CinémaWestern

Bill Doolin le hors-la-loi – Lamont Johnson

Cattle Annie and Little Britches. 1981

Origine : États-Unis
Genre : Western
Réalisation : Lamont Johnson
Avec : Burt Lancaster, John Savage, Amanda Plummer, Diane Lane, Scott Glenn et Rod Steiger.

Au hasard de leurs pérégrinations dans l’Ouest sauvage, deux adolescentes croisent la route de Bill Doolin et sa bande de hors-la-loi. Fascinée depuis toujours par la lecture de leurs aventures, Annie fait tout son possible pour être acceptée, quand Jenny, plus discrète, se contente de suivre le mouvement. A force d’abnégation, elles parviennent à intégrer la bande, laquelle se trouve au bord de l’implosion. Bien que pris en chasse par le Marshall Tilghman, Bill Doolin ambitionne un dernier gros coup afin de rappeler à tous la grandeur de son gang.

Dix ans se sont écoulés entre la sortie de Dialogue de feu, le précédent western de Lamont Johnson où s’opposent Kirk Douglas et le chanteur Johnny Cash, et celle de Bill Doolin hors-la-loi. Une décennie qui aura vu le western perdre de sa superbe, en dépit de quelques pépites signées Sam Peckinpah (Pat Garrett et Billy le Kid) ou Clint Eastwood (Josey Wales, hors-la-loi). Au moment où Lamont Johnson démarre le tournage de son nouveau film, le genre tend à virer à la parodie à l’image de Un rabbin au Far West de Robert Aldrich et des Joyeux débuts de Butch Cassidy et le Kid de Richard Lester. A sa manière, Bill Doolin hors-la-loi s’inscrit à la croisée des chemins, se faisant l’écho d’une période finissante – l’action du film se déroule dans les années 1890 – mais sous couvert d’une légèreté peu raccord avec l’époque.

Le film reprend à son compte la véritable histoire de Bill Doolin et de son gang connu sous le nom de « Wild Bunch », dont le cinéma américain s’est souvent fait l’écho. On peut ainsi citer Far West 89 de Ray Enright en 1948, Face au châtiment de Gordon Douglas en 1949 ou encore A feu et à sang de Budd Boetticher en 1952. Dans le cas présent, Lamont Johnson a choisi de se concentrer sur les dernières heures du gang et sur leur improbable association avec deux adolescentes en rupture de ban. Il le fait de manière très romancée, expurgeant son film de quasiment toute violence au profit d’un ton bon enfant qui s’illustre dès les premières scènes. D’emblée, le gang nous est présenté sous son jour le plus médiocre et inoffensif au cours de l’attaque nocturne d’un train qui aboutit à une cruelle désillusion puisque en guise de toute richesse, la cargaison ne contient que des équipements de base-ball. Un échec qui ravive les tensions au sein d’un gang qui ne tient plus que par la personnalité de Bill Doolin, plus patriarche que meneur d’hommes. Ses hommes, il les tient à l’affect, lesquels se comportent comme ses fils, parfois bougons mais toujours derrière lui lorsque ça chauffe. A ce titre, les membres du gang souffrent d’une caractérisation des plus sommaires, révélant pour la plupart une forte absence de personnalité, écrasés qu’ils sont par les deux figures tutélaires que représentent les deux Bill, Doolin et Dalton. A la bonhomie rassurante de Bill Doolin Bill Dalton oppose un mutisme marmoréen. Au sein du gang, il serait l’oncle taiseux, un brin rabat-joie et qui ne se détend jamais vraiment. Meurtri par les diverses arrestations et/ou assassinats de ses frères, il reste constamment sur le qui-vive, toujours prêt à se carapater à la moindre irruption des autorités. Par sa méfiance érigée en mode de vie, il assure à lui seul le lien entre la réalité et la fiction, nous rappelant que le gang, activement recherché, se trouve proche de sa fin.

Pour autant, cette épée de Damoclès qui plane au-dessus de leur tête n’influe guère sur la tonalité du film. Certes, la présence du Marshall Tilghman – interpété par un Rod Steiger d’une sobriété à toute épreuve – et ses hommes se fait de plus en plus pressante mais celle-ci n’occasionne que de pâles fusillades à la tension d’autant plus inexistante qu’elles se concluent la plupart du temps par un improbable rebondissement. Visiblement peu à l’aise dès que l’action s’emballe, Lamont Johnson filme platement ces échauffourées, lesquelles retranscrivent bien mal la sauvagerie de l’époque. N’est pas Peckinpah qui veut ! Un Sam Peckinpah dont l’ombre plane avec insistance sur le film, notamment par ce choix d’inverser les rôles, reléguant les forces de l’ordre au rang d’antagoniste. Dans l’idée, Bill Doolin le hors-la-loi s’apparente à une Horde sauvage en mode mineur, un western crépusculaire qui préfère se terminer sur un sourire, laissant le soin à des annotations pré-générique de rappeler la triste réalité des faits. La faute à la présence des deux adolescentes au contact desquelles Bill Doolin et ses hommes se transforment en papas gâteaux. A aucun moment leur incorporation au groupe sera source d’équivoque, pas même à l’heure d’un bain réparateur pris en communauté où ces demoiselles, leur caleçon long collé à la peau, dévoilent une féminité à même de faire flancher le plus irréductible d’entre eux. Tout hors-la-loi qu’ils sont, ils savent rester gentleman et tant pis pour la bagatelle ! A la suite de ces jeunes filles, le western fin de siècle envisagé prend alors des allures de récit initiatique. L’impétueuse Annie trouvera l’amour dans les bras de Bittercreek Newcomb, un orphelin élevé par des indiens qui se distingue par son goût des formules absconses et une posture de beau ténébreux, laquelle aura raison de la virginité de la jeune fille, quand l’effacée Jenny saura faire montre de caractère au moment de venir porter secours à Bill Doolin. Un apprentissage dans la douleur puisque mineures aux yeux de la loi, les deux jeunes filles devront mettre entre parenthèses leur soif de liberté pour un séjour en maison de corrections, laissant Bill et son gang se perdre dans leur vie aventureuse.

En dépit de son casting trois étoiles où les vieilles gloires Burt Lancaster et Rod Steiger côtoient la nouvelle génération représentée par John Savage et sous le patronage desquels Diane Lane et surtout Amanda Plummer, dont c’est le premier rôle, entament leur carrière, Bill Doolin hors-la-loi n’a pas connu de rayonnement international. En France, le film est resté inédit en salles et a même été rebaptisé d’un titre farfelu – Winchester et longs jupons – lors d’une rare diffusion télévisée. Rien de véritablement scandaleux là-dedans tant le film s’avère peu digne d’intérêt. Dans le genre adolescents rêvant à de folles cavalcades dans l’ouest sauvage, on préférera l’autrement plus trépidant Du sang dans la poussière à ce “dernier western de Burt Lancaster” qui ne rend honneur ni au genre ni à l’acteur.

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