1900 – Bernardo Bertolucci
Novecento. 1976Origine : Italie / France / R.F.A.
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La longueur du film mise à part (5H02, plus que les péplums…), tous les ingrédients de cette grande fresque historique étaient réunis pour en faire une réussite commerciale : grandes têtes d’affiches internationales, belle musique du maître Morricone (sans que cela soit sa plus sublime), superbes paysages d’Emilie-Romagne, région natale du réalisateur…et le scénario aussi.
Quid ? Bertolucci veut raconter l’histoire de cette partie rurale de la Botte de la fin du XIXème siècle à la Libération (la dernière scène se situe autour du 25 avril 1945…) à travers deux familles : celle de De Niro, fils et petit-fils de grand propriétaire terrien, et celle du contre-maître dont le petit-fils n’est autre que… Depardieu.
Un demi-siècle c’est long et cela paraît tel car 1H30 est consacrée à l’enfance des deux personnages principaux… Mais ensuite l’Histoire s’emballe.
Deux évolutions majeures, la première à travers la technique agricole (passage d’une agriculture traditionnelle avec la charrue et des outils rudimentaires à l’arrivée des premiers tracteurs amenés… par les fascistes) ; la seconde, très développée dans le film, politique.
Des années 1900 où l’exploitation est gérée d’une main paternaliste par un Burt Lancaster autoritaire puis déclinant à partir des années 20, époque à laquelle le prolétariat paysan ainsi qu’Olmo (Depardieu) sont gagnés par les théories révolutionnaires marxistes (trop longues scènes de chants communistes à suivre dans la langue de Dante puisque la V.O anglaise (sic) ne parait pas crédible tant le cadre naturel fait italien !). La violence gagne alors la fresque mais rassurons nous : le nouveau contre-maître fasciste est absolument démoniaque sans pour autant que la paysannerie soit angélique. Elle est montrée dans sa misère et sa brutalité simpliste.
Là n’est pas l’intérêt majeur du film : Bertolucci montre que malgré les différences de richesse, de culture, de classe diraient nos marxistes préférés, l’amitié qui liait les deux héros dans l’enfance résiste et dépasse tous les évènements… de même que l’appartenance à la Nation a été plus forte que la solidarité du prolétariat, incapable de réussir la grève générale en 1914… Mais le génie de Bertolucci fait qu’on ne sait pas, jusqu’à l’ultime scène, ce qui va l’emporter, entre le révolté idéaliste et le désabusé aristocrate qui s’est contenté dans les années noires d’ignorer les fascistes. Entre l’amitié et l’idéologie, Bertolucci hésite…
Film baroque, très violent (la scène du meurtre d’un garçon d’honneur est inoubliable), le principal défaut vient selon moi du manque d’épaisseur du rôle de De Niro ou plutôt du flou qui entoure sa personne : trop de passivité, trop peu de caractère alors qu’il aurait dû être tout puissant dans son domaine, en tout cas jusqu’à l’arrivée des fascistes… Que veut-il ? De quel côté penche-t-il ? Aristocrate et donc historiquement dépassé…
La dernière scène, équivoque, laisse songeur et renvoie en un flash-back nostalgique à l’enfance, à travers une technique que Bertolucci affectionne et qu’il utilisera à nouveau avec brio dans Le Dernier empereur.