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Tuer n’est pas jouer – John Glen

tuernestpasjouer

The Living Daylights. 1987

Origine : Royaume-Uni / États-Unis 
Genre : Action 
Réalisation : John Glen 
Avec : Timothy Dalton, Maryam d’Abo, Jeroen Krabbé, Art Malik…

Ouf ! Roger Moore a fini par décamper, après avoir incarné James Bond sept fois entre 1973 et 1985. Il était grand temps, puisque le sympathique Roger, non content de faire des films de plus en plus pourris, traînait de plus en plus son âge comme un boulet. Voici donc à sa place Timothy Dalton, l’un des acteurs souhaités par le producteur Broccoli dès 1967 pour remplacer Sean Connery. Se considérant alors comme trop jeune et jugeant la tâche de remplacer Connery trop difficile, l’acteur déclina la proposition, pour le plus grand bonheur de George Lazenby. Mais à la fin des années 80, il a mûri, et remplacer Roger Moore tient plus du salut public que de la gageure. Nous voilà donc avec un James Bond tout neuf, l’occasion rêvée pour renouveler une saga en manque d’inspiration. Si cela doit se faire, ce ne se fera cependant pas à travers le réalisateur, puisque John Glen reste fidèle au poste après Rien que pour vos yeux (1981), Octopussy (1983) et Dangereusement vôtre (1985). Il réalisera également deux ans plus tard Permis de tuer, qui en fera le réalisateur attitré des James Bond des années 80 et le plus employé de l’histoire de 007. Sans parler de son boulot de monteur ou de réalisateur de seconde équipe pour Au Service Secret de Sa Majesté (1969), L’Espion qui m’aimait (1977) et Moonraker (1979). On ne peut pas dire non plus que le scénariste Richard Maibaum vienne renouveler la saga, puisqu’il est tout bonnement chargé d’adapter les romans de Ian Fleming depuis Dr No en 1962 (avec quelques exceptions), avec l’aide de son complice Michael Wilson, arrivé sur la saga en même temps que John Glen.

Mais qu’importe, après tout ! Le vieux Broccoli sait s’adapter et prendre des hommes malléables (il doit en falloir, de la poigne, pour que le scénariste de Bons baisers de Russie puisse plus tard écrire un truc comme Dangereusement vôtre). Alors bon, James Bond se renouvelle-t-il oui ou merde ? Et bien je dirais que non. Les défauts qui firent de l’ère Roger Moore des années de plomb répondent encore présents à l’appel. En tête de liste des défauts, nous trouvons donc l’humour. Un humour qui n’est certes pas aussi évident que par le passé, mais qui demeure envers et contre tout, avec les répliques fumeuses de 007, avec l’absurdité de certaines situations (l’Aston Martin qui emporte une cabane sur son chemin, la descente d’une pente montagneuse en housse de violoncelle, l’instrument servant quand à lui de bouclier !) et, plus grave, avec des méchants portés sur la gaudriole ! Il n’y a pas un seul méchant, ici, il y en a plusieurs, dont certains changent de camp en cours de route. Mais dans les deux principaux, on trouve un militaire raté gaga et porté sur les petits soldats de plomb ainsi qu’un agent du KGB trouillard. Nous sommes loin de Goldfinger ou de Blofeld, et on se rapproche tout de suite plus de Scaramanga ou de Jaws, le charisme en moins. L’intrigue porte sur une sombre histoire d’agent du KGB voulant passer à l’ouest. Bond découvrira qu’il s’agit d’une fausse volonté, et que l’affaire trouve des ramifications dans le trafic d’armes et le trafic d’opium pour le compte de certains fonctionnaires soviétiques désireux d’entretenir la guerre en Afghanistan. On passera de la Tchécoslovaquie à l’Autriche, du Maroc à l’Afghanistan, moyennant quelques vertigineux creux scénaristiques et d’innombrables personnages secondaires plus ou moins importants.

Tout est fait pour que le film se concentre sur l’action, quitte pour cela à faire n’importe quoi. Ainsi, les gadgets utilisés par Bond sont parmis les plus ridicules de la saga, avec cette montre qui vaporise de la fumée toxique quand on lui siffle l’air de je ne sais quel hymne britannique, ou encore avec l’Aston Martin et son rayon laser capable de couper en deux une voiture au niveau du plancher. Sans parler des habituelles bêtises testées par Q, ici une radio lance-roquettes. Une rumeur veut aussi qu’une des scènes coupées mettait en scène un tapis volant… Le reste se compose en explosions en tous genres, avec comme point culminant le conflit en Afghanistan qui se rapproche de celui de Rambo 3, avec des armes qui font boum, des voitures qui font vroum et des avions qui font Ker’Plash, comme diraient les scénaristes de la série télé Batman des années 60. John Glen, 55 ans à l’époque des faits, est ici comme un gamin (ou comme l’un des méchants de son film, donc) qui s’amuse avec ses joujoux. A partir de ce moment là, le film sera complètement décérebré et se terminera en totale roue libre (“même qu’à la fin on a qu’a dire que tout est bien qui finit bien, les soviets disent bonjour aux anglais et les afghans sont aussi invités et y’a du champagne et de la musique et tout le monde il fait la fête”. Tels auraient pu être les propos de John Glen et ses amis scénaristes au cours d’une réunion de production).

On en viendrait presque à oublier James Bond, dites donc. Timothy Dalton est évidemment bien moins gêné dans ses scènes d’action que Roger Moore l’était dans ses dernières années. Son physique est également très différent de celui de notre bon vieux Brett Sinclair, mais en reprenant avec une relative régularité son penchant pour l’humour il ne se distingue tout de même pas trop de son style. On peut tout de même ajouter que le personnage de 007 semble ici rééllement épris de sa James Bond girl, qu’il ne quitte pratiquement pas du film. L’une de ses missions sera même d’attendre avec elle à Vienne, et ainsi les deux tourteraux iront à un concert, à une fête foraine et pourront se bécoter de nuit au sommet d’une grande roue. Monsieur est galant, et si il est vrai que Maryam d’Abo est plutôt mignonne, son personnage n’est en fait rien d’autre qu’une blondasse assez cruche qui se fera manipuler en tout bien tout honneur par tous les camps antagonistes du scénario. Voir James Bond s’enticher d’une telle greluche pose quand même problème, d’autant plus que ladite greluche n’offrira pas de scène sexy et ne s’impliquera que très peu dans les scènes d’action (si ce n’est lors d’une gaffe mémorable aux commandes d’un avion, excuse facile pour offrir un combat en plein ciel entre Bond et un tueur soviétique). Qu’est-ce qu’il ne faut pas voir… Enfin… C’est toujours mieux que Grace Jones… Mais dans l’ensemble, après la vision de ce nouveau James Bond, on aurait presque envie de sortir Roger de son hospice. Juste par nostalgie.

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