CinémaHorreur

La Furie des vampires – Leon Klimovsky

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La Noche de Walpurgis. 1971

Origine : Espagne / R.F.A. 
Genre : Horreur 
Réalisation : León Klimovsky 
Avec : Paul Naschy, Gaby Fuchs, Patty Shepard, Barbara Capell…

Elvira et Geneviève (Gaby Fuchs et Barbara Capell), deux étudiantes en sciences occultes, partent à la recherche du tombeau de la Comtesse Wandesa (Patty Shepard), une vampire du XIème siècle. Elles s’égarent en pleine campagne et doivent passer la nuit chez un hôte rustique : Waldemar Daninsky (Paul Naschy), l’homme maudit qui à chaque pleine lune se transforme pour son plus grand malheur en loup-garou. Avec lui, elles réussiront à trouver le tombeau de Wandesa. Ne se laissant guère impressionner par les légendes populaires, Geneviève ouvre le cercueil, retire le crucifix planté dans la dépouille et, manque de chance, réussit l’exploit de se couper, abreuvant Wandesa de sang. Il n’en fallait pas plus pour que celle-ci ressuscite et vienne hanter le quotidien des deux jeunes femmes et de leur hôte Waldemar. Il faut vite mettre un terme aux agissements de la vampire, dont les forces risquent d’être décuplées lors de la prochaine Nuit de Walpurgis…

Troisième apparition de Waldemar Daninsky à l’écran (ou quatrième si on se fie à Paul Naschy, qui affirme que Las Noches del Hombe Lobo a bien été terminé même si le film demeure invisible), La Furie des vampires est pourtant la séquelle du premier film, Les Vampires du Dr. Dracula. Non pas une séquelle en terme de narration, mais une séquelle thématique, puisque de nouveau, le lycanthrope y affronte des vampires, alors que sa seconde apparition l’opposait à plein de monstres différents, dont la créature de Frankenstein. Mais à vrai dire, la saga de Paul Naschy peut aisément se regarder sans connaissances antérieures, car bien que les personnages y soient très souvent similaires (l’indispensable comtesse vampire, inspirée par Elizabeth Bathory), ils disposent d’une vie propre et leurs films ne comportent que des références anodines à leurs prédécesseurs. Par exemple, La Furie des vampires démarre avec la résurrection de Daninsky, qui se faît ôter du corps les balles en argent qui l’avaient envoyé ad patres. Ca ne mange pas de pain, ça ne joue aucun autre rôle que celui de faire la liaison entre le précédent film et celui-ci, et ça permet au loup-garou de s’évader de la morgue pour faire un tour dans les sous-bois et agresser une pauvre nénette qui passait par là. C’est finalement plutôt symptomatique d’un film généreux, qui en fait parfois trop, à l’image du loup-garou incarné par Naschy. Celui-ci bave outrageusement, casse les accessoires à portée de main et grogne à s’en donner mal à la gorge. L’influence de Lon Chaney Jr. (prévu pour le rôle de Waldemar Daninsky avant que quelqu’un ne persuade Naschy de le tenir lui-même) se fait sentir, et apporte au loup-garou un côté très naïf, qui convient parfaitement aux films mettant en vedette Waldemar Daninsky, celui-là comme les autres. Le scénario, co-signé par Naschy, ne sert qu’à amener des scènes horrifiques et comporte ainsi son lot d’invraisemblances. La résurrection de la Comtesse Wandesa est proprement hallucinante de facilité, tout comme le sera quelques secondes plus tard l’intervention d’un moine zombie agressif, qui n’a strictement aucune justification dans l’histoire. La présence également de la sœur de Waldemar folle à lier n’inspire que la perplexité et n’aboutit qu’à une autre agression. Féru des vieilles productions Universal, et notamment de celles opposant les grands monstres du bestiaire (qui au demeurant ne sont pas les plus malines), Naschy laisse donc passer toutes sortes d’aberrations, et ce jusqu’au niveau géographique. Waldemar habite en effet un vieux château isolé, sans électricité. Soit. L’acteur / scénariste a certainement cherché à donner un cachet gothique à son film, chose louable. Dans cette optique, il laisse croire que son intrigue se déroule dans le nord de la France, endroit peut-être considéré comme étant plus favorable au gothique. Chose déjà douteuse, mais il est encore plus difficile d’y croire, lorsque les scènes d’extérieures se situent dans un cadre de campagne espagnole !

Toujours est-il qu’en dépit de ses défauts, La Furie des vampires demeure un film attachant. La bonne volonté de Paul Naschy est évidente, et en payant le prix du manque de réalisme, le comédien scénariste peut laisser libre court à sa riche imagination, peuplée d’un réel sens du spectacle. A l’inverse d’un Jean Rollin, chez qui le lyrisme incessant apparaît surfait et surtout très ennuyeux, Naschy et son réalisateur du moment, León Klimovsky, ne cherchent pas à faire un film poétique de bout en bout. Les instants “rollinesques”, c’est à dire avec ralenti et musique “vaporeuse”, se limitent aux apparition de Wandesa et de Geneviève (devenue elle aussi créature de la nuit), deux vampires maniérées. Cela confère un réel impact à ces scènes, bien plus que si ce style s’était pompeusement étendu sur toute la durée du métrage. Par opposition aux vampires sexy, le lycanthrope représente la force brute et la violence sanguinolente, générant tout de suite l’attente d’un combat final qui, cela dit, ne remplira pas toutes ses promesses. La malédiction que représente la lycanthropie aux yeux de Waldemar Daninsky ne donne pas lieu à d’interminables complaintes roucoulantes mais à un regain d’intérêt de l’histoire d’amour dramatique entre le loup-garou polonais et sa nouvelle amie Elvira, qui permet en outre de faire des scènes érotiques à peu de frais. A ce niveau là aussi, La Furie des vampires se rattache à une vieille thématique du cinéma d’épouvante, dressant le parallèle entre les monstres et le sexe. L’époque étant ce qu’elle est, des scènes dénudées (donc bien plus explicites qu’au temps de la Universal) furent tournées pour l’export, tandis que des versions habillées furent mises en boîte pour satisfaire la très prude censure franquiste.

C’est donc sans fausse honte qu’un film à ce point truffé de défauts peut être pleinement apprécié. Naschy fut suffisamment marqué par le cinéma à l’ancienne pour ne pas prendre tout cela à la rigolade. Ce qui lui plait est aussi ce qui plait au public, et en tenant compte de l’évolution du cinéma (moins de réserves morales), il parvient sans peine à transformer sa naïveté en plus-value qualitative. Et puis sans avoir bénéficié du savoir faire des américains, des anglais ou des italiens, son film démontre que le fantastique ibérique pouvait avoir voix au chapitre, ajoutant sa pierre à l’édifice esthétique du cinéma d’épouvante gothique.

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