Manuel de survie à l’apocalypse zombie – Christopher Landon
A cause de la maladresse et de la trop grande curiosité de l’agent d’entretien d’un laboratoire, une petite bourgade américaine est en proie à une apocalypse zombie. L’armée a pu évacuer la majeure partie de la population sauf qu’elle ne pouvait prévoir qu’une fête clandestine se déroule au même moment dans un lieu tenu secret. Heureusement, trois amis – tous scouts – aidés par la serveuse d’un club de strip-tease, vont tenter de secourir les fêtards.
Cela aura mis le temps mais les morts-vivants ont à leur tour fini par servir de prétexte à des pochades adolescentes, bien loin des préoccupations sociales de George Romero. Manuel de survie à l’apocalypse zombie s’inscrit ainsi dans la droite lignée de Bienvenue à Zombieland où l’invasion de morts-vivants compte moins que les atermoiements d’une poignée d’adolescents en prise avec leurs hormones en ébullition. Scénariste des épisodes 2, 3 et 4 de la lucrative série des Paranormal Activity puis récompensé par le poste de réalisateur pour Paranormal Activity : The Marked Ones – le 5e opus – Christopher Landon ne nourrit d’autre but que d’amuser la galerie, prenant un malin plaisir à désamorcer tout le potentiel horrifique de l’intrigue. Et la victime principale de ce choix n’est autre que la figure même du mort-vivant, ici proprement ridiculisée à la moindre occasion, réduite en somme à un rôle de faire-valoir.
En prenant pour personnages principaux des scouts – lesquels par définition présentent l’avantage d’être toujours prêts – le réalisateur organise la revanche des laissés pour compte. Ce qui apparaissait durant l’enfance de Ben, Carter et Augie comme le meilleur moyen de se faire des amis tout en apprenant à se débrouiller à la dure (maîtrise de divers nœuds, faire du feu, la pêche, …) commence, à l’heure où ils s’apprêtent à entrer au lycée, à leur courir légèrement sur le haricot. En tout cas en ce qui concerne Ben et Carter dont les hormones en feu s’accommodent mal d’un uniforme quelque peu infantilisant. C’est d’ailleurs dans le fol espoir de participer à une fête en compagnie des plus grands qu’ils vont commettre l’irréparable : délaisser leur ami le soir de sa consécration. A leurs yeux, l’emmener avec eux serait rédhibitoire. En somme, ils considèrent Augie comme un boulet, sympa à l’âge de 8-12 ans, beaucoup moins arrivé à l’âge de 16 ans. Ce drame en culottes courtes a vocation à énoncer les forces en présence. Au sein du trio, Ben est le portrait craché du gentil garçon déchiré entre sa bonne conscience et sa libido naissante, toujours à vouloir ménager la chèvre et le chou. Exprimé de manière plus claire, il campe le héros dans toute sa fadeur dont les actes découlent du plus beau des sentiments, l’amour. A l’inverse, Carter est davantage dans le plaisir de l’instant, lequel va de pair avec un soupçon d’égoïsme. Augie est bien gentil mais il ne fait pas le poids face à la possibilité d’emballer la mignonne Chloé. Il campe l’adolescent typique des comédies pour teenagers, celui qui pense avec sa bite en toutes circonstances au point de palper l’opulente poitrine d’une policière zombifiée au mépris du danger. Il ne considère les femmes que sous le prisme du physique, souhaitant uniquement tirer son coup ou, à défaut de mieux, se rincer l’œil à bon compte. En une sorte de retour de bâton visant à soigner son machisme naissant, le film lui réserve son lot de péripéties humiliantes à coup de faciales symboliques (il se prend sans cesse des gerbes d’hémoglobine, parfois accompagnées de morceaux de chair, dans la figure) et se fait littéralement bouffer le cul par sa voisine acariâtre, dont les morsures sont rendues inoffensives par la perte du dentier. Quant à Augie, il représente l’éternel enfant, celui qui a trouvé son équilibre grâce au scoutisme et qui ne voit pas de raison de changer quoi que ce soit à son quotidien. Pour lui, l’amitié compte plus que tout et il saura le rappeler au moment opportun à grand renfort de violonades. A ce trio s’ajoute la présence non négligeable de Denise Russo. Par son habileté à manier le fusil à pompe et à ne pas se laisser marcher sur les pieds, elle s’impose en femme à poigne prompte à remettre les trois scouts sur le droit chemin. Sauf que Christopher Landon choisit de la reléguer au rang de fantasme ambulant. Vêtue d’un juste-au-corps blanc et d’un short ultra court, Denise promène son physique de mannequin sous le nez de nos jeunes érotomanes. Et une fois sa tâche accomplie – assurer la caution sexy du film tout en contribuant à l’émancipation de Ben par un dévouement sans faille – elle se retrouve écartée de l’emballage final sous un fallacieux prétexte. L’héroïcité des scouts ne peut souffrir sa présence par trop encombrante.
Car au final, l’éradication de cet apocalypse zombie doit rester une histoire d’hommes. Le climax se résume à aller chercher la jolie demoiselle en détresse (Kandall, la sœur de Carter et l’amour secret de Ben), laquelle aura entre-temps eu la preuve de son erreur face au comportement peu amène de son petit copain. Une fois délestée de ce poids, elle n’a plus qu’à attendre l’arrivée de son prince charmant et de ses acolytes. L’occasion pour le réalisateur d’organiser une orgie gore comme une lointaine réminiscence du final dantesque de Braindead où les effets numériques remplacent les excellents maquillages d’antan. Le tout emballé de manière plutôt médiocre dans un maelström d’images stroboscopiques (faut-il le rappeler, les personnages interviennent au beau milieu d’une fête) dont la laideur donne vite envie de rapidement passer à la scène suivante. Dans le contexte assez limité de ce type de film, Christopher Landon joue donc la carte du potache à tout va, quitte à rendre ses morts-vivants totalement inoffensifs. Le summum est atteint lors de ce trio improvisé sur du Britney Spears entre Augie, Carter et un mort-vivant, ou à l’occasion de ce cunnilingus impromptu qui n’est pas sans rappeler l’une des scènes emblématiques de Re-animator. Les morts-vivants sont utilisés à des fins comiques et non plus allégoriques, et encore moins pour engendrer la peur. Pour consternant que cela puisse paraître, il faut reconnaître au film d’aller au bout de ses idées et qu’à force d’accumulations, d’avoir réussi à faire rire le mauvais coucheur que je suis en quelques rares occasions dont ce sauvetage in-extremis de Ben au moment où sa vie ne tient plus qu’à peau de zob.
Non content de se vautrer ostensiblement dans le second degré, Manuel de survie à l’apocalypse zombie multiplie les clins d’œil à quelques fleurons du genre, procédé de plus en plus courant et prompt à susciter la nostalgie des amateurs chevronnés. Comme un poisson dans l’eau, Christopher Landon a depuis continué à creuser ce sillon en réalisant Happy Birthdead, un slasher ludique sur fond de boucles temporelles. Du cinéma à réserver aux adeptes des seconds programmes décalés.
J’ai commencé le film hier soir, et je me suis arrêté. L’humour me laisse de marbre et j’ai l’impression que je suis moins indulgent quant aux défauts des films, et j’ai tendance à arrêter leurs visionnages.
Il y a une nouvelle mode des films d’horreur, que j’appelle film d’horreur minimaliste. Les plus emblématiques sont The Witch et Héredité. Ce sont des films où il ne se passe pas grand chose, les plans sont longs, il n’y a pas ou peu de manifestation du fantastique, et la fin arrive sans que l’on comprenne ce qui s’est passé ou alors on s’est endormis avant.