Histoires fantastiques 2-03 : Samedi magique – Robert Markowitz
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Amazing Stories. Saison 2, épisode 03
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Mark, petit garçon d’une dizaine d’années, est tenu à l’écart par les camarades de son âge qui le jugent pas assez bon au baseball pour jouer avec eux. Un constat dure à avaler qu’il vit plutôt bien grâce à la présence de son grand-père, toujours prêt à jouer avec lui, et jamais avare en histoires incroyables. Sauf qu’un soir, dans la demeure familiale, le grand-père est victime d’une crise cardiaque. Désormais cloué au lit, il ne peut plus partager du bon temps avec son petit-fils comme il le souhaiterait. Bercé aux histoires fantastiques de son aïeul qu’il prend pour argent comptant, Mark décide d’utiliser l’une de ses formules magiques dans le but d’échanger leurs corps. D’abord incrédule, le grand-père doit bien se rendre à l’évidence, ça fonctionne. Le voici dans la peau de son petit-fils, débordant d’énergie. Il file donc sans demander son reste rejoindre l’équipe de baseball afin de leur montrer de quel bois il se chauffe. De son côté, Mark reste bien sagement à la maison à grignoter des cochonneries. Sauf que le coeur en bout de course de son grand-père le rappelle à la raison : il pourrait bien mourir avant qu’il ne rentre.
Point de réalisateur prestigieux ou prometteur aux manettes de ce troisième épisode mais un téléaste chevronné du nom de Robert Markowitz qui alterne entre épisodes de séries télévisées (Serpico, Delvecchio) et téléfilms (Ombres sur le stade, Mère et prostituée). Autre habitué du petit écran (L’Incroyable Hulk, K2000, L’Agence tous risques), Richard Christian Matheson, fils du grand écrivain Richard Matheson (Je suis une légende, La Maison des damnés), en rédige le scénario. La présence d’un enfant en tant que personnage principal laisse craindre le pire quant à la teneur de l’épisode. A chaque fois que c’est arrivé lors de la première saison, cela a donné lieu à des épisodes désastreux. Et Samedi magique ne déroge pas à la règle, se perdant dans les méandres d’un scénario pourtant simpliste pour aboutir à un résultat complètement incohérent. L’élément fantastique, qui repose sur la seule foi d’un enfant dans la parole de son grand-père, n’est pas en cause. Si le récit se garde bien d’ explorer toutes les possibilités de son sujet jusqu’aux plus triviales, il se place néanmoins sous l’égide d’un deuil à venir de manière plutôt culottée. Tout à sa gentille attention, Mark a minimisé l’état de santé déclinant de son grand-père, omettant de fait qu’il se mettait lui-même en danger. Le voir soudain prendre conscience de la mort qui approche et pourrait le saisir lui, confère à cet épisode un accent tragique inattendu. Sauf que cette scène fait office de leurre, l’essentiel du propos n’étant pas là.
Samedi magique rappelle par son sujet – le deuil du grand-père – Le Train fantôme, premier épisode de la série réalisé par Steven Spielberg en personne, bien qu’il n’en épouse pas la dimension spectaculaire. Ici, la mort frappe sans prévenir et de la manière la plus banale qui soit un homme qui se verrait bien jouer encore les prolongations. Le grand-père joué par M. Emmet Walsh se révèle plus rock n’roll que le gentil papy spielbergien. Si son passé – fantasmé ou non – occupe une grande place car Mark est friand de ses anecdotes, il continue de regarder devant lui. Il se révèle en amateur de sensations fortes, roulant à toute berzingue au guidon de son side-car en vrai trompe-la-mort, et apprécie de se griller un petit cigare de manière régulière. Ce qui ne manquera pas d’occasionner un “gag” visuel au moment du changement de corps de l’un à l’autre lorsque le gamin mettra un cigare à ses lèvres. Mais il sait aussi se montrer plus posé, notamment lorsqu’il passe la journée avec son petit-fils, ce fameux samedi auquel Richard Christian Matheson croit bon d’ajouter un soupçon de magie aux vertus pédagogiques. Mark apprécie énormément ces moments de complicité passés avec son grand-père. Ils sont pour lui plus importants que d’être intégré à l’équipe de baseball des gamins du quartier. En somme, il se coupe volontairement d’enfants de son âge qui place la performance au-dessus de tout pour profiter de la bienveillance et de l’amour de son grand-père. Un choix louable que l’épisode se propose pourtant de remettre en question. En confrontant de manière brutale Mark à la mort, Samedi magique semble vouloir lui signifier qu’il a misé sur le mauvais cheval en consacrant tout son temps à un homme si près de la ligne d’arrivée. Outre illustrer tout l’amour qu’il lui porte, le sursis qu’il offre à son grand-père revient à préparer la suite. Au fond, le grand-père ne transforme en rien sa journée supplémentaire en moment extraordinaire. Il ne fait rien d’autre que ce qu’il a toujours fait (rouler vite et fumer) tout en en profitant pour donner une bonne leçon à ces vilains garnements qui prennent son petit-fils pour un tocard. Qu’il soit ainsi porté en triomphe après qu’il ait contribué à la victoire de son équipe n’est pas tant une revanche prise sur la vie qu’une offrande faite à son petit-fils. Grâce à cet heureux tour de passe-passe, il permet à Mark d’intégrer l’équipe (certains de ses membres viennent d’ailleurs le chercher chez lui à la fin de l’épisode) et d’ainsi préparer l’avenir sans lui. Sauf que ce qui va dans le sens d’une fin heureuse n’est ni plus ni moins qu’une illusion. Ils auront tôt fait de s’apercevoir que Mark n’est pas aussi doué que cela, et peut-être qu’ils lui tourneront le dos à nouveau. Et cette fois, son grand-père ne sera plus là.
Samedi magique compte parmi ces trop nombreux épisodes parfumés à la guimauve. Il est gentillet à outrance et pas toujours d’une grande cohérence. Si au début le grand-père affirme adorer passer des moments avec son petit-fils, il lui dit également que cette journée passée dans sa peau est la plus belle de toute sa vie. Autrement dit, sans lui à materner. C’est à la fois incroyablement maladroit et aussi un peu pathétique si on prend les propos du vieil homme pour argent comptant.