Magic – Richard Attenborough
Magic. 1978Origine : Etats-Unis
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Corky Withers est un magicien éprouvant les pires difficultés pour s’imposer en haut de l’affiche. D’une timidité maladive, il ne parvient pas à capter l’attention du public, ce qui est fort dommageable lorsqu’on exerce sa profession. Un jour, il lui vient la lumineuse idée de devenir ventriloque. Il créé alors un pantin à son image, Fats, qui représente tout ce qu’il est incapable d’être en public : sûr de lui, volubile et drôle. S’ouvre à lui une prometteuse carrière, avec néanmoins une sérieuse ombre au tableau : Fats prend de plus en plus de place dans sa vie.
Richard Attenborough est un touche à tout. Il débute au cinéma par une multitude de seconds rôles, puis en 1959, il s’associe au réalisateur Bryan Forbes pour fonder une maison de production. Grâce à elle, il s’offre des rôles plus valorisants et accède finalement à la notoriété internationale en jouant dans La Grande évasion, ou encore La Canonnière du Yang-Tsé. Il réalise son premier film à la fin des années 60, un film à sketches qui évoque la première Guerre Mondiale (Ah ! Dieu que la guerre est jolie – 1969). Magic marque une sacrée rupture avec ses précédents films, qui n’avaient trait qu’aux deux guerres mondiales. Et pour interpréter le rôle principal de ce thriller, Richard Attenborough fait appel à Anthony Hopkins, comédien qu’il avait déjà dirigé lors de son film précédent, Un Pont trop loin.
Magic se réclame du thriller, jouant sur le thème de la schizophrénie. Corky a toujours dû composer avec sa trop grande timidité. Fou amoureux de Peggy-Ann Snow durant sa jeunesse, il n’a jamais pu lui déclarer sa flamme, devant se résoudre à la voir se jeter dans les bras de Duke. Toute sa vie, il a eu à souffrir de cette timidité jusqu’au jour où a germé dans son esprit l’idée de se confectionner un double. Caché derrière un pantin et une fausse voix, il parvient à exprimer tous les sentiments qu’il avait si longtemps enfoui. Le succès lui sourit enfin, et la télévision lui fait un pont d’or pour qu’il y exerce ses talents. Contre toute attente, il refuse et part se réfugier dans les bras de son amour de jeunesse.
Richard Attenborough expédie rapidement toute cette première partie. L’origine de Fats et la célébrité naissante de Corky lui importent peu. Le montage est abrupt, trahissant l’impatience du réalisateur qui souhaite confronter Corky et Peggy-Ann au plus vite. Leurs retrouvailles ont lieu dans un endroit calme et idyllique, en totale rupture avec l’effervescence du monde du show business. A l’image de ce cadre enchanteur, Corky apparait serein. Ses retrouvailles avec Peggy-Ann se passent mieux qu’il n’aurait osé l’espérer. Cette dernière, trop souvent délaissée par son mari, goûte avec délectation le plaisir de se sentir aimée, et finit même par se laisser charmer. Corky n’est plus le même homme, il se montre plus entreprenant, plus drôle, et surtout, plus présent. Néanmoins, cette décontraction de façade cache bien des tourments intérieurs. Durant son séjour, Corky tente désespérément de s’affranchir de l’emprise de son double de bois. Il croit même y parvenir, puis sombre aussitôt. Comme l’apprendra son impresario à ses dépens, Corky ne peut plus vivre sans Fats.
Magic exhale un entêtant parfum de déjà-vu. Le thème de la schizophrénie traité via un pantin sent le réchauffé à plein nez, ce procédé ayant déjà été beaucoup exploité, aussi bien à la télévision qu’en bande-dessinée. Richard Attenborough peine à insuffler une énergie nouvelle à son film, se contentant de se reposer entièrement sur le jeu d’Anthony Hopkins. Heureusement, ce dernier est plus que convaincant, et apporte par son jeu fiévreux tout le trouble nécessaire à l’entreprise. Ainsi, on ne sait plus trop qui de la marionnette ou du marionnettiste manipule l’autre. Attenborough se permet alors quelques scènes qui fleurent bon le fantastique, la marionnette semblant soudain se doter d’une vie propre.
Cependant, Magic s’avère plus intéressant lorsqu’on s’attarde sur Peggy-Ann Snow. Si Corky se débat avec ses deux personnalités, elle de son côté hésite constamment quant à l’homme avec lequel elle désire rester. L’un, Corky, représente l’aventure d’une existence nouvelle empreinte des strass d’une vie de célébrité alors que l’autre, Duke, symbolise le confort d’une vie établie et quelque peu monotone. Tout comme Corky, Peggy-Ann lutte contre elle-même pour se réaliser enfin. Aux prix d’un âpre combat intérieur, ils parviennent tous deux à se décider. Mais le destin étant toujours aussi facétieux, leur choix respectif n’aboutira au bonheur ni de l’un, ni de l’autre. Ainsi, Corky, piètre manipulateur de cartes, aura-t-il réussi à ses dépens son plus beau tour de magie : l’illusion du bonheur.