Les Maîtres de l’univers – Gary Goddard
Masters of the Universe. 1987Origine : États-Unis
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Sur la planète Eternia et grâce à un engin baptisé “la Clef”, l’infâme Skeletor (Frank Langella) est parvenu à s’emparer du château de Crâne-Gris, réduisant l’ancienne propriétaire des lieux au rang de prisonnière et lui volant petit à petit ses pouvoirs. Il ne reste que peu de temps avant qu’il n’obtienne tous les super-pouvoirs des Maîtres de l’Univers ! Mais ne vous affolez pas, Musclor (Dolph Lundrgen) et deux de ses amis ne vont pas le laisser faire : ayant réussi à libérer un inventeur nain, rouquin et velu du nom de Gwildor, constructeur de la Clef, ils vont vite trouver la parade. Gwildor détient en effet une seconde Clef, qui permet à nos gentils héros de voyager à travers le temps et l’espace. Ils décident ainsi d’aller livrer bataille à Skeletor, directement à Crâne-Gris. L’affrontement va mal se passer et toute notre bande d’être obligée de fuir au hasard via la Clef. Ils se retrouvent sur Terre, aux États-Unis, où la force des choses les amènera à impliquer dans leur histoire deux humains (dont une toute jeune Courteney Cox) et un flic. Mais les troupes de Skeletor sont à leurs trousses.
Avec les années 80 est venu le merchandising. Généralement, les jouets dérivent donc d’un film, d’un dessin animé, d’une bande dessinée… Avec Musclor, c’est tout l’inverse : il y eut d’abord les jouets Mattel, puis des comics (chez DC et Marvel, tout de même !), des dessins animés et donc le film de Goddard. C’est que les jouets des Maîtres de l’Univers firent sensation, à l’époque, parmi les chers têtes blondes (et je sais de quoi je parle). Il n’en suffisait pas plus pour décider le fameux duo Golam-Globus de la Cannon de produire un film, s’inspirant vaguement des histoires développées dans les comics ou les dessins animés. Mais, voyant peut-être un peu trop gros, les deux compères durent se résoudre en cours de route à faire de grosses concessions : déjà l’abandon de personnages importants, comme She-Ra (la sœur de Musclor) ou le sorcier Orko. Le budget trop réduit les obligea également à demander aux scénaristes de transposer leur histoire sur Terre, afin de réduire les coûts des décors. Ce ne fut pas encore assez, puisque, toujours pour des raisons financières, le tournage dût s’interrompre quelques temps afin de permettre de trouver l’argent manquant. Celui-ci trouvé, Gary Goddard pût enfin reprendre sa réalisation, avec pour consigne d’aller vite, très vite.
Qu’attendre donc d’un film réalisé dans de telles conditions ? Rien que le fait d’avoir été conçu pour exploiter le succès de jouets en plastique via les précédentes transpositions dans d’autres formats ne laissait augurer rien de bon. Et puis bien entendu, il fallait faire simple, histoire de ne pas perdre les têtes blondes en cours de route. Du coup, Les Maîtres de l’Univers prit l’allure d’un space opera mi-Flash Gordon mi-Guerre des Étoiles, dépourvu de toutes velléités d’originalité. D’un manichéisme outrancier, le film prend donc des héros parfaits, courageux, forts et généreux, leur ajoute deux terriens eux aussi mignons tout plein, et les oppose à une horde de méchants pas beaux, sournois, violents et impitoyables, dirigés par un Skeletor désireux de se transformer en Pol Pot universel pour imposer ses quatre volontés partout et à tout le monde. N’eut été pour l’extrême balisage de ce genre de film, qui ne laisse aucune place aux surprises, la situation aurait semblé désespéré, puisque les méchants sont légions tandis que les gentils sont six. On aurait pourtant bien voulu que les troupes de Skeletor l’emportent, puisqu’au final, les seuls intérêts du film leur sont dus. Il s’agit principalement de la gouaille de Skeletor, joué avec entrain par Frank Langella, et qui n’hésite pas à se moquer comme il se doit des grandes et pompeuses phrases auxquelles ont systématiquement recours ses ennemis (les dialogues étant généralement d’une banalité phénoménale). On leur doit également la majeure partie des décors fastueux de space opera que la bande à Musclor s’empresseront de faire s’évanouir en allant se réfugier sur Terre.
Enfin, le look général de nos méchants est bien plus “impressionnant” que ceux de nos gentils : plus exubérants, plus monstrueux (mention spéciale au quatuor de soldats spéciaux ainsi qu’à Meg Foster, la femme aux yeux d’un bleu délavé vue dans Invasion Los Angeles), plus tout. Malheureusement, le point de vue se concentrera sur les gentils, supprimant ainsi beaucoup des chances qu’avait le film d’atteindre un niveau de qualité acceptable. Nous nous retrouvons donc à suivre un Musclor complétement transparent (Dolph Lundgren à la ramasse), entouré par deux amis encore plus insignifiants que lui, par un couple d’adolescents classiques (lui est un gentil musicien, elle est une sentimentale) et par Gwildor, le faire-valoir comique qui est en réalité plus utile que tous ses compagnons, puisqu’il est le seul à être capable d’utiliser la fameuse “Clef”. D’ici à ce qu’il arrive à la faire fonctionner, grâce aux deux adolescents (auxquels le spectateur est censé s’identifier), le film ne sera que combats très mal foutus (avec montage très sec et approximation des cadrages), sous-intrigues miteuses (un flic qui erre comme une âme en peine durant tout le film, ne comprenant rien à rien) et dispensables visites au QG de Skeletor. Du remplissage pur et simple, qui plus est esthétiquement laid, avec pléthores de couleurs saturées. Évidemment, le film est très généreux en action, mais comment pourrait-on prendre plaisir à regarder quelque chose d’aussi mal fignolé, plombé en plus par d’énormes incohérences scénaristiques ?
Et Les Maîtres de l’Univers de se finir dans une séquence post-générique annonçant une séquelle qui ne verra jamais le jour, malgré un scénario déjà prévu et qui finit par être réécrit et utilisé dans cet autre chef d’œuvre qu’est Cyborg, avec Jean-Claude Van Damme.