Histoires fantastiques 2-02 : La Formule magique – Tom Holland
![]() |
Amazing Stories. Saison 2, épisode 02
|
Étudiant, Phil s’intéresse moins aux études qu’à tenter de séduire ses camarades féminines. C’est de son âge, dirons-nous. Sauf que chez lui, ça tourne à l’obsession. Sa seule soif d’apprendre se concentre uniquement sur les techniques de drague d’un manuel qu’il a trouvé on ne sait où. Friand de travaux pratiques, Phil s’empresse de les tester… pour un résultat qui frôle le zéro pointé. L’amour ne se commande pas et n’a rien d’une formule mathématique. En revanche, on parle d’alchimie. Et si Phil ne la trouve pas auprès de sa voisine de laboratoire, une maladresse conduisant à une drôle de réaction chimique pourrait bien suffire à assouvir ses pulsions. Après tout, si le chien trônant en couverture de ce magazine est devenu réalité, pourquoi ne pas imaginer la même finalité en aspergeant les pages d’un magazine de charme ? En tout cas pour lui, cela ne fait aucun doute, il tient la formule miracle qui réglera tous ses problèmes. De retour à sa chambre d’étudiant, il choisit “l’heureuse élue” et réitère l’expérience. Le résultat ira au-delà de ses espérances.
Loin de s’enfermer dans une tour d’ivoire pour se focaliser sur ses propres projets, Steven Spielberg continue de garder un oeil attentif à ce qui se fait par ailleurs, toujours enclin à filer un coup de pouce à un réalisateur qu’il estime prometteur. Phil Joanou avait ainsi pu profiter de ses largesses lors de la première saison avec pas moins de deux épisodes à son actif (Nuit de Noël et La Poupée) avant que Steven Spielberg ne produise L’Heure du crime, son premier film. Il en est allé de même pour Kevin Reynolds mais dans un ordre inversé avec Une bringue d’enfer produit pour le grand écran puis l’épisode Vous avez intérêt à me croire pour cette deuxième saison. La participation de Tom Holland à la série Histoires fantastiques ne doit donc pas être vu comme une régression au sein d’une carrière encore naissante mais comme un adoubement de la part du Wonder Boy. Son premier film, Vampire… vous avez dit vampire ?, a su marquer les esprits au point d’être devenu au fil du temps un petit classique du cinéma d’horreur. A l’époque déjà, il avait fait sensation par son savant mélange d’horreur et de comédie, le tout teinté d’une forme de nostalgie qui évite tout passéisme. On retrouve ce même mélange à minima dans La Formule magique où à la suite de son héros, il revisite à sa manière la figure du savant fou. En outre, qu’elles soient volontaires ou non, ce deuxième épisode de la deuxième saison cultive quelques similitudes avec La Météorite, son homologue de la première saison. En prenant tous deux un étudiant comme personnage principal qui se retrouve brutalement confronté aux forces de l’attraction, ces deux épisodes relèvent du teen movie, l’ombre de John Hughes ne planant jamais bien loin.
Avec Une créature de rêve, John Hughes continuait de creuser son sillon sur l’auscultation d’une certaine jeunesse américaine mâtinée cette fois de fantastique. Trop timides pour approcher les filles, Gary et Wyatt mettaient leurs savoirs en commun dans l’élaboration de la femme parfaite qui serait alors dédiée à leur éducation sexuelle. La démarche de Phil (interprété par le débutant Jon Cryer, familier de l’univers de John Hughes pour avoir joué dans Rose bonbon, l’un de ses scénarios porté à l’écran par Howard Deutch) épouse les mêmes contours, à ceci près que sa trouvaille relève du hasard le plus total. Il n’a rien d’un scientifique, ni même d’un geek comme on les appelait plus communément à l’époque. Auteur de fresque maison à base de playmates découpées dans les pages de magazines de charme, Phil se rêve en charmeur de ces dames alors qu’il n’est qu’un dragueur lourdaud et compulsif. Un pur produit des années 80 qui va jusqu’à trouver son inspiration vestimentaire dans les pages d’un magazine mettant Don Johnson à l’honneur. A cette époque, Deux flics à Miami révolutionne la série policière et sous la défroque de Sonny Crockett, Don Johnson devient le parangon d’une élégance décontractée. Sauf que l’habit ne fait pas le moine et dans le même accoutrement, Phil peine à faire tourner les têtes. Il provoque plutôt animosité et irritation à son encontre, chacune de ses cibles potentielles se montrant particulièrement réfractaires à ses méthodes. En somme, c’est un pauvre type à qui la libido en ébullition fait perdre toute lucidité. Porté par une soif inextinguible de réussite et son envie d’avoir une femme à ses pieds (chacune des apparitions demande à être embrassée afin de lui appartenir pour toujours), il s’entête jusqu’à risquer sa vie. Rien de bien dramatique, néanmoins, juste de quoi susciter quelques sueurs froides. A une femme de plus de deux mètres qui ravage sa chambre de rage succède une version zombifiée encline à l’emmener dans la tombe avec elle, puis une femme tronc vissée à une table basse, comme autant d’approximation dans les dosages. Phil tâtonne, se trompe, en met trop ou pas assez mais jamais il ne s’arrête. Tel un joueur qui tente désespérément de se refaire, il continue tant qu’il lui reste du liquide dans les fioles. L’espoir fait vivre, comme on dit, et lui, il espère beaucoup. Trop, sans doute. A l’image de ces jeunes filles qui rêvent du prince charmant, lui rêve à la femme parfaite. Comprendre, bien roulée. A tel point qu’il ne daigne même pas s’intéresser à Angela, la seule fille à lui porter un peu d’intérêt. Elle lui ressemble dans sa manière d’user de subterfuges pour capter son attention. Mais comme elle ne correspond pas aux canons qu’il s’est fixés, il la repousse sans ménagement. Non, décidément, Phil n’a rien de sympathique. Il en deviendrait même pathétique dans sa quête frénétique de la femme de ses rêves.
Mais Tom Holland n’est pas là pour noircir le tableau. En bon élève, il ne perd pas de vue le cahier des charges auquel il doit se conformer. Les mésaventures de Phil ne vont jamais bien loin dans l’horreur et finissent in fine par lui ouvrir les yeux sur le véritable amour. En somme, il est récompensé de ses efforts même si d’une manière totalement différente de ce à quoi il aspirait. A tel point qu’on ne sait plus qui est le grand gagnant de l’histoire, Angela ou lui. Tom Holland observe cela à bonne distance, rappelant son appétence pour l’horreur – la vraie – lors d’un dernier plan en guise de clin d’oeil propice à faire basculer cet épisode des Histoires fantastiques aux Contes de la crypte.