Buffy, tueuse de vampires – Fran Rubel Kuzui
Buffy the vampire slayer. 1992Origine : Etats-Unis
|
Buffy (Kristy Swanson), jeune lycéenne insouciante, est approchée par le vieux Merrick (Donald Sutherland) sous prétexte qu’elle a été élue par la destinée pour être la nouvelle “terreur”. Ce titre lui donne la lourde tâche de combattre les vampires, tout comme ses devancières l’ont fait à travers les siècles. Sa mission, si toutefois elle l’accepte, est présentement de détruire l’infâme Lothos (Rutger Hauer).
Comme chacun sait, avant d’être une série télévisée, Buffy fut une immonde comédie horrifique destinée aux adolescents tendance Teen Wolf. Le genre de choses plombantes, que les détracteurs fair play de la série télévisée n’osent même pas mentionner, tout simplement pour ne pas taper sous la ceinture et réveiller la colère des très susceptibles fans de Buffy. Arguant que son scénario aurait été remanié par la réalisatrice Fran Rubel Kuzui, Joss Whedon affirme que sa création devait être beaucoup plus noire, et que la série lui a permis de donner une version définitive de ce qu’a toujours été son intention. D’ailleurs, dit-il, le scénario du film fut très bien reçu, avant que la vilaine réalisatrice ne décide de parier sur la comédie grasse. Admettons. Le scénariste s’en tire à bon compte. En revanche, à l’instar de George Clooney et de ses tomates tueuses, plusieurs stars voient leur filmographie irrémédiablement entachée par leurs débuts catastrophiques dans Buffy, tueuse de vampires. Commençons par Hilary Swank, qui avant de remporter des Oscars pour Boys don’t cry et pour Million Dollar Baby incarnait la leader d’un groupe de pouffiasses snobinardes amies de Buffy. Continuons avec David Arquette, lamentable vampire à la “rebel attitude” avant de devenir l’imbécile au grand cœur des trois Scream. Le cas Luke Perry est un peu moins criant : comment un acteur s’étant fait connaître avec la série Beverly Hills pourrait-il ternir sa réputation ? Enfin, comble du comble, Ben Affleck lui-même fait une fugace apparition ! Les mauvaises langues diront que ses cinq secondes à l’écran, sans qu’il ne prononce un mot, sont les meilleures de sa carrière…
Les anciens ne sont pas non plus épargnés : Donald Sutherland vient se perdre en mentor de Buffy (c’est encore le personnage le moins honteux du film) et Rutger Hauer incarne un Lothos préfigurant les désastreux Dracula de Dracula 2001 et de Van Helsing. Il est secondé par Paul Rubens, qui en jouant le sidekick de Lothos ne parvient pas à se remettre du scandale sexuel ayant mit fin aux lauriers de son Pee Wee.
La première apparition de Buffy à l’écran se pose donc en source de gêne pour beaucoup de monde. Mais certainement pas pour Kristy Swanson, dont la carrière n’a jamais été au top. Elle n’a donc pas à être honteuse de son incapacité à combattre avec violence. Lamentablement mous, ses coups de tatanes font passer Sarah Michelle Gellar pour la nouvelle Bruce Lee. Quelques pirouettes totalement superflues osent malgré tout faire de l’esbroufe… En vain. Les scènes d’action restent d’une platitude hors du commun. Elles s’insèrent donc avec bonheur dans un film qui, du début à la fin, fait preuve d’une remarquable constance dans l’insignifiance. Aucune once d’intensité dramatique ici, seulement du bâclage. Totalement anonyme, la photographie ne peut même pas se targuer de prolonger le style des années 80, là où l’intrigue aurait pourtant dû la conduire. Loin de rivaliser avec leurs collègues de Vampire…vous avez dit vampires ?, les vampires comiques de Buffy font office de compromis entre les monstres du clip Thriller de Michael Jackson (en moins bien maquillés) et les adolescents crétins écumant les rives de Crystal Lake dans les Vendredi 13. Rutger Hauer vient incarner le maître des ténèbres avec un je m’en foutisme flagrant, approuvé par la réalisatrice (il n’y a qu’à voir la légèreté avec laquelle son personnage est détruit après quatre scènes à l’écran). A ses côtés, Paul Reubens en fait des tonnes, volant la vedette à son “chef”. La seule scène un tant soit peu amusante lui est imputable.
Dans l’insanité ambiante subsiste malgré tout ce qui sera le thème de prédilection de la série télévisée : la vie adolescente. En se mettant dans la peau de la “terreur”, Buffy franchit une étape : de la poufiasse méprisante hautement caricaturale qu’elle était au début, elle devient une jeune femme consciente des grandes responsabilités qui pèsent sur ses épaules. Bienvenue dans le monde des adultes, Buffy. Sa solitude n’en est que plus grande : toutes ses amies en sont restées aux gamineries et la rejettent sans appel. Heureusement, en devenant plus mature, Buffy s’est attachée à l’humanisme du vieux Merrick et a appris à ne plus se limiter aux apparences. Ce qui lui permet de trouver un petit copain en la personne de Oliver (Luke Perry), un zonard romantique ô combien courageux. Voilà ce que Joss Whedon projetait de dire à l’humanité. En vingt minutes (le temps qu’il lui faut avant d’accepter sa mission), la personnalité de Buffy a déjà basculé et la thématique si chère à Whedon a déjà exposé tout ce qu’elle avait à exposer. Les bêtises peuvent donc reprendre.
Maintenant, un mot sur l’incroyable doublage français, réussissant l’exploit d’abrutir davantage un film déjà pitoyable. Buffy devient ici Bichette et son ami Oliver devient… Marcel. Les amateurs de la série télévisée prétendent souvent que le doublage sabote le travail de Whedon. Pour le coup, ils peuvent remercier M6, qui eut également la bonne idée de titrer la série autrement que le film, à l’origine distribué sous le titre Bichette la terreur.