Diamants de sang – Fernando Di Leo
Diamanti sporchi di sangue. 1977Origine : Italie
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Guido et Marco partent commettre un cambriolage pour le compte de leur chef Rizzo. A peine ont-ils commencé à attaquer le coffre-fort que la police arrive. Guido est arrêté et Marco parvient à s’enfuir, quoique blessé. De toute évidence, quelqu’un les a donné. Il y a fort à croire qu’il s’agit de Rizzo lui-même, puisqu’il leur doit de l’argent. Cinq ans plus tard, Guido sort de prison, accueilli par son amie Maria. Aussitôt, ils sont victimes d’une agression. Guido parvient à tuer les deux bandits mais Maria est tuée. Refusant toutes les propositions de paix venant de Rizzo, il est bien décidé à se venger. La situation se complique lorsqu’il est malgré lui entraîné dans les affaires de Rizzo, qui prépare un vol de diamants avec l’entremise de Enzo, le fils de Maria qui n’a jamais été très amical avec son beau-père.
Vague tentative de mêler son Milan Calibre 9 avec les polars noirs qui avaient marqué son début de carrière, Diamants de sang fait parti des dernières œuvres de Fernando Di Leo, l’un des spécialistes les plus hétéroclites du polar italien. Son sujet fait incontestablement écho à celui de Milan Calibre 9 et reprend l’histoire de ce bandit sortant de taule pour mieux replonger malgré lui dans le milieu de la pègre. L’un des titres envisagés fut d’ailleurs “Rome Calibre 9”, peut-être un signe de la volonté du réalisateur de vouloir retravailler sa fameuse trilogie du milieu sous un angle différent… Ou bien volonté des producteurs pour mieux vendre leur film. Quoi qu’il en soit, Diamants de sang peut en outre compter sur Barbara Bouchet, dans un rôle de femme manipulatrice et sexy similaire à celui qu’elle tenait déjà dans Milan Calibre 9. Di Leo reconstitue d’ailleurs l’une de ses scènes les plus marquantes, c’est-à-dire la danse dans une boîte de strip-tease. Une scène emblématique dans le film de 1972, mais qui passe ici presque inaperçue, voire incongrue. Car si le sujet du film est presque le même, le traitement diffère grandement. La dureté doucement sadique est remplacée par l’aspect bien plus sombre et mélancolique du film noir, qui se traduit en premier lieu par Guido, le héros lui-même. Le solide Gastone Moschin est remplacé par le beaucoup plus discret Claudio Cassinelli, qui campe un personnage ambigu. D’un côté son désir de vengeance et de l’autre sa passivité (toutes les situations dans lesquelles il se retrouvent ne sont pas nées de sa propre initiative) aboutissent à faire douter le spectateur. Cassinelli passe le film à afficher une mine renfrognée qui, contrairement à ce que l’on aurait pu supposer, ne s’accompagne pas d’une détermination sans faille. Ou du moins, rien ne laisse le penser. A force de ne pas pouvoir être cerné, Guido finit par devenir un personnage vide de sens. Son stoïcisme n’est pas tellement à mettre sur les épaules d’une interprétation trop monolithique de Cassinelli, mais bien à imputer à Fernandi Di Leo, qui cherche à grossir le trait de l’homme désabusé. Ce choix laisse perplexe, surtout que les personnes rencontrées par Guido ne sont pas de nature à laisser insensible. Il y a ainsi ce flic joué par un Vittorio Caprioli qui se prend pour Georges Marchais, seul élément vraiment comique du film. Il y a aussi Tony, homme de main corrosif de Rizzo évoquant le rôle de Mario Adorf dans Milan Calibre 9 en moins cinglé. Et puis il y a Enzo, le fils de Maria, jeune homme lâche manipulé par la salope incarnée par Barbara Bouchet. Enfin, il y a Rizzo lui-même, leader de la mafia dans une tradition “vito-corleonesque”, gentleman du grand banditisme.
Tous ces personnages composent un milieu finalement assez sous-terrain, loin des envolées violentes de la trilogie du milieu. Seules deux séquences de bagarres aux poings, dont une très minimaliste dans un salon (ce qui pose d’ailleurs problème au réalisateur, qui ne parvient pas à gérer un espace aussi réduit) viendront muscler une intrigue qui se concentre davantage sur les coulisses d’un casse parasité indirectement par Guido. Les faux semblants et les tromperies mettent tout le monde dans l’embarras, excepté ce même Guido, égaré dans les limbes de sa propre vendetta. Là naît le sentiment de mélancolie, puisque chaque personnage semble avancer à reculons, preuve de l’incertitude qui règne. Les victimes sont en tout cas toutes des personnalités attachantes (Maria, puis Marco, le complice de Guido avant son passage en taule), ce qui alourdit encore davantage l’atmosphère. Le gros défaut de ces Diamants de sang est cette incapacité à justifier la chape de plomb pesant sur son intrigue (avec l’aide de la musique électronique de Luis Bacalov)… Il est bien difficile de savoir où le réalisateur veut en venir. A l’instar de Guido, Di Leo semble se laisser porter par les évènements en essayant de donner l’impression de maîtriser son sujet, assez fumeux, dont le seul propos se retrouve finalement résumé dans un final aussi solennel que téléphoné. Son film ne dispose pas d’assez d’intensité pour être considéré comme un film noir. Et puis bien sûr, il lui manque tout le panache de Milan Calibre 9, ce qui fait qu’il ne peut pas non plus être considéré comme un polar à l’extravagance latine. Diamants de sang est un hybride raté.