Terminator : Dark Fate – Tim Miller
Terminator : Dark Fate. 2019.
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La journée de Daniella Ramos débute comme tant d’autres. Levée de bonne heure, elle s’occupe du petit-déjeuner pour son père et son frère avant de partir travailler dans une usine de construction automobiles en compagnie de ce dernier. Les événements changent de tournure au moment où elle voit son père à l’usine, pointer inexplicablement une arme sur elle. Soudain, tout s’emballe. Une inconnue moleste copieusement le paternel, en réalité un cyborg ultra-perfectionné, et la somme de la suivre sous peine d’être tuée. Sous le choc, son frère et elle suivent néanmoins cet ange-gardien venu du ciel, toujours poursuivis par l’horrible machine, laquelle sème mort et désolation sur son passage. Elle ne le sait pas encore mais Daniella – Dani, pour les intimes – est appelée à avoir un destin fantastique, celui de cheffe de la résistance dans un futur apocalyptique où les machines ont pris le pouvoir et cherchent à éradiquer l’Humanité.
Oubliez Avatar et ses suites toujours en développement, sa marotte du moment, Terminator demeure la grande œuvre de James Cameron. Si dans les faits il n’a plus mis en scène les aventures du T-800 – véritable héros de la franchise depuis la starification d’Arnold Schwarzenegger – depuis 1991, il n’en est jamais resté éloigné bien longtemps. Il y a d’abord eu cet improbable Terminator 2 3-D : Battle Across Time en 1996, une attraction destinée au parc Universal City en Floride, élaborée à une époque où James Cameron rongeait son frein, dans l’incapacité de démarrer la pré-production de Terminator 3 suite aux déboires financiers de la Carolco, société détentrice des droits. Finalement parti sous d’autres cieux, Terminator 3 puis Terminator Renaissance se font sans lui. Dépossédé de son bébé, il nourrit une profonde amertume au point de déclarer, au moment du rachat des droits de la franchise par une compagnie de rachats de crédits en 2010, que pour lui, la franchise a fait son temps, qu’il n’a plus d’idées pour la relancer et qu’il déplore le mauvais travail effectué par Jonathan Mostow et McG. La surprise est donc totale lorsque, 5 ans plus tard, il assure la promotion de Terminator Genisys, ne tarissant pas d’éloges sur cette suite qu’il estime digne de ses propres films. Le fait que celle-ci efface les deux films honnis tout en rendant hommage à son travail en le revisitant peut fournir une première explication à son enthousiasme. Il se peut aussi qu’il ait particulièrement apprécié que les auteurs prennent en compte son idée – à savoir que le tissu extérieur des terminators est d’origine organique et qu’il peut donc par conséquent être soumis au vieillissement – afin de préparer de la meilleure façon possible le retour de Schwarzenegger dans le rôle qui a fait sa gloire. Enfin, on peut aussi voir dans cette envolée laudative l’habile manœuvre d’un homme roué aux us et coutumes de Hollywood, attendant patiemment son heure pour reprendre les destinées de son œuvre. Car les faits sont là, une fois James Cameron revenu au poste de producteur et participant à l’écriture du film, ce sixième épisode choisit à son tour d’ignorer ses prédécesseurs pour ne retenir que les événements survenus dans Teminator et Terminator 2 : Le Jugement dernier. Une manière de se parjurer tout en rappelant qu’il reste le mètre-étalon de la franchise.
Davantage encore que Terminator Genisys qui se contentait de revisiter les films de James Cameron par le truchement d’une nouvelle ligne temporelle, Terminator : Dark Fate emboîte le pas de Terminator 2, reprenant là où les choses s’étaient arrêtées. Par la grâce d’un rajeunissement numérique désormais monnaie courante au sein des blockbusters actuels, et qui avait permis au Schwarzenegger de 2015 d’affronter celui de 1984, nous retrouvons Sarah et John Connor en 1998, dans un moment de félicité de courte durée puisque un T-800 fait soudain irruption, tue sa cible et s’en va comme si de rien n’était, laissant une mère aux abois devant la dépouille de son fils. Une fois la surprise passée, la teneur de ce prologue pose question par ce qu’il laisse supposer de roublardise de la part des scénaristes (un T-800 plutôt qu’un T-1000 dans le seul but de pouvoir intégrer Arnold Schwarzenegger à l’intrigue) et de facilités laissées à notre imagination (une fois la mission accomplie par l’un d’entre eux, combien de Terminators désœuvrés abandonnés au fil des ans parmi nous?). Au-delà de ces considérations bassement tatillonnes (auxquelles s’ajoute le manque d’animosité du T-800, neutralisant avec douceur Sarah plutôt que l’éliminer alors qu’elle tente de faire obstacle à sa mission) ce prologue entérine la dimension tragique de Sarah Connor, non seulement condamnée à voir les gens qu’elle aime mourir sous ses yeux mais tout cela pour rien puisque l’homme étant ce qu’il est, l’avènement de la machine n’est que repoussé dans le temps.
Ce qui se joue ensuite n’est ni plus ni moins qu’une resucée de la trame narrative inhérente à la saga, à savoir une course-poursuite entre une cible, son protecteur et son poursuivant. Un aspect répétitif qui touche jusqu’aux scènes d’action, certes surgonflées mais ne proposant rien de neuf si ce n’est une curieuse apathie lors du premier affrontement entre Grace et le Rev-9 à l’intérieur de l’usine d’assemblage d’automobiles. Il n y a pas un figurant pour réagir à ce qui se passe sous leurs yeux, comme si la fin du monde avait déjà eu lieu. Même les caractéristiques propres au Rev-9, sorte d’amalgame entre le T-800 et le T-1000 lui permettant de dissocier son exosquelette de son aspect extérieur liquide, n’apportent pas le renouveau escompté. Outre rendre improbable sa propre structure, il remet en cause par sa technologie et sa solidité la possibilité d’une résistance efficace. Légion, le successeur de Skynet dont le nom confère une dimension biblique à l’holocauste à venir, apparaît tellement puissant et avancé sur le plan technologique qu’on en vient à se demander par quel miracle la résistance a pu s’organiser et le contrarier au point qu’il en vienne à envoyer des émissaires dans le passé pour en exécuter le leader. Le film touche là les limites de la surenchère à tout prix car même si la résistance se perfectionne à son tour – ici, le protecteur n’est plus ni un humain, ni un cyborg mais un alliage entre les deux, un guerrier augmenté comme le souligne le dialogue – elle demeure laborieuse et coûteuse en vie humaine. Le seul point sur lequel Terminator : Dark Fate se démarque de ses prédécesseurs tient à la féminisation de la résistance. Certes, le personnage de Sarah Connor – surtout dans le 2 – s’imposait comme un précurseur dans un cinéma d’action très masculinisé mais il restait néanmoins réduit à son statut de mère. C’est à sa progéniture qu’était promise la destinée héroïque, pas à elle. Ici, la figure de la résistance devient une femme, tout comme le protecteur qu’on lui envoie. Symboliquement, Légion s’apparente donc au patriarcat contre lequel il convient de s’opposer. Loin d’être novateur sur le sujet, le film de Tim Miller s’inscrit dans la tendance actuelle impulsée par le mouvement #MeToo et qui a vu successivement sortir sur les écrans des films d’action mettant des personnages féminins en vedette (Wonder Woman, Captain Marvel, Alita Battle Angel). Encore une fois, le personnage de Sarah Connor permet à la franchise de se démarquer en imposant une héroïne d’action sexagénaire. Dommage qu’elle doive souffrir du syndrome « badass », surjouant les durs à cuire parfois en dépit du bon sens, notamment dans sa relation avec Carl, au doux parfum de réchauffé.
Pas moins de huit personnes ont participé au scénario du film pour un résultat loin d’être flamboyant. Les seules idées neuves concernent le personnage de Carl, nom d’emprunt d’un T-800 inactif, quoiqu’elles se contentent de broder sur des thématiques sous-jacentes des précédents films, à savoir l’humanisation progressive de la machine. Quant à son côté girl power, celui-ci prend un sérieux coup dans l’aile puisqu’il revient à la seule figure masculine – le T-800, encore et toujours – de régler définitivement le problème. En somme, Terminator : Dark Fate n’apporte rien à la saga, accréditant le constat effectué par James Cameron en 2010 comme quoi il ne savait plus vraiment comment la relancer. Reste un film d’action bien bourrin à l’humour en sourdine, ce qui n’était pas gagné avec Tim “Deadpool” Miller à la barre, légèrement supérieur à Terminator Genisys, lequel conserve in fine son statut de cancre.
James Cameron crache sur les films qui ont été produit après Terminator 2 mais il ne s’est pas gêné pour piocher dedans afin d’écrire le scénario de Dark Fate et avec la scène d’intro il détruit ce qu’il a construit dans les deux premiers films. Je pige pas qu’il n’ait pas fait un film sur la guerre contre Skynet dans le futur (le futur qui se déroule de nuit), la fin du 3eme film lançait le terrain. Enfin bref si il y’en a un qui doit être content c’est Jonathan Mostow car Terminator 3, le soulèvement des machines va être réhabilité, après tout c’est lui le seul et unique Terminator 3 n’en déplaise à James Cameron (qui a un égo de la taille de Jupiter).
Je suis pas aussi dur que Chucky sur Dark Fate, que j’ai beaucoup aimé, mais la saga Terminator est condamnée à raconter la même histoire. La seule tentative de se démarquer des autres Terminator est celui de McG avec Terminator Renaissance, qui est pour moi le plus faiblard. Substituer un environnement à la Mad Max avec un soleil écrasant a été préjudiciable à la description d’un futur post apocalyptique. Les quelques minutes dans Terminator puis Terminator 2 ont été plus convaincantes et soulignaient très bien la désolation de ce futur sans espoir face à des machines quasi indestructibles.
Terminator Dark Fate est un énième recommencement de la course poursuite entre le chasseur et sa proie. C’est ce qui en fait sa limite mais aussi son point fort, ne se gênant pas pour se servir dans les films précédents. Ainsi on a droit à un Terminator plus évolué, mélange du T 1000 et du John Connor de Genesys, une héroïne à moitié cybernétique comme le personnage de Sam Worthington dans Terminator Renaissance, une nouvelle élue qui remplace John Connors, comme dans Terminator Salvation où le personnage de Claire Danes devait être le vrai leader de la résistance contre les machines, etc
Avec le recul, je me demande si Cameron, n’a pas sabordé ce film pour que plus personnes n’y touche. Passé par plusieurs réalisateurs, dépossédé de son bien, Cameron voulait récupérer ce qu’il avait fait naitre pour l’achever.
Cela a prit 30 ans, mais il fallait bien le faire.