Le Seigneur des anneaux – Peter Jackson
The Lord of the Rings. 2001, 2002, 2003.Origine : Etats-Unis / Nouvelle Zélande
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Fut un temps où, dans une certaine presse et dans certaines communautés affidées, la trilogie du Seigneur des anneaux était l’alpha et l’omega. Le magnum opus de l’heroic fantasy au cinéma bien sûr, mais pas seulement : l’héritier des grandes épopées d’antan à la Ben-Hur, la transposition monumentale d’un monument littéraire, le Star Wars d’une nouvelle ère… N’en jetez plus. Voilà en somme ce que certains attendaient dès la mise en chantier du projet, et tels furent bien souvent leurs jugements une fois les trois volets sortis. A l’instar du style adopté par Peter Jackson, le sens de la mesure n’était plus de mise. Un tel étalage de dithyrambes ne pouvait qu’agacer les sceptiques qui pour faire contrepoids ne manquèrent pas de riposter avec de féroces critiques. Tout ceci donna lieu dans lesdites communautés à d’interminables débats plus ou moins bon enfant qui ne prirent fin qu’avec le temps. Ainsi lorsque Jackson retourna aux écrits de Tolkien à l’occasion du Hobbit (projet dans lequel il ne semble pas s’être lancé avec le même enthousiasme), la vague était déjà en grande partie retombée. Ce qui en dit assez long sur la postérité du Seigneur des anneaux, qui si elle n’est bien entendu pas négligeable (reste une communauté fidèle, une tripotée de produits dérivés et un lignage cinématographique qui se fait sentir jusque dans la série Game of Thrones), ne prend clairement pas le même chemin que celle de Star Wars. Sans préjuger de ce que le futur en retiendra à plus long terme, le public pré-adolescent ou adolescent qui s’enticha de la trilogie née de La Guerre des étoiles et continue aujourd’hui à ne jurer que par l’univers de George Lucas, semble avoir largement fait défaut aux films de Jackson. Disons que Le Seigneur des anneaux semble avoir acquis ses adorateurs, mais pas avoir engendré une génération d’indécrottables fans à alimenter (ou à traire ?) durant 40 ans, sans même parler d’en dégotter de nouveaux a posteriori. Pourtant, mine de rien, le premier opus est sorti voilà pratiquement vingt ans. Laps de temps qui livre ses premières indications et qui permet désormais de juger Le Seigneur des anneaux à tête reposée, loin des débats enfiévrés du début des années 2000.
Commençons par préciser que ce texte porte sur les trois volets : La Communauté de l’anneau, Les Deux tours et Le Retour du roi. Car bien que sortis séparément (au même titre que les livres de Tolkien dont ils sont adaptés), les trois films ont bien été tournés bout à bout et racontent une seule histoire de manière linéaire. Ce qui du coup en fait une fausse trilogie dont la division répond avant tout à des impératifs commerciaux. Difficile de sortir en salle un film de 9h00, à la fois pour la patience du public et pour le porte-monnaie des exploitants. Et encore ! Les versions sorties ne contenaient pas les scènes qui furent réintégrées lors de la sortie des DVD versions longues. Une petite entourloupe qui, soyons beau joueur, a également eu le mérite de laisser à Peter Jackson et à son équipe le temps de fignoler la lourde post-production de chaque épisode, chacun sortant un an après le précédent. Notons entre parenthèses que la nature même des films, avec leurs multiples sous-intrigues, aurait aussi bien pu les faire déboucher sur le petit écran au format série, comme cela avait déjà été fait pour Le Parrain.
Au Troisième âge de la Terre du milieu, dans sa contrée funeste du Mordor, l’infâme Sauron regagne petit à petit ses forces alors que hommes, nains, elfes, hobbits et autres peuplades autrefois unies contre lui ne se côtoient plus guère. Certaines sont divisées, certaines sont en décrépitudes et d’autres encore envisagent à court terme de rejoindre la lointaine Valinor dont les sépare un océan. Au nombre des menaces qui pèsent sur le bas monde, l’anneau de pouvoir naguère forgé par Sauron et qui lui fut enlevé par Isildur à la fin de la guerre clôturant le Deuxième Age. Cet anneau est au cœur des préoccupations du puissant magicien Gandalf, qui sait bien que la ruine deviendrait certaine si Sauron venait à remettre la main dessus. Pour l’heure, le funeste objet se trouve dans la Comté, province occidentale où vit le peuple des Hobbits. C’est le plus fameux d’entre eux, Bilbon Sacquet, qui l’y détenait après l’avoir subtilisé au cours d’une aventure à une créature nommée Gollum, anciennement Sméagol. Mais, ayant récemment quitté la Comté, Bilbon a légué son bien et la malédiction qui l’entoure à son héritier Frodon. Lorsque les Nazgûls, lieutenants de Sauron, se mettent en route pour retrouver l’anneau, Gandalf enjoindra Frodon, accompagné de son ami Sam, à quitter la Comté pour gagner la cité elfique de Fondcombe où un concile des peuples libres devra décider d’une stratégie commune pour venir à bout de Sauron et l’empêcher de reconquérir l’anneau.
Grosso modo, l’intrigue du Seigneur des anneaux ressemble à cela. Ou du moins ses prémices simplifiés, car Peter Jackson s’est effectivement attaqué à un gros morceau en se penchant sur le trio de livres signé Tolkien. Ralph Bakshi avait fait de même en 1978 dans un film d’animation, mais l’ampleur des deux projets n’est pas comparable. Mû par une (sur)motivation évidente, Jackson s’est donné pour projet de coller au plus près de sa source, non seulement dans ses faits mais également dans son souffle et dans sa volonté de reproduire un univers qui va en fait bien au-delà de la guerre de l’anneau. La mythologie imaginée par Tolkien -et souvent remise en forme par son fils Christopher (qui édita Le Silmarillion, Les Contes et légendes inachevées, Les Enfants de Húrin etc etc…)- est très riche. Il n’est pas lieu ici de retracer l’historique de la Terre du milieu, des trois âges et de ses figures clefs, mais tous ces éléments contribuent à faire du Seigneur des anneaux l’héritier de tout un univers. Les lieux, les peuples, les personnes, les objets, tout cela n’est pas tombé du ciel et est le fruit d’une longue histoire ayant conduit aux événements s’apprêtant à être narrés. C’est ainsi que bien souvent la visite d’une contrée ou la rencontre d’un protagoniste soulève bien des questions. Exemple-type parmi tant d’autres : la Moria. Quelle est l’histoire de ses fondateurs, comment y ont-ils vécu, qu’est ce que le Balrog qu’ils y ont déterré ? Bien entendu, ni les livres ni les films n’exigent du spectateur de connaître les réponses sur le bout des doigts. D’autant que Tolkien lui-même n’avait pas forcément toujours couché par écrit ce qu’il en était ! Par contre ils lui font ressentir tout le poids du passé de la Terre du milieu, lui donnant dans le meilleur des cas envie d’entrer dans cet univers et de l’approfondir par ailleurs. Il aurait été commode pour Jackson de contourner cette incitation en ratiboisant à volonté, mais -et c’est tout à son honneur-, moyennant tout de même quelques ajustements, il a choisi de s’y confronter. Exercice qu’il réussit plutôt pas mal en lecteur assidu de Tolkien qu’il doit être. Fidèle en cela à l’auteur, il fait reposer le point de vue du film et donc l’identification des spectateurs sur Frodon et dans une moindre mesure sur les autres hobbits. Des personnages issus d’un peuple pacifique ne s’étant jamais trop mêlé aux affaires du monde et n’en connaissant pas beaucoup plus au moment de se lancer dans le grand bain (il en allait déjà de même avec Bilbon dans le roman -puis les films- Le Hobbit). C’est donc fort logiquement que, représentants en cela les spectateurs, ils apprennent ce passé de ce que veulent bien en dire les Aragorn, Gandalf, Elrond et Galadriel de tous poils. Tous des êtres quasi légendaires, en opposition aux hobbits, ces “semi-hommes” (comprendre : ces “petites gens” plus proches du spectateur que ne le sont les “hommes” du film, par trop évocateurs des héros antiques). D’où l’idée -bonne mais aussi un peu démago- de placer ces hobbits, incarnation du spectateur, au centre de l’histoire pour y assister et pour y participer. Dans le fond, la connaissance de la Terre du milieu et de son passé n’est pas cruciale. En revanche le fait de savoir qu’il existe et truffer le tout de traces écrites, orales, politiques ou sociétales contribuent véritablement à créer un univers crédible, dont la richesse ne se révélera que si le spectateur se donne la peine d’aller dénicher du bouquin. Ou de la séquelle, le cas échéant, mais il faudrait un sacré paquet de temps, d’argent et d’idée pour transposer le légendaire tolkienien à l’écran, grand ou petit (à l’heure où ces lignes sont écrites, une série télévisée estampillée Amazon semble plus ou moins se profiler avec cette idée en tête).
Ceci étant dit, la crédibilité de cet univers n’est pas forcément suffisante pour faire de bons films. En revanche, l’absence de crédibilité les aurait condamné à l’échec. Car derrière la Terre du milieu et l’aura dont jouissent les écrits de Tolkien se dresse le défi majeur de toute œuvre d’Heroic Fantasy : la capacité à “charmer” le spectateur avec un monde qui n’est pas le sien et qui n’est pas forcément régi par les mêmes règles. Ce qui ne veut pas dire que ce monde ne fasse pas écho avec le nôtre : en l’occurrence Le Seigneur des anneaux, écrit entre la fin des années 30 et le début des années 50, évoque furieusement la montée du nazisme conquérant dans une Allemagne revancharde puis la guerre avec son cortège de batailles, d’alliances, de trahisons, de manœuvres, etc… Pour réussir cette entreprise qui relève à la fois du goût pour le dépaysement et du goût pour la métaphore, il faut aussi que le spectateur se sente bien dans cet univers fictionnel. Ce qui passe par une conception topographique qui ne saurait être banale. Et c’est là qu’interviennent conjointement les décors de la Nouvelle-Zélande natale de Peter Jackson ainsi que les effets spéciaux numériques. Qu’il s’agisse des collines verdoyantes de la Comté, des infranchissables montagnes enneigées, des mystérieuses forêts elfiques, des plaines sauvages du Rohan, des plateaux désolés du Mordor, des cités diverses et variées ou de divers monuments bâtis (les tours de l’Isengard ou de Barad-dûr, les statues de l’Argonath, la forteresse de Minas Morgul…), tout se doit d’en imposer. Et pour se faire, Jackson n’y va pas avec le dos de la cuillère, quitte à verser dans la pompe en bonne et due forme : plans aériens mobiles, musique tonitruante, angles de caméra savamment choisis pour en mettre plein les yeux. Tout ceci est particulièrement prégnant lors de La Communauté de l’anneau, qui des trois films est celui qui se révèle le plus en mouvement. Avec leur lot de sièges, les deux autres le sont bien moins, et une fois passée la magnificence d’un lieu donné l’accoutumance et la focalisation sur l’intrigue viennent banaliser la splendeur, sans que celle-ci ne s’efface non plus. Car il faut bien l’admettre : les films sont dans leur ensemble splendides. Pas étonnant que la trilogie ait amené un regain de tourisme en Nouvelle-Zélande tant Jackson a su exploiter ses nombreux décors. Ou comment un office de tourisme bénéficie de moyens hollywoodiens ! Au risque éventuellement de décevoir lesdits touristes, qui ont peut-être négligé le fait que ces visions de cartes postales sont aussi le fruit de retouches numériques, d’enrichissements propres à la mythologie de la Terre du milieu si ce n’est de création ex nihilo. Mais enfin nous ne sommes pas dans l’adaptation filmée du “Guide du Routard” édition Nouvelle-Zélande. Tout ceci a été fait pour mieux faciliter l’adaptation et l’attachement du public au monde dans lequel il vient de débarquer. Sur ce point, Jackson a pleinement réussi son exercice et a su concrétiser l’ampleur et la richesse des terres du milieu, en s’appuyant il est vrai sur les belles illustrations signées John Howe, lequel fut embauché au titre de directeur artistique.
Attribuons lui également un satisfecit pour tout ce qui relève de l’imagerie maléfique. Non pas uniquement les lieux funestes, mais également les diverses créatures que sont les Nazgûls, les orcs, les uruk-hais, le Balrog et toute sa galerie de vilains en général. Ils sont tous répugnants, barbares, et / ou d’un grand charisme. Christopher Lee, qui sur ses vieux jours est devenu une coqueluche hollywoodienne (Le Seigneur des Anneaux, Le Hobbit, Star Wars, plusieurs Tim Burton… un peu plus et on le retrouvait aussi dans les Harry Potter) est en bonne compagnie. L’absence physique de Sauron et sa représentation par une prunelle de feu au sommet de Barad-dûr, est également une bonne idée et lui confère cette aura maléfique intangible qu’une incarnation physique poussée au delà du prologue aurait très certainement ramené à la banalité. Et puis disons-le : au moins tous ces vilains, même avec des motivations rudimentaires -conquérir le monde- soutenues par des vilénies de bon aloi (par exemple l’industrialisation de la nature vierge par Saroumane) ne nous agacent pas comme le font les “gentils” !
Car niveau personnages positifs, et c’est là que le bât blesse, nous ne sommes en revanche pas loin du catastrophique. Tout à sa volonté de faire dans la démesure et d’évoquer les épopées légendaires, Jackson sombre dans le caricatural le plus achevé, bien plus évocateur de Hollywood que des héros littéraires -qui sont eux-mêmes des fois un peu irritants, du moins dans leur version médiévale-. Bien qu’il ait été tourné par un néo-zélandais, en Nouvelle-Zélande et avec des techniciens néo-zélandais, Le Seigneur des anneaux est en effet la quintessence du cinéma Hollywoodien. Évitons les généralités, et disons que cela peut avoir du bon : la débauche de moyens permet certes de reconstituer tout cet univers aux constructions grandioses et aux paysages naturels à couper le souffle. En revanche, l’optique hollywoodienne est bien plus horripilante lorsqu’elle s’étend aux personnages. Passons sur les représentations physiques de chacun, sur lesquelles il n’y a rien à redire (pas même sur la pilosité podale des hobbits). Mais ne passons pas sur les caractérisations excessivement romanesques. La chevalerie, le sens du sacrifice, la félonie, la bravoure, la résistance à la tentation (incarnée par l’anneau), la sagesse. Tout l’attirail des principes archétypaux est lourdement illustré, bien souvent à travers un seul personnage. Vous voulez du chevaleresque ? Regardez le noble Aragorn. Du martyr ? Frodon. Du félon ? Saroumane ou Grima. Du résistant à la tentation ? Faramir. Celui qui y cède ? Boromir. On peut encore rajouter au gloubi-boulga d’autres lourdeurs, cette fois de nature plus émotionnelle : les tortures d’un amour impossible (Arwen et Aragorn), l’amitié jusqu’à la mort (Sam pour Frodon), l’amitié personnelle entre deux ressortissants de peuples antagonistes (le nain Gimli et l’elfe Legolas). La liste serait très longue et impacte même les protagonistes ou peuples en retrait (l’armée des morts en quête de rédemption, les pacifiques Ents en furie). Cette grandiloquence appliquée à des caractérisations stéréotypées va de pair mais se montre beaucoup plus dommageable que la grandiloquence de la mise en scène en cela qu’elle rend la trilogie extrêmement prévisible, et même en un sens superficielle. Pourtant, Jackson n’a pas foncé dans cette direction par choix de facilité. Il semble être véritablement honnête dans son goût pour ce genre d’outrance. Naguère il versait dans l’outrance grand-guignol avec la triplette Bad Taste / The Feebles / Brain Dead. Mais à Hollywood, il cède à son goût pour l’outrance héroïque à la façon médiévale, et il n’en démord pas tout du long. Même les personnages en apparence un peu plus ambigus finissent par retomber sur une morale attendue (la rédemption de Boromir, l’addiction de Gollum à l’anneau). A force d’être aussi sérieux si ce n’est pompeux, Jackson verse à l’occasion dans le ridicule. Comme par exemple avec la tentation éprouvée par Galadriel pour l’anneau, avec un effet spécial (une fois n’est pas coutume). Plus souvent, il franchit tout simplement les limites du bon goût et en fait des caisses avec tambours et trompettes (lorsque Aragorn ressort l’épée d’Isildur reforgée, le retour de Gandalf en version ” dentifrice blancheur éclatante”). Pour tenter de s’affranchir un peu de la solennité de rigueur, le réalisateur tente bien de faire parfois un peu d’humour. Sans grand succès, voire frôlant parfois le désastre. A ce titre, évoquons le cas du nain Gimli, qui à part peut-être lors de la séquence de la Moria, ne sert strictement à rien et reçoit donc la tâche de jouer au ressort comique. Outre le fait qu’il passe pour le quota ethnique de service (soi-disant que le reste de son peuple mènerait la guerre sur un autre front non présenté dans les films), ses saillies humoristiques -souvent balancées à contre-temps du récit à son partenaire vaguement plus utile Legolas- ne sont complétées que par des platitudes absolues. C’est ainsi qu’il rend éprouvante la déjà trop longue bataille du Gouffre de Helm. Plutôt que d’utiliser un tel personnage dont il ne sait que faire, Jackson n’aurait-il pas pu le supprimer, quitte à renier son engagement de fidélité à Tolkien ?
Mais parlons un peu de l’histoire en elle-même. Car toute cette pompe est mise au service d’une épopée (on ne peut nier que cela en soit une), où par définition doit régner le souffle épique. Pour cela, cette intrigue va donc bien au-delà du simple voyage de l’anneau du point A (la Comté) au point B (la montagne du Destin). Parallèlement à ce défi qui échoit à Frodon et à Sam viennent se greffer d’autres enjeux, dont la résolution en entraînent parfois encore d’autres. La taille de la Terre du milieu et la variété de peuples qui y vivent, alliés ou antagonistes, prépondérants ou marginaux, participent à cette richesse narrative qui constitue un autre challenge pour Peter Jackson. Comment réussir à gérer une intrigue aussi éclatée sans pourtant qu’aucune des composantes ne soit plus faiblarde qu’une autre ? Là dessus, Jackson se révèle bien moins habile que lorsqu’il s’agissait de donner une vision de la Terre du milieu. Ses films souffrent d’évidentes longueurs et il arrive que l’on ait franchement pas envie de se replonger dans tel ou tel axe narratif. A titre d’exemple, citons justement ce qui est a priori l’axe principal : l’anneau porté par Frodon avec l’aide désintéressée de Sam et celle, intéressée, de Gollum, qui les a rejoints après la dissolution de la Communauté. Une fois compris que Gollum cherche avant tout à servir ses propres intérêts (malgré quelques lueurs de rédemption sans grandes conséquences), que Frodon s’y laisse prendre par le double truchement de la compassion et de l’influence néfaste de son fardeau, que Sam sera toujours là pour lui même si son ami se fait de plus en plus irascible, Jackson n’avance plus et s’encroûte sur ce schéma. Il ne fait pendant un film et demi que montrer l’intensification de cet état de faits. Lourd, quand bien même quelques péripéties viennent de temps à autre le sortir de l’ornière. En tous cas, cet axe pèse bien peu de choses lorsqu’il vient s’intercaler entre les préparatifs de batailles dantesques. Ce qui ne veut pas dire que l’aventure Frodon / Sam soit toujours barbante ni les autres versants soient systématiquement prenants (mention spéciale aux batailles en elles-mêmes : carrément lassantes une fois accoutumé à l’ampleur avec laquelle elles sont mises en scène). Tout alterne de façon assez inconséquente. Il n’y a guère que La Communauté de l’anneau, qui encore une fois grâce à la simplicité relative (car tout de même, quelques flash-backs et autres syndromes du “et pendant ce temps-là” sont à signaler) réussit à être homogène. Mais encore faut-il aimer les grandes fresques dans le milieu de la fantasy, il va sans dire.
Dans le fond, le jugement à porter au Seigneur des anneaux est celui-ci : On ne peut pas reprocher à Jackson d’avoir pris ses films à la légère, et tous ses partis-pris, y compris l’abus de stéréotypes et de grandiloquence, sont issus de sa volonté propre. Il croit sincèrement en eux et cherche à communiquer ses émotions avec toute la force de frappe dont il dispose, espérant au passage orchestrer l’une des plus grandes histoires jamais contées. Derrière le déluge d’artifices et de ressorts hollywoodiens se cache -pas très bien- une naïveté quasiment infantile. Le Seigneur des anneaux est un mastodonte, ceci est certain. Si l’on admet qu’il ne s’agit pas (seulement) d’une machine à fric, il ne reste alors plus qu’à partager la vision du réalisateur. Et à partir de là, on pourra soit la trouver pharaonique avec tout un cortège d’épithètes grandioses, soit éléphantesque avec pléthore de maladresses et de boursouflures.
Enfin ! A chaque fois que je voyais des critiques sur ces 3 films, ce n’était que louanges dithyrambiques, quasiment intouchable. Pour moi c’est juste le souvenir d’un ennui où tout était prévisible et où les gentils étaient “chiantissement” bon à en vomir. On ne trouvait de l’intérêt que du coté des méchants mais comme ils étaient superbement sous exploités à l’image de Grima incarné par Brad Dourif dont j’aurais aimé connaitre un peu plus le personnage.
Il ne restait plus que les scènes de batailles qui étaient superbement réalisées mais dont je ne ressentais absolument rien car le body count était toujours en défaveurs des méchants alors que les gentils, à quelques exceptions, s’en sortaient indemnes.
Pour dire simplement, c’était chiant à regarder, et aucun des 3 films ne m’a fait changer d’avis la dessus. Il faudra attendre Le Hobbit pour que des critiques négatives apparaissent mais ce sera bien tard.
Effectivement, c’est amusant de voir à quel point le moindre bon gars inexpérimenté s’en sort indemne alors qu’il se trouve au milieu de hordes d’orcs hirsutes (d’ailleurs ce n’est pas propre au Seigneur des anneaux…)
Quoique vu le tintouin lacrymal que ça fait quand un “gentil” trépasse, c’est peut-être un mal pour un bien.
La plaie des grosses productions, des gentils qui n’ont jamais touché une arme, plus fort que des méchants pas beau, adeptes des massacres et autres vilénies.
Mais en toute franchise, ce qui me plait le plus dans cette critique, c’est que enfin, on critique ce film pour ce qu’il est alors que sur n’importe quel support, site, magazine, il est encensé alors que je trouvais cela injuste.
Pour faire simple, je me suis autant fais chier à le regarder passé la première heure, que lorsque je suis allé voir Le Réveil de la force, mais pour celui là, j’avais la chance d’avoir un gars assis à coté de moi qui puait des pieds, ça sentait le fromage moisi et la salle était remplie à ras bord, donc impossible de changer de place.