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Batman & Robin – Joel Schumacher

batman&robin

Batman & Robin. 1997

Origine : États-Unis / Royaume-Uni 
Genre : batmerde 
Réalisation : Joel Schumacher 
Avec : George Clooney, Arnold Schwarzenegger, Chris O’Donnell, Uma Thurman…

Chanson connue : le carton d’un film à gros budget entraîne une séquelle dans la foulée. Tout le monde revient, à l’exception de Tim Burton, cette fois définitivement éloigné de la saga, et de Val Kilmer, parti faire Le Saint en reprochant aux scénaristes de faire passer Batman dans l’ombre de ses super-ennemis. Pour reprendre le rôle, aucun problème, il ne fallut que quelques jours pour engager George Clooney, désireux d’être une star en dehors de la série Urgences. Et dans les nouveaux rôles, deux méchants (Mr. Freeze et Poison Ivy) et un gentil (Batgirl), il n’y avait là aussi que l’embarras du choix. Qu’une vedette refuse et d’autres se profilent déjà derrière. Ce furent respectivement Arnold Schwarzenegger, Uma Thurman et la potelée Alicia Silverstone qui décrochèrent le jackpot, souvent d’ailleurs en solution de repli (le futur gouverneur de Californie coiffa ainsi Stallone et Hulk Hogan lorsque Schumacher décida que Freeze devait être une montagne de muscles et non un Anthony Hopkins ou un Patrick Stewart ; Thurman profita du refus de Julia Roberts et de Demi Moore, et Silverstone de celui de Gwyneth Paltrow). Bien sûr, Joel Schumacher resta aux commandes, conforté par les bénéfices de Batman Forever dans son choix de faire un film visant un public pour enfants, ce que la Warner approuva tout à fait, se voyant déjà vendre plein de produits dérivés.

Batman et Robin (toujours Chris O’Donnell) doivent cette fois empêcher Mr. Freeze de congeler Gotham City et Poison Ivy d’instaurer sa dictature écologique pas très nette (ses plantes mutantes ne sont pas à proprement parler très naturelles). Ils sont aidés par Batgirl, en fait la nièce du vieux serviteur Alfred, qui se meurt de la même maladie que celle qui poussa Freeze dans le monde du crime.

Que dire de plus que ce qui fut déjà dit sur Batman Forever ? Les super-méchants de ce film super-débile volent encore la vedette aux super-héros, et ce même si ces derniers comptent une tête de bétail en plus. Arnold Schwarzenegger incarne un Freeze lourd dans tous les sens du terme : autant au niveau du poids que de l’attitude, avec ses incessants jeux de mots minables appartenant au champ sémantique du froid, ou à l’occasion de la nature lors des conversations avec Ivy (celui qui n’a pas anticipé le “belle plante” d’au moins une demi-heure est vraiment un nul). Schumacher lui en fait faire des tonnes, et le chausse même de pantoufles fantaisie quand Freeze est à la maison. Dès sa première apparition, le “bonhomme de neige” s’inscrit dans la lignée du Sphinx de Batman Forever. Une seule chose le préserve d’être aussi insupportable que le personnage de Jim Carrey : son imposante armure réfrigérante, qui ne lui permet pas de grimacer à tout va (pas sûr que Schwarzenegger en eut été capable, de toute façon).

Poison Ivy est pour sa part inspirée par les femmes fatales de films noirs, et agit avec des choses aussi délicates qu’un baiser de la mort ou qu’un filtre d’amour. Schumacher ne demande pas vraiment à Uma Thurman d’être drôle (à part pour quelques jeux de mots), mais surtout de se contorsionner dans tous les sens en aguichant tous les hommes qui passent pour que l’on n’oublie pas qu’elle est une femme fatale. L’humour physique est donc bien présent, même s’il ne s’agit plus de grimaces. Le réalisateur ose même s’inspirer un peu de la Catwoman jouée par Michelle Pfeiffer dans Batman le défi en créant le décalage entre la personnalité civile et la personnalité “sous masque” d’Ivy. Une inspiration sans lendemain : jamais l’idée qu’Ivy puisse être schizophrène ne s’impose. Dès sa transformation suite à un accident dans son laboratoire, elle devient “Poison Ivy” et adopte comme homme de main un mutant né des expérimentations de son patron ripou. Bane, tel est son nom, est le prototype de la brute épaisse, avec des grognements pour seule conversation. Sa brutalité et son imbécilité font de lui l’improbable employé de sa très maniérée patronne. Que cela soit Ivy, Bane ou Freeze, tous trois demeurent à l’état d’ébauche, leur particularité respective (le froid, la nature et la force) étant à peu près les seules choses permettant de les distinguer du Sphinx ou de Double Face dans le film précédent.

Schumacher et son désastreux scénariste Akiva Goldsman ont recours à des méchants interchangeables, un peu comme le faisait la série télévisée avec Adam West et Burt Ward. Les hommes doivent être marrants et les femmes sexy. Pourtant Schumacher disposait d’une belle occasion de faire de Freeze un être un peu plus profond que le guignol qu’il est. Toujours épris de sa femme, il s’est lancé dans le crime pour pouvoir obtenir suffisamment d’argent pour poursuivre ses recherches afin de la réanimer et de la sauver. Sa haine aveuglante aurait donc dû être au cœur du film, mais Schumacher préfère de loin lui faire dire des choses comme “je jette un froid“. Du coup, comment prendre au sérieux la larme versée sur la mort de sa femme (d’autant plus que ladite larme se gèle en gros plan sitôt sortie de l’œil) ? Comment le voir comme un homme désespéré lorsqu’il regarde un film de famille et qu’il use de son fusil congélateur pour faire taire un de ses sous-fifre en sortant une punchline adressée aux spectateurs (“je déteste qu’on discute pendant que je regarde un film“) ? Les volontés de donner un peu de relief étaient bien là, mais les priorités du réalisateur les font apparaître plus ridicules qu’autre chose. Le même constat peut être fait au sujet d’Alfred, le mourant. Comment s’apitoyer une seule seconde sur son sort et se sentir ému par quelques flashbacks alors que sa nièce passe son temps à jouer aux rebelles, que Bruce Wayne se fait engueuler par ce petit merdeux de Dick Grayson (“moi aussi je veux mon propre signal dans le ciel !“) et que Batman et Robin continuent dans le feu de l’action à sortir eux aussi des répliques comiques miteuses ? La maladie d’Alfred sera au final résolue en un tour de passe-passe incohérent. Toutes les tentatives de caractérisation des personnages de “gentils” sont grotesques : pour illustrer la mésentente entre Batman / Bruce et Robin / Dick, Schumacher ne trouve rien de mieux à faire que de les faire s’engueuler au sujet de Poison Ivy, Robin reprochant à Batman d’être jaloux. L’histoire du manque de confiance passe elle rapidement à la trappe pour être résolue sans même que le spectateur ne s’en rende compte.

Quant à Batgirl, parachutée dans le film peut-être en réaction aux accusations d’avoir fait du dynamic duo un couple gay, elle s’incruste littéralement auprès des deux héros, qui mis devant le fait accompli en rigolent et disent qu’il faut “changer la serrure” de la Batcave. Les amateurs du comic apprécieront au passage que Batgirl ne soit plus la fille du commissaire Gordon mais la nièce d’Alfred. Une prise de libertés inutile, puisque ses relations avec Alfred se limitent à trois scènes se concluant pour dire qu’Alfred est bien heureux de servir Bruce Wayne, dont il est en quelque sorte le père adoptif. Toutes les scènes intimes du film ne sont pas que maladroitement gérées, elles jurent surtout avec le reste du film qui, comme dans Batman Forever, est caractérisé par des scènes d’action dans lesquelles Schumacher nous mitraille d’images d’une laideur absolue. C’est encore une fois un festival de couleurs fluorescentes, Gotham City étant devenue une boîte de nuit techno à ciel ouvert. Notons tout de même la prépondérance du bleu clair (pour Freeze) et de l’alliance rose / vert (pour Poison Ivy). Toute cette esthétique, alliée à une caméra sans cesse en mouvements et à l’incrustation d’humour dans les scènes d’action (les bat-patins à glace !), donne un film presque illisible. Comme Val Kilmer avant lui, George Clooney ne dispose pas d’une grande liberté de mouvement dans son costume en titane, et les scènes de combats sont pitoyables. Le comble du mauvais goût est cela dit atteint lors des gros plans en dessous de la ceinture (des deux côtés, plus les seins d’Alicia Silverstone) lorsque les super-héros mettent leurs costumes.

Cette fois tout le monde est unanime : le public bouda le film, le réalisateur admit “en avoir fait un peu trop dans l’aspect enfantin“, les acteurs encore aujourd’hui ont honte, la critique tomba sur le film à bras raccourcis, et même la production jugea que cet infomercial destiné à vendre des jouets n’étaient pas assez artistique ! Résultat : la franchise fut remisée au placard, et lorsque le moment vint de ressortir Batman, ce fut pour tout reprendre à zéro.

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