Crash and Burn – Charles Band
Crash and Burn. 1990Origine : États-Unis
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Les temps sont durs pour Charles Band, mais il sait rebondir. En 1988, son studio Empire venait à peine de mettre la clef sous la porte qu’il en recréait un nouveau, Full Moon. Puppet Master, le premier film à en sortir, mit la nouvelle boutique sur de bons rails avec un succès inespéré. Mais un succès en vidéo : chat échaudé craint l’eau froide et Band, soutenu par la Paramount pour ce qui est de la distribution, jugeait qu’une sortie préalable en salles rendait le profit plus difficile. D’où cette volonté de se limiter au marché de la vidéo. Shadowzone, Meridian : le Baiser de la bête et Crash and Burn, les trois films suivants, allaient connaître la même destinée, et Charles Band de ne plus jurer alors que par ce mode d’exploitation, souhaitant même y apporter de la plus-value en glissant des “bonus” en complément des films. La Paramount y mit le holà et lui demanda de payer lui-même le rab de bande VHS nécessaire à ces ajouts, ce qui provoqua donc l’arrêt de la manœuvre et la création -au moment de Puppet Master II– de “VideoZone”, plus ou moins le magazine officiel de Full Moon, destiné à mettre par écrit ce que Paramount refusait à l’écran et à l’accompagner de “goodies” et de gadgets promotionnels. Charles Band ne manquait décidément pas d’idées pour mettre en avant ses productions ! Voire pour se mettre en avant lui-même, comme lui reprocha David Schmoeller, le réalisateur de Puppet Master qui ne goûta que fort peu la tendance de son patron à s’attribuer le succès de son film… et à agir de même au moment de partager les bénéfices. Charles Band a en effet sa petite réputation, celle d’être un filou pas toujours très réglo. Ce qui n’empêche pas qu’il ait à sa suite une plâtrée de fidèles. Pour Crash and Burn, le premier film qu’il réalisa lui-même pour Full Moon, il put ainsi compter sur David DeCoteau à la production, sur son frère Richard à la musique, sur Ted Nicolaou au montage, sur Mc Ahlberg à la photo et sur David Allen aux effets spéciaux… Tout ce beau linge de la belle époque de l’Empire pour un film qui fut vendu en Europe sous le titre de Robot Jox 2 : Crash and Burn, afin de capitaliser sur le Robot Jox d’origine, réalisé par Stuart Gordon et dont la sortie fut sans cesse reculée du fait de la banqueroute de l’Empire (dans certains pays il sortit même après Crash and Burn).
Une crise économique apocalyptique a entraîné la fin de la civilisation. Désormais, la société est régie par une boîte privée, Unicom, qui se fait un devoir d’éviter que l’histoire se répète. Ce qui veut dire qu’elle préside aux destinées humaines avec une poigne de fer ! Interdits les ordi ! Trop dangereux pour la stabilité du pays ! Mais il existe quelques réseaux de résistance clandestins, comme celui auquel est affilié le vieux Lathan, patron d’une chaîne télévisée suspecte pour les autorités. On comprend donc aisément qu’il accueille avec une certaine fraîcheur le livreur d’Unicom venu lui amener le fréon nécessaire au contrôle de la température. Car oui, au nombre des fléaux de ce sinistre futur figure l’emballement du climat, avec des chaleurs excessives et des “tempêtes magnétiques”. C’est d’ailleurs l’une de ces tempêtes qui conduit Tyson Keen, le livreur et potentiel espion, à rester à la station (en fait une usine désaffectée). Que le vieux Lathan se rassure : le bonhomme n’a pas d’affection particulière pour son employeur. Mais de toute évidence, il y a bien un ennemi dans la place puisque Lathan est très vite assassiné. Alors qui est le coupable ? Outre Tyson, une poignée de collaborateurs sont sur les lieux. Parmi eux, on peut déjà exclure Arren, la petite-fille de Larry elle-même proche de la résistance…
Disons le tout net : Crash and Burn n’a guère de point commun avec Robot Jox. Il n’est d’ailleurs plus vendu comme une séquelle de ce dernier, et se retrouve même parfois sous le titre Synthoïd 2030. Le film de Gordon devait être le “blockbuster” de l’Empire et bénéficiait à l’échelle du studio d’une débauche de moyens investis dans ses effets spéciaux de robots géants. A côté de cela, le petit Crash and Burn fait pâle figure et illustre bien la table rase qu’a été la banqueroute de l’Empire : de gros robots il n’est ici que fort peu question. Le seul que nous voyons est laissé à l’abandon, condamné à prendre la poussière du désert comme la relique d’un passé prospère qu’il est. Il en ressortira bien en fin de film, mais pour deux minutes et en toute gratuité : n’eut été pour balancer une scène d’effet spécial, la plus élaborée du film, Band aurait narrativement pu en faire l’économie. Crash and Burn ne parle pas de robots géants, et d’ailleurs il ne parle pas vraiment du monde post-apocalyptique non plus. Nous ne savons que le strict minimum sur comment l’humanité en est arrivée là, nous ne savons pas grand chose de ladite humanité, et la compagnie Unicom qui dirige le pays reste bien floue dans son mode de gouvernance. Voilà une dictature générique, qui aura pour seule justification de donner un alibi à Charles Band pour expliquer la présence d’un ennemi au sein de l’usine / studio télé qui est l’unique lieu où se déroule l’intrigue. A croire qu’il n’y avait pas un rond dans les caisses de la Full Moon, ou qu’en tous cas les pépettes sonnantes étaient placées ailleurs que dans le film pourtant tourné par le patron lui-même. Crash and Burn est en fait un film de couloirs, un peu à la façon de Alien : ses protagonistes déambulent dans les allées sombres de cette usine décrépite, bien souvent avec le risque d’y effectuer une mauvaise rencontre. Ce côté industriel caractérise ainsi l’identité visuelle d’un film dont on a connu le chef opérateur, Mac Ahlberg, bien plus exubérant du temps de l’Empire. De même, on a connu les productions Charles Band plus portées sur la fantaisie : si le présent film n’est pas totalement dénué d’humour, nous sommes bien loin des envolées grand guignols de Stuart Gordon, de l’absurde d’un Ted Nicolaou dans TerrorVision, sans parler des comédies bas du front façon Pleasure Planet ou Assault of the Killer Bimbos. Il n’y a là que des petites touches servant à démontrer que le réalisateur ne se prend pas non plus tout à fait au sérieux. Quant à l’exploitation pure et simple, là encore Band ralentit fortement la cadence : un bras coupé par-ci, un téton par-là, pas de quoi faire sensation. Les effets de maquillage ou les effets spéciaux sont malgré tout bien présents, et pas mal fichus du tout, mais sans jamais donner l’impression que le film n’aurait été pensé que pour leur tailler la part du lion. Juste de quoi lui permettre de s’inscrire dans un cadre science-fictionnel à base de futur post-apocalyptique, d’une gestion spatiale à la Alien et saupoudrée d’une bonne dose de Terminator, puisque le fameux tueur s’avérera être un androïde particulièrement tenace. Et pour faire bonne mesure, n’oublions pas la pincée de paranoïa façon The Thing (le coup du test sanguin à l’appui). Bref, vu à l’aune du passif de Charles Band, entre son côté un peu timoré et ses sources qui ne puisent que dans le très classique, Crash and Burn peut paraître bien tristoune. Un peu comme si l’immédiat post-Empire était un lendemain de cuite.
Mais ce serait faire peu de cas de ce que le film peut proposer par ailleurs. Sans aller jusqu’à dire qu’il s’agit d’un film centré sur ses personnages, ceux-ci pallient assez avantageusement à cette surprenante retenue. Déjà parce qu’à une ou deux unités près -un gros présentateur odieux voire une prostituée un peu cruche- ils évitent d’être des caricatures sur pattes. Ainsi Tyson, le héros, livreur de l’Unicom, aurait très bien pu n’être qu’un décalque de Mad Max ou encore un simili Chuck Norris. Mais il n’est que ce quidam pouvant commettre des erreurs de jugements ou se retrouver en fâcheuse posture. Pour l’épauler, la jeune Arren n’est pas la demoiselle en détresse ou à l’inverse la Ellen Ripley de service : malgré ses 17 ans (il s’agit d’ailleurs de la première apparition à l’écran de Megan Ward – qui avait en fait 21 ans-), elle n’est pas sans ressources ni fragilités. C’est une geekette émotive mais maîtrisant l’ordinateur clandestin de papy. Ce qui la rend complémentaire d’un Tyson davantage dans l’action. Charles Band gère plutôt bien leur relation, qui eu égard à l’âge de la demoiselle empêche toute romance ouverte, bien qu’une certaine tension amoureuse continue à se jouer lorsque la plus mature Parice entre en scène puis assez vite dans les draps de Tyson. Mais ce triangle amoureux demeure en arrière-plan, suggéré plus qu’abordé, car nous sommes face à des personnages qui ont le sens de la priorité (ce qui vaut aussi pour la seconde prostituée, avant tout en quête de respect). Et la priorité n’est pas le batifolage, mais bien de démasquer l’émissaire assassin de l’Unicom, si possible avant qu’il continue ses méfaits. Un film plus paresseux aurait pu se transformer en slasher, mais ces personnages, particulièrement actifs, contribuent à le tirer vers le haut et à en faire une sorte de techno-thriller devenant film d’action lorsque l’identité du coupable est révélée et qu’il s’agit de le mettre hors d’état de nuire. Les événements vont assez vite dans Crash and Burn, et c’est ce qui explique que le film ne tombe pas dans cette sorte de torpeur qui plombe maintes séries B cherchant à éviter le racolage au profit d’une plus grande attention pour un scénario pas forcément très bien ficelé, ni très bien monté. Avec la bouteille qu’ils ont, Charles Band et ses acolytes -Ted Nicolaou en tête, ici monteur mais par ailleurs intéressant réalisateur- évitent cet écueil et savent jouer l’équilibre : ni trop sérieux ni trop facétieux, ni trop bourrin ni trop mou, avec des protagonistes sachant faire vivre l’histoire sans donner trop d’importance à leurs propres personnes. Film modeste, Crash and Burn ne construit pas un univers post-apocalyptique, il se contente d’être une agréable série B et parvient sans trop de mal à séduire là où on ne l’attendait pas forcément. Charles Band et la Full Moon reprendront assez vite les vieilles habitudes, avec une réussite un peu moins fréquente que du temps de l’Empire et en finissant après plusieurs années par plonger dans la facilité (en témoignent les multiples séquelles des productions maison ou les farces ouvertement débiles type Evil Bong ou Gingerdead Man). Ne boudons donc pas le (petit) plaisir que procure Crash and Burn !
Ce genre de production fauchée, Ça marche quand tu es très jeune mais quand tu es adulte, tu peux pas t’empêcher de voir le manque de moyen, à quel point le film est vieux et dépassé.
Si je vois ce genre de film, je vais m’intéresser aux détails et beaucoup moins à l’histoire, qui apparaitrait comme prévisible.
Maintenant, les défauts d’un film m’interpelle plus que les qualités, ça peut me faire sortir d’un film. Je suis tombé sur un film asylum, Battledogs avec son invasion de loup-garous en plein jour dans un aéroport, mais ce qui m’avait interpellé c’était le casting qui était génial, Wes Studi ( Le Dernier des mohicans, Avatar), Dennis Haysbert (24 heures chrono), Bill Duke (Predator, Commando), Ernie Hudson (Sos Fantome, Oz) et Craig Sheffer, acteur que j’aime beaucoup. Complètement à l’opposé, le film faisait cheap avec un visuel de téléfilm, des effets spéciaux au rabais, et une mise en scène qui sentait le manque de moyen, et le manque de talents.
Battledogs est l’image des productions de Charles Band. A moins d’avoir une affection particulière, ces films ne donnent pas envie de les regarder à moins d’être avec des potes et de se marrer des défauts du film.
Effectivement, Crash and Burn reste globalement prévisible (encore qu’il y ait quelques coups de folie ponctuels), mais par contre il est densément mené et sait éviter tout effet de lassitude. Sur son créneau de Mad Max / The Thing / Terminator, il a franchement son petit charme : il n’a pas à proprement parler de défauts criants, même s’il est fauché, et du reste il tape juste au niveau du ton : il n’essaie pas de se faire passer pour un chef d’oeuvre d’inventivité, mais en évitant l’autodérision à outrance ou le gag éléphantesque. Bref, c’est effectivement le genre de séries B que j’apprécie beaucoup, et dont Charles Band s’était fait une spécialité avec son studio Empire et la Full Moon des débuts (bon, après, ça c’est gâté…)
J’ai vu Puppet Master 2, la suite qui est une préquel au premier Puppet Master réalisé par David Schmoeler, et ce qui m’a interpelé c’est la pauvreté de l’ensemble, des décors, de la direction artistique, et que ça avait été tourné en Europe, surtout qu’ils ont une caméra de là-bas et que le visuel est horrible, du niveau de la série Les Brigades du tigre.
A 10 ans, j’aurais été content de voir le film. Les défauts me seraient passé sous le nez, mais maintenant l’ayant vu il y a quelques mois, c’est plus la même chose.
Je le dis sans honte, j’aime maintenant regarder des grosses productions, j’adore Fast and Furious, les films avec The Rock, les Marvel, les films Dc etc….
Les réalisateurs que j’aimais à l’époque sont soit morts ( Georges Romero, Stuart Gordon, Wes Craven), soit trop vieux. De toute façon, ils ne sont plus d’actualité, et les choses ont changé depuis.
Avant, je voulais rattraper le plus de films des années 80/90. Maintenant, je n’ai plus la même motivation. Je regarde le prochain Spider Man ou Batman qui va sortir à l’écran, et je cherche des séries qui peuvent m’intéresser.
En voilà un triste constat, qui peut valoir aussi pour les grosses machines que tu évoques. Adolescent, j’adorais ces rendez-vous estivaux avec les blockbusters et puis je me suis lassé, faute d’un véritable renouvellement. Les moyens et la qualité des effets spéciaux ne font pas tout. Ces petites productions dont tu parles peuvent être pleines de charme et parcourues d’un véritable amour du cinéma dont les grosses machines, par leur souci constant de rentabilité, sont souvent dépourvues. C’est vrai que Crash and Burn fonctionne très bien pour une soirée entre potes mais sans rien révolutionner (ce qu’il ne cherche jamais à faire), il tient parfaitement la route. C’est amusant sans être parodique, parfois surprenant et surtout, divertissant.
PS : Puppet Master 2 n’est pas une préquelle, au contraire du troisième opus, tous deux chroniqués en ces lieux.
C’est vrai, mais le temps faisant, ils apparaissent démodé et cheap plus on avance dans le temps, fin 90 cela ne se voyait pas, mais maintenant même des grosses productions apparaissent dépassé, on revoit par exemple john Mcemonic, le monde du futur dans ce film apparait limite kitch, alors qu’a coté de cela un jurassic park ou un men in black viellit très bien.
Je suis sur que les films de 2009, vont paraitre dépassé, dans 10 ou 20 ans, et hormis quelque films, ils vont mal viellir, pour moi ce sera les transformers, et les fast and furious qui vont payer cela. Et je parle pas des petits films qui sortent en dtv