CinémaHorreur

Night of the Demons 2 – Brian Trenchard-Smith

 

Night of the Demons 2. 1994.

Origine : États-Unis
Genre : Horreur
Réalisation : Brian Trenchard-Smith
Avec : Amelia Kinkade, Merle Kennedy, Cristi Harris, Johnny Moran…

Plusieurs années se sont écoulées depuis la sinistre soirée d’Halloween durant laquelle des jeunes se sont fait massacrer dans l’ancien crématorium que l’on nomme Hull House. A ce jour, tous les cadavres ont été retrouvés sauf un : celui d’Angela. La légende veut qu’elle soit désormais l’épouse de Satan. Bien entendu, Hull House est elle aussi maudite… Il n’en faut pas plus pour exciter l’imagination des pensionnaires d’une école religieuse, un peu trop bridés à leur goût par l’autoritaire sœur Gloria. D’autant plus que l’une des élèves, Melissa, appelée “Mouse” par ceux qui aiment se moquer de ses cauchemars et de sa timidité, n’est autre que la sœur d’Angela. Privée du bal d’Halloween, l’insolente Shirley organise une petite fugue à l’extérieur, s’arrangeant pour embarquer quelques amis eux aussi punis ainsi que Melissa. Anticipant les protestations, elle fait trafiquer les panneaux de signalisation et mène tout droit ses camarades à Hull House.

Effacement des personnages devant l’intérêt supérieur du spectacle horrifique, réalisation pensée de manière à entretenir ce dernier, humour dosé de façon à ce qu’il ne fasse pas virer le film à la farce, rythme constant évitant les temps morts… Telles sont les qualités qui ressortent de Ouija et de Night of the Demons, les deux premiers films de Kevin Tenney, dont le succès d’estime auprès du public a abouti à d’inévitables quoique tardives séquelles. Si Tenney s’est lui-même chargé de la séquelle de Ouija, celle de Night of the Demons -pourtant le meilleur et le plus révéré des deux- est tombée entre les mains de Brian Trenchard-Smith. Sans être un vieux de la vieille, cet anglo-australien au passif qui m’est trop méconnu pour que je puisse me permettre d’émettre un jugement sur ses qualités (je sais juste que tout de suite après il réalisa coup sur coup le meilleur et le pire des opus de la saga Leprechaun) commençait à avoir de la bouteille. Certainement assez pour ne pas avoir à prendre des leçons chez son prédécesseur, si l’on en juge à ce qu’il a fait de Night of the Demons 2 (Demon House II dans certaines éditions DVD françaises), c’est à dire l’antithèse de la vision qui était celle de Tenney. Par contre, à défaut de reprendre ses principes, Trenchard-Smith pique à son camarade des scènes, des idées de scènes ou de simples éléments qu’il réinjecte dans son propre film, soit pour ne pas dépayser les amateurs de l’original (la danse d’Angela sur fond de rock metal, les “seins maléfiques” d’une des actrices, le rouge à lèvres utilisé par Linnea Quigley…) soit par pure paresse (un plan où Angela sous sa forme démoniaque flotte dans un couloir… même pas refait à l’identique : carrément volé au premier film).

Pour le reste, nous avons droit à une dénaturation généralisée et à des apports personnels qui ne reflètent que trop les tares que Tenney parvenait à éviter. Prenons par exemple le cas d’Angela, qui avec sa tenue de gothique et son faciès à faire pâlir ses collègues d’Evil Dead était incontestablement le démon le plus charismatique. Mais pas la “chef”. Et bien cette Angela devient ici une vedette que Trenchard-Smith s’évertue à traiter comme telle. Elle s’amuse avec des prêcheurs de parole divine dans le pré-générique, elle apparaît dans les rêves de sa sœur, elle sort des miroirs lorsqu’un zig récite une messe noire et, surtout, elle se met à raisonner et à converser comme si elle avait un plan en tête. Le réalisateur a ainsi oublié que sa force résidait tout autant dans son aspect, qui effectivement n’a pas changé d’un iota, que dans sa force brute. Elle incarnait une puissance implacable quoique sarcastique, tuant sans distinction ni arrière-pensée. Lui attribuer un plan, la faire entrer dans des discussions avec sa sœur ou avec d’autres victimes potentielles et la placer comme chef d’une meute d’autres possédés, c’est déjà lui faire perdre sa spontanéité et c’est ensuite une atteinte à une structure narrative qui avait fait ses preuves. Car la façon dont Trenchard-Smith aborde le personnage d’Angela fait écho à celle dont le scénario a été écrit.

Bien que le scénariste soit le même que pour le premier film, il n’y a plus cette simplicité qui faisait de Night of the Demons un crescendo vers l’horreur. L’unité de lieu vole en éclat : le pensionnat puis Hull House puis retour au pensionnat puis retour à Hull House et dénouement au pensionnat ! Tout cela au gré des protagonistes. Angela et ses troupes frappent à un endroit où à un autre, peu importe, à ceci près que Hull House est une maison vide et poussiéreuse alors qu’il y a plein de monde au pensionnat (c’est peut-être pour ça que la fameuse danse d’Angela se déroule là-bas ? Peut-être a-t-elle aussi chopé un gros ego ?). Le film y perd donc aussi en atmosphère. Et ce n’est pas le fait de renforcer l’humour au delà du raisonnable qui va servir de contrepoids : le coup de la sœur Gloria qui se prépare comme Rambo pour aller à Hull House, l’usage de bombes et pistolets à eau bénite, le coup du démon qui joue au basket avec sa propre tête, les vannes à la Freddy Krueger en petite forme, merci bien. D’autant que les personnages humains sont devenus pré-éminents et gangrènent la majeure partie du récit, ce qui constitue une faute inexcusable. Trenchard-Smith se repose sur eux, nous abreuve de caractérisations inutiles parmi lesquelles figure tout ce qui a trait à la sœur d’Angela, mais aussi les bisbilles entre le tolérant père Bob, la sévère sœur Gloria et le fanatique élève qui avant même que ses camarades n’aillent faire les pitres à Hull House (il avait d’ailleurs été convié mais l’invitation lui est parvenue trop tard) considère que les démons sont déjà à nos portes. Il y a aussi le groupe d’amis partis faire la noce : l’effrontée Shirley, son petit ami bellâtre, leur pote farceur, le mec-qui-aurait-bien-voulu-se-farcir-Shirley-mais-qui-doit-se-replier-sur-la-blondasse-anonyme et l’inévitable couple de jeunes héros, braves tourtereaux qui ne sont pas coincés mais qui pour autant n’aiment pas les blagues de mauvais goût sur le dos de la pauvre Melissa. Tout ce petit monde vivote, discute, fait des bêtises, rigole, se bécote ou regarde aux jumelles les filles qui se déshabillent.

Une heure durant, le réalisateur n’a d’yeux que pour eux, se limitant à annoncer la prochaine rencontre avec Angela qu’à travers quelques piqûres de rappel sans conséquence. Il pousse le vice jusqu’à les envoyer à Hull House et les en faire revenir aussi nombreux qu’ils y étaient partis sans les y avoir confrontés avec quoi que ce soit qui puisse présenter un quelconque intérêt (à moins qu’un démon parlant depuis le fond d’un chiotte en présente ?) mais en leur ayant permis d’aller jusqu’au bout de leur petite blague envers Melissa… Tout ça pour finalement amener Angela à l’aide du bâton de rouge à lèvres trouvé là-bas et qui violera une des filles, annonçant ainsi et enfin le début des choses sérieuses. C’est seulement une fois celles-ci démarrées que Trenchard-Smith essaiera de renouer avec le style de Tenney, mais l’humour restant omniprésent, la mise en scène plan-plan et la nouvelle Angela étant désormais trop embourgeoisée pour ne pas faire de chichis, l’esprit n’y est pas. Inutile d’insister avec un rab de scènes gores : Night of the Demons 2 a perdu tout le mordant de son illustre prédécesseur, qui au passage n’avait pas besoin de ça pour se montrer malsain, et a opté pour un alourdissement général. Cette séquelle aurait aussi bien pu être celle de n’importe quelle série B d’horreur des années 80 tant on y retrouve les mauvais choix caractéristiques des séquelles opportunistes.

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