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The Deadly Spawn – Douglas McKeown

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The Deadly Spawn. 1983

Origine : États-Unis
Genre : Hommage aux 50’s
Réalisateur : Douglas McKeown
Avec : Charles George Hildebrandt, Tom DeFranco, Richard Lee Porter, Jean Tafler, Karen Tighe.

Une nuit, une météorite s’écrase non loin de deux campeurs, lesquels – trop curieux – finissent déchiquetés par son occupant, une créature monstrueuse et vorace. Passé cet amuse-bouche, ladite créature trouve refuge dans la cave d’une maison voisine, où elle va pouvoir croître et lâcher des dizaines de vers voraces dans la nature. Pour les occupants de la maison, le réveil promet d’être difficile…

Sorti à l’époque en vidéo-cassette sous le titre La Chose, The Deadly Spawn est un hommage aux films de monstres des années 50 orchestré par une bande de passionnés du genre. Pour une poignée de dollars, ils bricolent une invasion extraterrestre minimaliste circoncise à deux maisons isolées en pleine cambrousse. Mais il ne s’agit là que de la partie visible de l’iceberg. Le plan final laisse miroiter une invasion à plus grande échelle qui aurait d’ailleurs dû faire l’objet d’une suite (The Deadly Spawn : Metamorphosis) et qui deviendra finalement un tout autre film, néanmoins toujours produit par Ted A. Bohus (Metamorphosis : The Alien Factor).

Sans surprise, The Deadly Spawn dispose d’une intrigue très limitée. Aussi limité que son extraterrestre, une sorte de monstre glouton qui compense sa faible mobilité par une profusion de bestioles, entre le ver et le têtard, qu’il envoie chasser l’humain à travers champs. Dans les faits, le terrain de chasse se limite à deux maisons : celle où l’extraterrestre a élu domicile et celle d’une vieille dame en pleine réception, laquelle a un lien de parenté avec les habitants de la première demeure. Cela virerait presque au harcèlement ! Il faut reconnaître que cette famille joue de malchance, laquelle tient à un vasistas de la cave laissé ouvert. En outre, le temps pluvieux n’incite pas ses membres à prendre l’air, même au plus fort de la menace. Du pain bénit pour l’extraterrestre qui, lorsqu’il ne voit pas ses victimes se jeter carrément dans sa gueule (un couple puis l’électricien ne reviendront pas de leur passage par le sous-sol) restent à portée de dents, comme pétrifiées par un faciès pas des plus flatteurs. Cette “chose venue d’un autre monde”, effectivement peu avenante, dispose d’un corps massif surmonté de trois têtes, dont une fixe et deux plus mobiles qui ressemblent à de grands vers de terre, toutes trois pourvues de mâchoires énormes aux râteliers de dents acérées. Dépourvue d’yeux, la créature se déplace à l’aveuglette, réagissant aux sons. Dans ces circonstances, crier est le plus sûr moyen de s’attirer des ennuis, n’en déplaise à ces demoiselles particulièrement portées sur les vocalises.

Il ne faut pas chercher un quelconque dynamisme dans les divers affrontements qui opposent les créatures aux hommes. Rythmé, le film ne l’est guère, peu aidé par des personnages prétextes dont les interactions fleurent bon le remplissage. Ainsi, le débat qui anime Pete et ses amis entre les tenants d’un cartésianisme borné (lui-même) et des esprits plus ouverts quant à l’existence d’une vie extraterrestre (Ellen et Frankie) revient à insérer de l’ironie facile à coups de burin. De même que la romance, brutalement contrariée alors qu’elle venait à peine d’être ébauchée, tente d’injecter un soupçon d’émotion alors que le film n’en a nul besoin. The Deadly Spawn n’est jamais meilleur que lorsqu’il s’assume comme un pur film de monstres, détaché de toutes contingences commerciales. Malheureusement, la créature-mère se terre dans la cave durant une bonne moitié du film avant de se décider à gravir la volée de marches qui la sépare de nouvelles victimes, nous laissant démunis face à l’inanité des situations. Ce sont ses émanations – les vers-têtards – qui assurent un moment l’intérim, avec la complicité des comédiens, lesquels donnent de leur personne pour faire croire à leur autonomie. Les effets spéciaux sont précaires mais néanmoins efficaces. La créature-mère s’impose en principale attraction du film et nous est d’ailleurs dévoilée sous toutes les coutures, après quelques attaques en hors-champs puis en ombres chinoises, histoire de faire monter la pression. Ses concepteurs ont réalisé là un beau travail qu’il aurait été dommage de ne pas pas mettre en lumière. Cerise sur le gâteau, le film n’est pas avare en passages peu ragoûtants du plus bel effet (le corps d’oncle Herb rongé de l’intérieur, la peau d’un visage arraché en gros plan), lesquels contrebalancent avantageusement les quelques passages grotesques où les vers-têtards agressent une assemblée de mamies en plein repas.

Sous couvert d’un film de monstres qui paie son tribut à tout un pan du cinéma fantastique des années 50, The Deadly Spawn se pose en manifeste d’une certaine façon d’appréhender le cinéma. Il n’est pas anodin que le héros du film soit un gamin d’une douzaine d’années qui bouffe du cinéma fantastique dès le réveil et dispose d’une belle collection de figurines, affiches et autres costumes de ses films et créatures préférés. Charles est ce qu’on appelle péjorativement un geek, une projection des auteurs du film, lesquels ont dû souffrir de cette stigmatisation à outrance dès que la cinéphilie sort du cadre dit respectable du cinéma auteurisant. Durant les années 80, le cinéma fantastique était encore un cinéma de niche largement déconsidéré par l’intelligentsia culturelle. A sa manière, The Deadly Spawn préfigure la réhabilitation des geeks qui a cours aujourd’hui tout en se conformant à la tendance du cinéma fantastique de l’époque avec ces gamins au cœur de récits extraordinaires. Comme Elliott dans E.T., Charles a lui aussi rencontré son extraterrestre, mais un extraterrestre qui réussit l’exploit d’être encore plus repoussant que son illustre confrère et aussi belliqueux que son prédécesseur était gentil. Fort de son appétence pour les monstruosités, Charles parvient à conserver tout son sang froid face à l’innommable, et à faire preuve d’une grande maturité à l’heure de le terrasser. Avec cette cape rouge que le garnement arbore durant tout son combat, le film cultive une imagerie de contes de fées matinée de mythologie (David contre Goliath n’est pas loin).

Production modeste, The Deadly Spawn respire la sincérité et l’amour du fantastique. Néanmoins, cela ne suffit pas à en faire un bon film. Apprenti cinéaste, Douglas McKeown n’accomplit pas de miracle. Pour cela, il aurait fallu qu’il accorde autant d’attention à son script et aux personnages secondaires qu’à sa créature. S’il amuse parfois, The Deadly Spawn ennuie le plus souvent sans réussir de vraies scènes de trouille. S’il n’en avait pas été le héros, il n’est pas certain que Charles aurait cité ce film parmi les réussites du genre.

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