Destination finale 2 – David R. Ellis
Final Destination 2. 2003.Origine : États-Unis
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La Mort va encore devoir cravacher pour rattraper le temps perdu. La faute à Kimberly Corman dont les visions l’ont prémunie, elle et sept autres automobilistes, d’un effroyable accident de la route. Se sentant désormais investie d’une mission, la jeune femme sollicite l’aide de Clear, la dernière rescapée du vol 180, et avec son aide et celle de l’agent de police Thomas Burke, tente d’organiser la protection des prochaines victimes. Mais déjouer les plans de la Mort s’avère toujours aussi périlleux.
On a connu Robert Shaye plus réactif. Alors qu’il lui avait fallu moins d’un an pour lancer sur les écrans une suite aux Griffes de la nuit, 3 ans se sont écoulés entre Destination finale et Destination finale 2. Dans l’intervalle, James Wong a réalisé The One avec Jet Li en vedette en 2001, tandis que son compère Glen Morgan est passé à la réalisation avec Willard en 2003. Ils passent donc leur tour pour cette séquelle, laquelle échoit à David R. Ellis, coordinateur des cascades sur une pléthore de films, et qui compte alors une seule réalisation à son actif – déjà une suite – L’Incroyable voyage II : A San Francisco, un film pour enfants autour d’un trio composé de deux chiens et d’un chat. Sur le papier, rien qui le prédisposait à être l’homme de la situation.
Suivant la maxime « rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme », les scénaristes de Destination finale 2 reprennent des éléments du premier film abandonnés sur la table de montage afin d’offrir des moyens d’action aux héros. Une probable échappatoire communiquée dans un grand élan théâtral par cet étrange croque-mort, toujours interprété par Tony Todd, lors d’une scène symptomatique de la surenchère inhérente à toute suite qui se respecte. Celle-ci recycle les mêmes éléments que son pendant du premier film (exposition du cadavre de la première victime post-accident, propos du croque-mort qui oscillent entre le sibyllin et l’évident) mais les enveloppe dans un environnement voulu davantage hors du temps, une sorte de crypte gothique noyée sous une brume persistante et dont l’âtre du four crématoire, rougeoyant et éructant, évoque une porte des Enfers. Le côté pièce-rapportée est encore plus prégnant que dans le premier film. Toujours plus omniscient, le croque-mort ne sert qu’à enfoncer des portes ouvertes et à expliciter des points de détail que l’héroïne aurait très bien pu deviner toute seule, d’autant qu’elle bénéficie de la présence de Clear, l’ultime rescapée du vol 180 après qu’Alex ait succombé à la chute d’une brique (l’acteur n’ayant pas repris du service, c’est au détour d’une coupure de presse que nous en serons informés) afin d’anticiper le nouveau plan de la Mort. A croire que les scénaristes craignaient de perdre l’attention des spectateurs alors qu’ils ne sont venus que pour une chose : des morts cocasses.
Et sur ce point-là, Destination finale 2 se distingue aisément de son aîné. Le ton est donné dès la prémonition introductive, un spectaculaire accident de la route agrémenté de quelques envolées gores. Du gore tout public dont les effets sont la plupart du temps laissés au soin de la technologie numérique pour le meilleur (un corps cisaillé par du fil de fer barbelé) et pour le pire (une échelle de secours qui s’enfonce dans le crâne d’un chanceux aux jeux). Dans l’ensemble, les scénaristes font preuve d’une belle inventivité dans les mises à mort, n’hésitant pas à jouer la carte du suspense à rallonge (l’adolescent Tim chez le dentiste, Eugene sur son lit d’hôpital) et surtout de l’humour noir dont l’ultime scène en fournit une belle illustration. Le film en devient particulièrement ludique et surtout ne s’éparpille pas avec une sous-intrigue inutile comme l’était la présence des agents du FBI dans le premier film autour de la culpabilité supposée d’Alex. Ici, l’intrigue va droit à l’essentiel, ménageant parfaitement temps morts et temps faibles. Elle se permet même de développer malicieusement le concept initial au détour d’une conversation entre les rescapés d’où il ressort qu’ils ont tous échappé au moins une fois à la Mort grâce aux décès successifs des miraculés du vol 180. A ce titre, Destination finale 2 s’impose comme une vraie suite, l’histoire se déroulant un an jour pour jour après l’explosion du vol 180. La Mort n’a pas seulement le sens de la fête et des commémorations mais aussi celui de la mise en scène. A la fatalité, elle préfère un machiavélisme teinté de mauvaise foi. Ainsi interviendra t-elle pour empêcher l’une de ses victimes de se donner la mort, refusant dans ce domaine tout libre arbitre. Imbue d’elle-même, la Mort ne rate jamais une occasion de rappeler aux simples mortels qu’ils n’ont que peu voix au chapitre et que de toute manière, c’est elle qui aura le dernier mot. Et le film de se clore comme de juste par une victoire à la Pyrrhus, un bref sursis visant à laisser le spectateur sur une note optimiste qui ne saurait masquer bien longtemps l’inéluctable.
Nonobstant un climax décevant et mollasson à base d’ellipses sauvages, ce Destination finale 2 propose un sympathique spectacle. Le film sait faire preuve d’un sadisme amusé et savamment dosé qui ne s’embarrasse guère de la vraisemblance. Un jeu s’instaure dès lors entre le réalisateur et les spectateurs, le premier cherchant à déjouer les attentes des seconds au prix d’une belle inventivité. Le pari est amplement gagné. Bénéficiant d’un rythme soutenu, Destination finale 2 s’avère une bonne surprise, un film d’horreur sans prétention à la réjouissante efficacité.