CinémaHorreur

La Mouche 2 – Chris Walas

The Fly II. 1989.

Origine : États-Unis
Genre : Mouche tsé-tsé
Réalisation : Chris Walas
Avec : Eric Stoltz, Daphne Zuniga, Lee Richardson, Ann Mary Lee, John Getz, Garry Chalk.

Alors qu’il fête son cinquième anniversaire, Martin (Eric Stoltz) en paraît la vingtaine. Fils de Seth Brundle et Veronica Quaife, il a connu une croissance rapide, assortie de capacités intellectuelles extraordinaires. Durant ces 5 années, il a vécu tel un rat de laboratoire dans le confinement d’une cellule, subissant toute une batterie de tests. Estimant qu’il est arrivé à maturité, Anton Bartok (Lee Richardson), son « père adoptif », lui propose de travailler pour lui en reprenant les travaux de Seth Brundle afin de perfectionner le fonctionnement des télépodes. D’abord réticent, Martin se prend rapidement au jeu, au risque de connaître de violentes désillusions.

Comptant parmi les meilleurs films de David Cronenberg, La Mouche (1986) n’appelait pas vraiment de suite. Le drame développé par le réalisateur canadien se suffisait largement à lui-même, trouvant sa parfaite conclusion lors d’un final aussi horrible que poignant. Seulement durant ces années 80 qui connaissent une systématisation de la séquelle, il est rare de ne pas voir fleurir le chiffre 2 derrière un titre ayant rencontré le succès. Généralement propice à la reconduction de figures mythiques (Superman, Indiana Jones, Freddy Krueger, Jason Voorhees…), ce procédé peut aussi amener les scénaristes à prendre des chemins de traverse pour imaginer une suite lorsque celle-ci ne coule pas de source. Devant l’impossibilité de faire revenir de manière satisfaisante « Brundle mouche » à la vie, les scénaristes de cette suite ont choisi la continuité, à l’aune de l’une des scènes fortes du film de David Cronenberg : l’accouchement cauchemardesque de Veronica Quaife. Ladite scène, reprise en préambule, se veut assez proche de l’originale, à ceci près que la larve extraite se révèle n’être qu’une gangue visqueuse de laquelle est prisonnier un bébé à l’aspect parfaitement normal. Une issue heureuse dont ne peut même pas se féliciter Veronica, décédant d’une hémorragie au terme d’un accouchement des plus éprouvants. Ce personnage sacrifié n’est que la résultante du refus de Geena Davis de reprendre le rôle, laissant le soin à une doublure de “souffrir” à sa place. Néanmoins, ce prologue n’est pas symptomatique d’une volonté de faire table rase du passé. Au contraire, La Mouche 2 se réfère autant au film de David Cronenberg (archives vidéos de Seth Brundle à l’appui) qu’au Retour de la mouche, suite de La Mouche noire -le film original de 1958- dans laquelle il était déjà question du fils marchant sur les pas de son infortuné géniteur. Une déférence aux anciens qui dresse les limites d’un film qui ne parvient jamais vraiment à se constituer une identité propre.

Fruit de multiples réécritures (pas moins de quatre scénaristes ont mis le nez dans cette histoire dont Mick “Critters 2” Garris et Frank “Les Evadés” Darabont), La Mouche 2 ne peut se départir d’un aspect fourre-tout qui doit autant au passif du réalisateur qu’à une préproduction chaotique. A l’instar de quelques-uns de ses pairs passés à la réalisation (Stan Winston – Le Démon d’Halloween, John Carl Buechler – Troll, Les Frères Chiodo – Killer klowns from outer space), Chris Walas a tendance à mettre l’accent sur les scènes à effets spéciaux, pour un résultat qui n’est ici pas toujours très convaincant. Ainsi, pour un monstre réussi quoique plus proche du lézard mutant que d’un insecte (Martin dans sa phase finale de mutation), on a droit à deux autres plutôt risibles dans leur volonté d’émouvoir alors que leur rendu et la manière dont ils nous sont présentés trahis sent de trop leur nature caoutchouteuse. Par ailleurs, le final, pour spectaculaire qu’il soit, masque mal un flagrant manque d’imagination qui amène le film à reprendre les grandes lignes de la conclusion de son prédécesseur, expurgé de toute sa dimension horrifico-dramatique. De manière générale, Chris Walas ne parvient jamais à s’extirper de l’ombre de son illustre prédécesseur. Et rejouer l’histoire d’amour initiale sur un registre plus juvénile ne plaide pas en sa faveur. L’émotion ne dépasse jamais le stade des intentions, et souffre de personnages trop lisses (le couple Martin-Beth), trop caricaturaux (le chef de la sécurité, les deux scientifiques en charge de Martin) voire carrément inutiles (Stathis Boran en tête). Pour mémoire, Stathis Boran n’est autre que l’ex amant de Veronica qui eut l’insigne honneur d’assister à la douloureuse fin de son idylle, au prix d’une main et d’un tibia rongés par le suc gastrique de « Brundle mouche ». Comme si le bonhomme n’avait pas déjà assez souffert, La Mouche 2 l’invite à assister impuissant à l’accouchement de Veronica avant de l’évincer manu militari avant même que le prologue n’arrive à son terme. Loin d’être indispensable -sa présence équivaut à une simple piqûre de rappel pour ceux qui ont vu le précédent film-, le personnage devient même embarrassant lorsque l’intrigue le convoque à nouveau lors d’une scène à l’inintérêt flagrant, visant à le confronter de manière artificiel à Martin. A force de naviguer à vue, Chris Walas se perd en circonvolutions. Il tente bien d’insuffler une once de profondeur à son récit (réflexion sur le libre-arbitre et sur la nécessité de placer l’humain au-dessus de la technologie) mais n’aboutit qu’à un grand vide. Un grand vide qui emporte tout sur son passage, même le pourtant prometteur Anton Bartok, beau salaud tapi derrière un paternalisme de façade qui perd soudain tout crédit à l’aune de l’énormité de son argumentaire visant à convaincre Martin d’œuvrer à son service.

A défaut d’avoir marqué les esprits des « fantasticophiles », La Mouche 2 demeure une date d’importance pour Chris Walas, qui réalisait là son premier film. Débuter par la suite d’un film prestigieux n’était sans doute pas tache aisée, mais il lui aurait été plus facilement pardonné s’il avait davantage tenté de s’en démarquer et d’apposer sa patte. Par la suite, il n’aura guère l’occasion de persévérer, sa carrière de réalisateur se limitant à ce jour à un épisode de la série Les Contes de la crypte (Jusqu’à ce que la mort…) et au thriller Psychose meurtrière.

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