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Le Diamant du Nil – Lewis Teague

The Jewel of the Nile. 1985.

Origine : États-Unis
Genre : Romance mouvementée
Réalisation : Lewis Teague
Avec : Kathleen Turner, Michael Douglas, Danny De Vito, Spiros Focas, Avner Eisenberg.

Après 6 mois passés à effectuer le tour du monde, Joan Wilder commence à trouver le temps long, au contraire de Jack Colton jamais plus à l’aise que dans la farniente. Incapable d’achever son dernier roman, Joan accueille avec enthousiasme la proposition d’Omar, un leader politique en passe – selon ses dires – de pacifier son pays et qui lui propose de l’y accompagner afin de rédiger sa biographie. Sur place, la romancière doit se rendre à l’évidence, l’homme d’état prétendument respectable s’avère être un véritable tyran dont le souhait est de passer, avec son concours, pour un chef spirituel incontesté aux yeux d’un peuple qui le hait. Bien décidée à ne pas participer à cette mascarade, Joan tente d’échapper à sa prison dorée. Au cours de son entreprise, elle fait la rencontre du chef des opposants, mis sous les verrous par Omar, puis retrouve Jack Colton, parti à sa rescousse.

Devant l’engouement suscité par A la poursuite du diamant vert, Michael Douglas, en producteur avisé, entreprend la mise en chantier d’une séquelle dont la date de sortie est fixée avant même que le scénario ne soit rédigé. Pour le poste de réalisateur, il n’envisage personne d’autre que Robert Zemeckis sauf que ce dernier préfère se consacrer à son bébé – Retour vers le futur – plutôt que de refaire ce qu’il a déjà fait. Il n’aura pas toujours ces scrupules. Un malheur n’arrivant jamais seul, Kathleen Turner décline elle aussi la proposition. Cependant, un rappel vigoureux du studio quant à la teneur du contrat qu’elle avait signé à l’époque du premier film la ramène à de meilleurs sentiments. On parle alors d’une indemnité de 5 millions de $ à verser en faveur de la Fox. Ce problème réglé, demeure la question du réalisateur. Michael Douglas jette alors son dévolu sur Lewis Teague (L’Incroyable alligatorCujo), lequel accepte à condition que le scénario – écrit entre-temps – soit remanié. Les délais entre son engagement et le début du tournage étant très serrés, il est décidé d’un commun accord que le scénario sera retouché au jour le jour. Un choix osé pour une production de cette envergure – même si aujourd’hui, cela aurait tendance à devenir la norme en ce qui concerne les blockbusters, le calendrier primant sur la qualité – qui n’appelle pas à l’optimisme.

Alors que Joan et Jack se retrouvent en mauvaise posture, poings liés et suspendus au dessus du vide abyssal d’un puits sans fond, Omar leur détaille avec délice de quelle façon leur mort surviendra. Estomaqué par tant de perversité, Jack apprend alors de la bouche de Joan que leur bourreau tire son inspiration diabolique de ses propres romans. A l’instar du premier film, Le Diamant du Nil plonge son héroïne et son compagnon dans des aventures rocambolesques qu’elle aurait pu imaginer. A ceci près que dans le cas présent, Joan cherche à s’émanciper de sa condition de romancière à l’eau de rose. Son œuvre était jusque là le reflet de ses frustrations, lui servait de catharsis. Sauf que maintenant qu’elle a goûté au bonheur et que sa vie s’apparente à un conte de fées au fil d’un tour du monde sans fin dans les bras de son prince charmant, son imagination se tarit. Elle n’arrive plus à retrouver cette innocence qui donnait chair à ces récits et, surtout, n’idéalise plus l’homme de sa vie. Au contraire, elle sent poindre en elle des envies d’émancipation. Le film s’ouvre sur l’une de ses rêveries – en fait son roman en cours – un récit de pirates où son mariage en mer est interrompu par l’assaut de flibustiers contre lesquels Jack se battra vaillamment. Si ce dernier reste à ses yeux ce preux chevalier toujours prêt à braver le danger pour elle, elle n’a pour autant plus envie de le suivre les yeux fermés. Elle veut avoir voix au chapitre et décider par elle-même. Son choix de suivre Omar (personnage baptisé ainsi en guise de clin d’œil à Omar Sharif, acteur d’abord envisagé pour le rôle) répond à ce besoin. En outre, se voir offrir la possibilité de rédiger la biographie d’un futur grand homme d’état en impose davantage que de continuer à empiler les romans de gare. Joan n’en demeure pas moins d’une grande naïveté à l’égard de son hôte, même si à la moindre occasion le scénario s’ingénie à mettre à mal l’image de respectabilité qu’il se donne. Caricatural jusque dans ses excès, Omar se révèle un méchant de pacotille. Un antagonisme de circonstance dont la chute programmée relève de la simple péripétie au sein d’un récit qui ne vise qu’un seul but : rabibocher Joan et Jack.

Toute l’intrigue se retrouve assujettie à cette volonté, de l’utilisation du folklore local (Joan participant à la danse nuptiale d’une tribu devant un Jack Colton subjugué) jusqu’au personnage du saint homme dont la présence ne semble justifiée que par son rôle lors du mariage célébré pour nos deux tourtereaux. Il n’est autre que le diamant du Nil du titre. Lorsque Jack reçoit cette information, celle-ci agit comme un révélateur. La quête perpétuelle de richesses s’avère futile au contraire de l’Amour. Cette aventure vise à lui faire prendre conscience de certaines priorités et, à l’échelle des deux membres du couple, à raviver la petite flamme du bonheur entre eux. Dans ce contexte, l’aventure en elle-même ne sert que de pis-aller. Le morceau de bravoure du film, tourné dans les studios de La Victorine à Nice, repose sur l’utilisation d’un avion à réaction par nos héros pour fuir le palais de l’infâme tyran. Ni l’un ni l’autre ne sachant piloter, la fuite s’effectue au sol. Pour cocasse qu’elle soit, ladite scène traîne en longueur. En l’absence d’un scénario digne de ce nom, il faut bien meubler avec le spectaculaire ! De manière générale, Lewis Teague s’avère peu à l’aise avec les scènes d’action, que ce soit les séquences de bataille lors desquelles officie une troupe de cirque (les fidèles du saint homme) ou la scène du train. A la poursuite du diamant vert pêchait déjà sur ce point mais avait l’excuse d’une certaine modestie. Alors qu’ici, c’est tout le contraire, on recherche le grand spectacle à tout prix mais sans une once de souffle épique. Alors Lewis Teague sort sa botte secrète, Ralph ! Ralph, c’est l’un des deux bandits qui coursaient Joan et Jack, convoitant lui aussi le diamant vert. Personnage insignifiant, il n’avait pas vocation à réapparaître dans cette suite si ce n’est par copinage. S’entendant bien avec le couple vedette, qu’il dirigera dans La Guerre des Rose, Danny De Vito reprend donc du service pour jouer les bouffons à forte coloration cartoon. Il intervient à intervalles réguliers, non pas pour relancer l’action (celle-ci est en guidage automatique) mais pour assurer le quota humoristique du film. Il s’avère néanmoins plus lourd que drôle mais obtient réparation pour tous ses efforts lors d’une conclusion placée sous le signe de l’optimisme à tout crin.

Lewis Teague avait accepté de mettre en scène Le Diamant du Nil dans l’espoir que les gros studios lui confient par la suite d’autres budgets confortables. Un bien mauvais calcul puisqu’il ne tournera plus rien pendant 4 ans et qu’il n’obtiendra jamais plus de tels budgets. Hollywood n’a de reconnaissance que pour ceux qui rapportent de l’argent et non pas pour les bonnes âmes capables de partir au casse-pipe en toute connaissance de cause.

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