du meurtre de Nina / Tina, tout le monde essaie de défoncer une porte qui n’est même pas fermée à clef… ou comment saborder tout effet de trouille !).
Cauchemar est décidément un film stupéfiant…

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