CinémaHorreur

Le Cauchemar de Freddy – Renny Harlin

cauchemardefreddy

A Nightmare on Elm Street 4 : The Dream Master. 1988.

Origine : États-Unis
Genre : Horreur
Réalisation : Renny Harlin
Avec : Lisa Wilcox, Tuesday Knight, Danny Hassel, Robert Englund…

Suite au carton des Griffes du cauchemar, Freddy a désormais accédé au rang d’icône du cinéma horrifique, dépassant en popularité les Jason Voorhees, Michael Myers ou autre Leatherface, et, la mode étant ce qu’elle était à l’époque, les différentes exploitations du mythe proliféraient. Deux novelisations des films Freddy avaient déjà été faites, une série télévisée était alors en gestation, et peu de temps après son quatrième film, Freddy allait s’immiscer dans le monde des comics et dans celui des jeux vidéos. Même la major Paramount était jalouse, elle qui avait sur les bras un Jason Voorhees en sérieuse perte de vitesse et qui proposa à New Line de monter un affrontement à l’écran entre le masqué de Crystal Lake et le brûlé d’Elm Street. Mais que nenni : Freddy était plus que jamais rentable et Robert Shaye ne comptait certainement pas utiliser sa poule aux oeufs d’or pour aider à remettre la concurrence sur le droit chemin commercial. Freddy allait donc connaître un quatrième épisode rien qu’à lui, avec comme d’habitude depuis le second volet un réalisateur débutant derrière la caméra (le finlandais Renny Harlin, dont la filmographie américaine se limitait alors à Prison, produit par Charles Band au sein de la firme indépendante Empire) et avec un scénariste tout aussi inexpérimenté : Brian Helgeland, qui allait plus tard se faire un nom auprès de Clint Eastwood pour Créance de sang et pour Mystic River, et dont le scénario fut préféré par Renny Harlin à celui initialement prévu, signé William Kotzwinkle, jugé trop sombre par le réalisateur. Car Renny Harlin, certainement poussé par sa productrice Rachel Talalay, épaulée par Robert Shaye, décida de pousser encore plus loin le concept tracé par Les Griffes du cauchemar et d’insister encore davantage sur l’humour et sur le côté spectaculaire des cauchemars.

Le Cauchemar de Freddy (notons au passage le flagrant manque d’idées des titres français, une constante dans la saga) embraye sur la fin des Griffes du cauchemar. Kristen (qui n’est plus jouée par Patricia Arquette mais par Tuesday Knight, qui pousse la chansonnette ouvrant le film), Joey et Kincaid sont les derniers survivants des enfants d’Elm Street, et croient vivre désormais une vie paisible. Mais évidemment, dès les dix premières minutes, la triste réalité s’imposera à eux : Freddy est revenu ! Il ne mettra pas beaucoup de temps à occire ces trois derniers survivants. Fin de l’histoire ? Non, car Freddy souhaite continuer ses méfaits sur tous les enfants de Springwood, et il a préalablement pris soin d’inciter Kristen à inviter Alice (Lisa Wilcox), une de ses amies, dans son ultime cauchemar. La pauvre Alice n’y comprend au début pas grand chose, mais elle apprendra vite : en mourant, Kristen lui a légué son pouvoir d’inviter des gens dans ses rêves. Ce talent non maîtrisé conjugé à l’endormissement des amis d’Alice fera que Freddy tue désormais son monde en utilisant la pauvre Alice.

Voilà pour l’intrigue, qui comme ça paraît certes assez confuse et fait songer à l’histoire de possession de La Revanche de Freddy, mais qui à l’écran se révèle d’une limpidité proche du simplisme. Harlin tente pourtant bien d’apporter un peu d’originalité à son film, mais pour cela il utilise des éléments assez stupides. En premier lieu, la faculté qu’a Alice d’inviter ses amis dans ses rêves (vestige des guerriers du rêves du précédent film), mais aussi celle d’obtenir à chaque mort la puissance ou le trait de caractère principal qui caractérisait chacun de ses potes. Ainsi, du début du film où elle est une frêle et timide jeune fille, elle deviendra par la suite experte en arts martiaux (comme son frère), et aura recours à de la technologie de bazar (construite par une amie intellectuelle) tout en revêtant un bracelet punk (en cuir et en piques) ayant appartenu à une autre amie, celle-ci plutôt rebelle. Tout ceci illustre bien entendu la volonté des victimes de Freddy de se venger de leur bourreau par le biais d’Alice. C’est pour le moins débile, surtout que les personnages, de leur vivant, n’ont pas brillé par leur crédibilité. Il y aura même le petit ami d’Alice, qui ne mourra pas, mais qui ne servira strictement à rien, traversant le film comme une ombre. Autre originalité : celle de la théorie du “maître du rêve”, pronée dès le début par Alice, qui est persuadée qu’un rêveur peut rester maître de ses songes. Mais cette idée, somme toute plutôt bien vue, sera délaissée par Renny Harlin, qui n’allait pas s’embarasser d’un autre élément à gérer alors qu’il essayait aussi dans le même temps de donner corps à un simple détail mentionné par Les Griffes du cauchemar : la croissance de la force de Freddy par le biais des âmes de ses victimes, avalées lors des meurtres et apparaissant désormais sous forme de petits visages et de poitrines (dont celle de Linnea Quigley) enfermés dans le corps du père Krueger. La fin du film devient donc évidente sitôt que ces élements sont présentés, et on s’attendra à voir un duel au sommet entre Alice et Freddy. Ca sera bien le cas (encore que le dénouement sera d’une facilité déconcertante), et Harlin ira même jusqu’à glisser une référence aux westerns de Sergio Leone dans sa mise en scène.

Le Cauchemar de Freddy est donc un film bête, très bête. Mais c’est aussi et heureusement un film méchant : si Harlin manie l’ironie et le cynisme avec moins de talent que ne le faisait Chuck Russell, il n’est pas sans préserver l’idée de meurtres venant humilier les adolescents sur la route de Freddy. Au menu cette fois-ci : une pucelle asmathique se faisant rouler un patin par Freddy jusqu’à s’en asphyxier, un libidineux (le même que dans le film précédent, qui avait survécu par miracle) se faisant noyer dans son water bed par une fausse playmate, un karateka chichiteux échouant à vaincre ce gros bourrin de Freddy, une jeune fille croyant rêver d’une plage tropicale pour se retrouver face à un aileron de requin composé des griffes d’acier, ou encore une entomophobe perdant ses membres pour se transformer en cafard (influence de La Mouche version Cronenberg, certainement). Les meurtres et cauchemars sont donc encore une fois forts imaginatifs et très bien conçus, les spécialistes des effets spéciaux (Kevin Yagher, Screaming Mad George, Steven Johnson, Howard Berger, Christopher Biggs… du beau linge) accomplissant une fois de plus des miracles avec un budget réduit de 5 millions de dollars, tout comme le fait également le directeur photo, qui fait du Cauchemar de Freddy un film bariolé au look assez rétro. Des séquences comme celle de la transformation en cafard, celle de la salle de cinéma ou même celle de la résurrection de Freddy (un chien pissant des flammes dans le cimetière de voitures où Freddy s’était fait enterrer dans le film précédent) suffisent à écraser bien des concurrents du genre horrifique. La caméra d’Harlin se fait elle-même inspirée pour des mouvements en spirales ou en hauteur venant accroître un peu plus le côté surréaliste de l’ensemble. Alors oui, Le Cauchemar de Freddy montre des personnages idiots, oui Freddy n’avait jamais autant été aussi loin de celui qu’il fut dans Les Griffes de la nuit, oui il n’innove que par des stupidités, mais malgré tout, il réussit largement à créer son petit effet et à être appréciable.

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