CinémaHorreur

Killing Bird – Claudio Lattanzi, Joe d’Amato

killingbird

Zombie 5 / Uccelli assassini / Killing Birds. 1987

Origine : Italie 
Genre : Horreur 
Réalisation : Claudio Lattanzi, Joe d’Amato 
Avec : Timothy W. Watts, Robert Vaughn, Lara Wendel, Leslie Cummings…

Commençons par démêler l’embrouillamini que constitue le titre exact de ce film, qu’on trouve parfois sous le nom de Zombie 5. Un titre qui relève purement et simplement de l’exploitation : le premier Zombie est bien entendu celui de George Romero, qu’on trouve parfois sous son titre original de Dawn of the Dead. Sorti à une période dans laquelle le cinéma d’horreur italien connaissait une drastique baisse de qualité (de laquelle il ne s’est jamais remis), l’œuvre de Romero connut le succès que l’on sait, entraînant les producteurs et distributeurs italiens non seulement à produire des films surfant sur les modes américaines (ce qu’ils avaient de toute façon toujours fait, même lorsque la créativité était au rendez-vous), mais également à vendre leurs films comme des séquelles des succès américains. C’est ainsi que L’Enfer des Zombies de Lucio Fulci fut baptisé Zombi 2, qu’un Zombi 3 vit le jour sous la caméra du même Fulci (remplacé en cours de tournage par Claudio Fragasso et par Bruno Mattei), auquel succèda Zombi 4 par Claudio Fragasso. Zombie 5 (qui au contraire des 3 précédents prend donc un “e”) se profile donc en 1987, nonobstant son maigre rapport avec ses prédécesseurs. Les distributeurs vidéo français, ne sachant plus où donner de la tête, lui donnèrent ainsi plusieurs titres, certains gardant celui de Zombie 5. Au moins avons nous évité la voie anglaise, qui, plus scrupuleuse que les italiens, commença la série en sortant L’Enfer des Zombies sous le titre de Zombie Flesh Eaters premier du nom, évitant la parenté avec Romero (dont le film connut aux États-Unis deux séquelles, tout autant officielles l’une que l’autre, mais bon, passons, sinon on a pas fini) et prolongeant donc la série avec un décalage d’un numéro par rapport aux italiens.
Maintenant, Zombie 5 n’est pas que Zombie 5 : c’est aussi Killing Birds en version originale (ou alors Uccelli assassini pour les défenseurs de la langue de Gramsci), et Killing Bird au pays de Maurice Thorez, où l’on trouve aussi tout de même le titre de Killing Birds au pluriel. Certains, dans le doute, optent même pour le titre Zombie 5 : Killing Birds, une dénomination qui à défaut d’avoir un quelconque sens permet de s’y retrouver.
D’autres prirent au contraire le taureau par les cornes et l’envoyèrent voler par delà l’arène en imposant une Attaque des Morts-Vivants sortie de nul part.
Tout ceci est il faut bien l’admettre assez trompeur. Comme d’un fait exprès, la réalisation du film ne fut elle-même pas des plus simples, puisque si le film est officiellement réalisé par Claude Milliken, c’est à dire par Claudio Lattanzi sous pseudonyme, il semblerait que ce bon vieux Joe d’Amato se soit invité à la fête pour épauler le débutant Lattanzi. Les deux remplacèrent en tout cas Michele Soavi, l’ex-assistant de d’Amato, qui aurait fait défaut pour aller tourner… Bloody Bird…avec Claudio Lattanzi comme assistant.

Et le film, dans tout ça ? Et bien il est à l’image du bordel ambiant : il n’a aucun sens. Il démarre ainsi lorsqu’un soldat dont ne nous voyons pas le visage revient chez lui après la guerre du Vietnam (enfin ceci nous sera dit plus tard), et trouve sa femme au lit, en compagnie d’un homme qui n’a rien à faire là. Le soldat devient fou furieux, et égorge les deux. Deux vieux avec un bébé passent par là ? Ils y passent aussi ! Seul le bébé survit. Quand au soldat tueur, il ira se faire crever les yeux par les oiseaux de la volière qui jouxte la maison. Bien des années plus tard, nous suivons un groupe d’étudiants en ornithologie (pourquoi pas, après tout) qui s’en vont avec joie étudier les oiseaux dans un décor forestier. En chemin, ils décident de rendre visite au Docteur Brown (Robert Vaughn), un ornithologue aveugle et solitaire qui leur indiquera un endroit où trouver plein d’oiseaux. Notre groupe de jeune s’y rend, et y trouve une maison abandonée qu’ils investissent aussitôt. Grand mal leur en prend, puisque sitôt la nuit tombée plusieurs morts-vivants leurs tomberont dessus !

Ce scénario justifie à lui seul la pléthore de titres qui l’ont désigné. Le film n’est pas décousu : il est bien cousu, mais n’importe comment. J’entends par là que nous ne nous retrouvons pas à suivre un film tellement mal fignolé qu’il prendrait des allures de film à sketch, mais que nous avons affaire à quelque chose qui dépasse l’imaginable en terme d’incohérence. L’introduction prend ainsi des allures de slasher, avec ces meurtres commis par un personnage dont nous ne voyons que le dos et les bottes. La question que l’on est alors amenés à se poser est : “Mais qui est ce tueur ?” Une question qui suffisait dans les années 70 à produire d’excellents gialli. Mais ici, la réponse est très tôt donnée : c’est l’ornithologue aveugle Fred Brown, que nous retrouvons vingt ans plus tard et dont les exactions passées ne font pas de doute, à moins bien sûr que l’on considère que les aveugles aux yeux mutilés courent les rues au risque de se prendre des lampadaires en pleine poire. Il n’y a donc pas de place au doute, et l’on se demande à quoi pouvait donc bien servir une entame de film aussi mystérieuse. On se demandera aussi ce que viennent faire les oiseaux là-dedans, eux qui ont mutilé Brown après ses meurtres (et après qu’il ait pour une raison inconnue sorti les perroquets de leurs cages) pour ne plus réapparaître que sous forme de stock-shots. Alors lorsque nos étudiants en ornithologie viendront investir la maison, on se prendra à penser qu’ils risquent fort de vivre les mêmes déboires que Tippi Hedren et Rod Taylor dans Les Oiseaux. Et bien non : sortis de nul part si ce n’est d’un brouillard (plutôt d’un fumigène) débarquent des morts vivants aussi moches que peu nombreux (deux-trois spécimens). On se dit alors que ce n’est pas possible, qu’il doit bien y avoir un lien entre un tueur aveugle, des oiseaux et des morts-vivants ? Il y en aura bien un, ou tout du moins une ébauche d’explication ridicule qui sera donnée dans la dernière scène du film.

Tout ceci pourrait laisser à croire qu’au moins, Killing Bird est un film riche en action. Même pas. Car ce qui apparaîtra au final comme la principale trame de l’histoire sera bien l’expédition des étudiants, qui se verra facilement consacrer quarante minutes sans aucune trace d’horreur entre l’introduction et l’arrivée des zombies. Des étudiants lambdas incarnés par des acteurs au talent relatif doublés par des incompétents notoires, qui passent leur temps à tenir des conversations d’un intérêt limité. On ne peut même pas dire qu’ils tombent dans les travers des personnages de slasher habituels : vierges de toute substance, ils ne font pas de blagues, ne fument pas d’herbe prohibées, ne s’adonnent au sexe que très modérément et ne font même pas mine de travailler. Ils sont juste là, dans le film, et passent leur temps à bavarder dans le vide et à se promener dans la maison et alentour. Leurs dialogues reflètent bien leur manque de tonus, puisqu’ils se font remarquer par leur côté descriptif des choses : “C’est une épave“. “Voilà une maison abandonnée“. “Regarde : un générateur“. Même la mort de leurs camarades, après l’arrivée des zombies, ne les sortira pas de leur torpeur : “Oh, bordel“, s’exclamera ainsi un des étudiant après la découverte du corps d’une de ses amies. Mais la palme reviendra à une fille, qui alors que son ami vient de brûler vif sous ses yeux croit bon de nous exprimer son sentiment en ces termes : “Ce pauvre Brian…“.

Et ce n’est pas finit : non seulement ces personnages sont d’une inconsistance rare, mais ils savent en plus tendre la perche pour se faire battre, comme l’imbécile de service retournant dans la maison pour y rechercher son ordinateur Amstrad oublié, ou comme ce pauvre bougre qui arrive à mourir accidentellement, sa chaîne se coinçant dans un rouage en marche provoquant l’étranglement du malheureux.
Avec de tels caramels mous en guise de personnages peuplant une intrigue incompréhensible, il faut bien admettre que l’apathie gagne le spectateur, et ce en dépit des deux morts-vivants, des oiseaux en stock-shot animaliers et de l’ornithologue aveugle (que l’on nous montre parfois dans sa maison, qui est tout seul, et qui attend que ça se termine… comme nous). Même la surprise de voir un zombie être capable de traverser un mur et celle d’en voir un autre arrivant on ne sait comment à monter sur un toit avant de défoncer la toiture ne pourra pas nous émouvoir. Stoïques nous resterons. La BO elle-même suivra le surréalisme ambiant, non seulement par sa laideur, mais aussi à une occasion par son arrêt brutal, le temps pour un personnage de déclamer une phrase insignifiante avant que l’agression musicale ne reprenne de plus belle. L’inconsistance sera telle qu’à un moment donné la musique cessera d’être nulle pour être superbe, comme ça, sans raison, avant de replonger dans l’anonymat…
On ne peut même pas dire que Killing Bird soit marrant : le film de d’Amato et Lattanzi est juste nul. Pas d’autre mot possible.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.