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Le Con et la flic arrivent à New York – Michele Massimo Tarantini

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La Poliziotta a New York. 1981

Origine : Italie / France 
Genre : Comédie 
Réalisation : Michele Massimo Tarantini 
Avec : Edwige Fenech, Alvaro Vitali, Aldo Maccione, Renzo Montagnani…

Après avoir été La Flic chez les poulets, après avoir été La Flic à la police des mœurs, la Flic va cette fois-ci à New York. En cela, on peut dire qu’elle suit les pas de son illustre collègue français, le gendarme, qui pour sa part avait gagné le droit à ce voyage dès sa seconde apparition et en était revenu avec encore une belle carrière devant lui. Ici, notre charmante Gianna (Edwige Fenech) et son moins charmant coéquipier Alvaro (Alvaro Vitali) n’ont pas les mêmes perspectives devant eux. C’était le moment ou jamais pour faire cette sortie à New York. C’est que la comédie sexy se meurt de sa belle mort. Il faut dire que ses égéries vieillissent et qu’elles commencent à en avoir un peu marre de batifoler ainsi. C’est bien légitime. Sans elles, il y a fort à parier qu’un genre aussi répétitif que l’est la comédie sexy italienne n’aurait pas su perdurer de la sorte. Aussi utiles aient-ils été pour la création d’un repère cinématographique familial dans lequel il était bon de se replonger de temps à autres, leurs collègues masculins récurrents tels qu’ici Alvaro Vitali, Aldo Maccione et Renzo Montagnani n’auraient certainement jamais pu prodiguer leurs pitreries aussi longtemps si ils n’avaient pas évolué à la lumières de ces brillantes actrices (ce qui est une jolie métaphore pour dire que si ces dames n’avaient jamais montré leurs fesses, Alvaro Vitali n’aurait jamais pu construire une carrière entière sur l’art de faire des grimaces… d’ailleurs, il ne s’est jamais relevé de la chute des comédies sexy)… Actrice emblématique de cette mode cinématographique guillerette, Edwige Fenech doit sa renommée à ce genre de films, et il est juste de dire qu’elle a amplement rendu ce que le genre lui a donné. En s’appuyant sur ses belles prestations dans certains gialli, on peut même dire qu’elle y a gâché une belle carrière. A l’entame des années 80, entre son horloge biologique qui tourne, l’impression de tourner en rond, la montée du porno rendant obsolète ce genre de comédies très bon enfant et au nom des services rendus, elle mérite largement de dire au revoir au milieu qui l’a fait connaître. Et bien qu’elle tourna dans un ou deux autres spécimens l’année suivante, Le Con et la flic arrivent à New York (parfois titré Reste avec nous, on s’tire) peut être considéré comme le dernier de ses “grands rôles”. Il s’agit de son dernier film dans la défroque d’une employée de la fonction publique, son dernier avec Vitali, avec Maccione, avec Montagnani, et son dernier sous la direction de Michele Massimo Tarantini (réalisateur des trois “Flic“, plus d’un “Prof” et même de Taxi Girl).

L’Inspecteur Maccaroni (Renzo Montagnani) n’a qu’une idée en tête : arrêter le mafieux Big John (Aldo Maccione) exilé à New York. Pour cela, il conçoit un plan de génie : kidnapper Pupa et Joe “Douze homicides”, respectivement petite amie et garde du corps de Big John, pendant leur jogging quotidien et les remplacer par deux sosies exacts pour infiltrer le gang et trouver les preuves permettant d’arrêter le Parrain. Mais où trouver de tels sosies ? Coup de chance ! Manquant au passage de se faire écrabouiller, il croise la route du tandem de choc composé des flics Gianna et Alvaro, qui correspondent exactement aux profils de l’emploi. Un peu d’entraînement pour leur permettre d’imiter Pupa et Joe, et c’est parti pour l’Amérique. La chance est vraiment au rendez-vous puisque Big John se trouve en plein milieu d’une guerre des gangs avec le Turc (Giacomo Rizzo, lui aussi un habitué du genre), et il y a donc possibilité de faire coup double.

Si La Flic à la police des mœurs avait doublement innové en intensifiant l’érotisme et en faisant d’Edwige Fenech le moteur du scénario (enfin c’est un bien grand mot) là où elle était habituée à être un point de convergence relativement passif pour tous les mâles du casting, Le Con et la flic arrivent à New York tente encore autre chose. Si Gianna garde bien sa fonction motrice, son aspect sexy est fortement diminué, peut-être à la demande express de l’actrice, qui avait déjà probablement la tête à sa reconversion. Si elle continue à user de ses charmes pour tirer avantage des hommes faibles face à la chair, elle y va cette fois ci très mollo. Bien entendu, il n’est pas question que ses collègues (Alvaro en tête) ne viennent rechercher la pellicule photographique planquée dans son soutien-gorge. Il n’est pas question non plus d’assumer les responsabilités conjugales de la copine de Big John ni de s’abaisser à faire les femmes fatales pour mettre le Turc dans sa poche. Choses qui sont finalement assez habituelles, puisque toutes les profs, infirmières ou flics de la comédie sexy passaient leur temps à éviter les assauts libidineux de ces messieurs. Faute de mesurer le degré de concupiscence qu’elles faisaient naître chez les hommes, elles trouvaient pourtant toujours le moyen de les exciter davantage, que cela soit par le biais de fantasmes mis en scènes, par une quelconque promiscuité ou même en se faisant reluquer à leur insu. C’était un style d’humour hérité du loup de Tex Avery ou même du Sept ans de réflexion de Billy Wilder. En fin de compte, dans La Flic à la police des mœurs, Edwige Fenech n’hésitait pas à se dévoiler plus que coutume, souvent sciemment, rompant avec la tradition.

La tradition est encore évitée ici, puisque Gianna utilise toujours ses charmes de son plein gré pour subjuguer Big John ou le Turc. Mais, comme dit précédemment, elle ne les dispense plus de la même façon. Guêpière, nuisettes, décolletés (même abyssaux) sont tout ce qu’elle se permet pour mener à bien sa mission d’infiltration. C’est le grand triomphe de la suggestion sur la démonstration, ce qui laisse un boulevard à Alvaro Vitali, Aldo Maccione, Renzo Montagnani et Giacomo Rizzo pour se faire remarquer, maintenant qu’ils n’ont plus à jouer perpétuellement les mâles en rut et que les atouts de leur “meneuse” sont sagement à l’abri. Pour un peu, on pourrait dire qu’il s’agit d’une comédie simple, et non d’une comédie sexy. Le Con et la flic arrivent à New York est certainement la comédie italienne où la densité de connerie est la plus élevée. C’est un véritable festival de la part des acteurs. Vitali joue au faux pétomane et aux imbéciles, il se déguise, il fuit les avances de Gedeon, le petit ami noir disco de son sosie Joe “Douze Homicides”… Renzo Montagnani joue aux maladroits, il se déguise en indien ou en sheik pour passer inaperçu (bref il se prend pour l’Inspecteur Clouseau), Aldo Maccione se roule presque par terre à force de parler avec les mains, Giacomo Rizzo incarne un turc bègue à la tête d’un gang d’autres bègues… Même Edwige Fenech, qui n’a plus que ça à faire, participe à ces simagrées. Imitant Pupa, sa Gianna joue aux écervelées, ce qui lui permet de jouer des tours de cochons à Big John ou au Turc (enfermer l’un dans une douche brûlante, titiller l’autre sur le port ou le non port de la moustache). Elle fait même des arts martiaux lorsqu’elle prend part à des bagarres, où il faut bien l’admettre le plus spectaculaire reste ses robes. Déjà lourds lorsqu’ils sont en comité restreint, les personnages deviennent éléphantesques lorsqu’ils sont ensemble. Un repas d’affaire dans une pizzeria, où tout ce beau monde est présent, se termine ainsi en apocalypse quasi irregardable : tout le monde se tape dessus, les tables volent, et les gaz lacrymogènes ont été remplacés par du gaz hilarant. Trop c’est trop, et même les amateurs de comédies italiennes les moins regardant sur le niveau intellectuel de l’humour ne pourront que difficilement apprécier ce déluge grotesque. C’est dans de tels moments que l’on se rend compte que les charmes d’Edwige Fenech étaient les derniers remparts permettant de ne pas franchir le point de non-retour.

La Flic à la police des mœurs avait déjà laissé entendre qu’il n’était pas bon pour les comédies sexy d’essayer de se doter d’un scénario avançant d’un point A vers un point B, et qu’il était préférable de rester en vase clos (comme dans les hôpitaux ou les établissements scolaires) pour limiter les fantaisies des acteurs via la figure dominatrice d’Edwige Fenech (ou autres Gloria Guida, Nadia Cassini, Anna Maria Rizzoli etc…). Le Con et la flic arrivent à New York vient le démontrer catégoriquement. C’est du n’importe quoi incessant et plus le film avance, plus nous sommes prêts de la résolution de l’affaire, moins les gags font mouche. Ils n’ont fait illusion qu’au début, lors d’une exposition marquée par une relative sobriété. Par la suite, Tarantini semble en fait se complaire dans l’affirmation de sa fierté pour l’humour italien, bête et grivois, par opposition aux valeurs très dignes de l’Amérique. Renforcer la débilité de ses personnages et des situations dans lesquelles ils se vautrent comme des cochons dans la fange revient en fait à créer et à accentuer ce décalage principalement symbolisé par le personnage de Renzo Montagnani, un vrai napolitain soucieux de se prendre pour un américain (affichant par exemple le portrait de Ronald Reagan dans son bureau) sans jamais y parvenir, son identité italienne burlesque et beauf refaisant toujours surface. Même chose pour le mafieux joué par Maccione, ou même pour le pseudo Turc de Rizzo, qui peinent à se fondre dans la grandeur de l’Amérique. Et Tarantini trouve ça très bien, au point qu’il leur demande toujours plus de singeries. Dommage, car si il avait su se garder de la démesure, il aurait pu rendre plus tangible cette affirmation affectueuse de l’humour libertaire italien, certes souvent vulgaire mais pourtant attachant, lorsqu’il est bien fait. Voilà qui aurait été une meilleure cérémonie d’adieu à l’égard d’Edwige Fenech et de ses joyeux drilles, qui quittent une époque dorée par la petite porte.

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