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Les Démons de la liberté – Jules Dassin

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Brute Force. 1947

Origine : Etats-Unis 
Genre : Prison, sadisme et rébellion 
Réalisation : Jules Dassin 
Avec : Burt Lancaster, Hume Cronyn, Charles Bickford, Yvonne De Carlo…

Joe Collins, fraîchement emprisonné au sein de la prison de Westgate, se retrouve victime parmi d’autres prisonniers de la tyrannie qu’exerce le capitaine Munsey, gardien-chef dont le sadisme n’a d’égale que sa soif de pouvoir et de domination. Collins n’a alors de cesse que de vouloir s’échapper afin de rejoindre sa compagne qui ignore alors sa condition de détenu. Las des méfaits du despote, et acquis à la cause de Joe qui ne s’en laisse pas conter, d’autres détenus décident alors de l’aider dans l’élaboration de son plan d’évasion…

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Voici le premier grand film de ce qui reste à mes yeux l’un des meilleurs représentants du film noir Américain et même Français (à qui l’on doit Du rififi chez les hommes). Jules Dassin après avoir totalement renié ses films précédents, peu visibles à ce jour, tournés pour la MGM, et au sein de laquelle il a alors livré quelques romances et autres comédies musicales il est vrai tombées dans les oubliettes. Dassin détestait Louis.B Mayer, le patron de la MGM, et il y a sans doute une part de rancune assez grande dans ce reniement radical, d’autant que déjà engagé très à gauche, le réalisateur n’a jamais supporté l’attitude qu’il trouvait despotique dudit directeur. Il conviendrait évidemment de découvrir ses films antérieurs à celui-ci, afin de se faire une idée plus neutre.
Après avoir claqué la porte des studio de la MGM, Jules Dassin se voit proposer de tourner une adaptation d’un scénario de Richard Brooks, par le patron d’une autre grande firme de l’époque, Universal, à savoir Mark Hellinger qui lui donne l’occasion d’adapter là un support beaucoup plus noir qu’à l’accoutumée, et quand je dis noir, il faut même comprendre carrément désespéré, et d’une noirceur totale. A noter que Richard Brooks écrivait auparavant des romans, dont l’un fut adapté puis réalisé par Edward Dmitrick, à savoir The Brick Foxhole (sous le titre Feux croisés), et il est étonnant de retrouver ces noms là liés, puisque chacun des noms cités sont des gens engagés très à gauche, et si l’on rajoute que c’est Humphrey Bogart qui a ensuite milité contre le Mac Carthysme qui fit découvrir Richard Brooks au producteur, la boucle est presque bouclée.
Bref, Jules Dassin s’affirme ici comme un réalisateur puissant, et on notera que Brute Force peut se voir comme le premier film d’une trilogie picturale Américaine, dont les deux opus suivants seraient La Cité sans voile et Les Bas-fonds de Frisco, deux autres films à découvrir tant ils demeurent modernes encore à ce jour.
Modernité, c’est le principal qualificatif qui me vient à l’esprit à propos des Démons de la liberté. En effet, le film est d’une violence inouïe, et sa fin que je ne dévoilerai pas afin de la laisser découvrir à ceux qui ne l’auraient pas vu, est un très grand moment de cinéma électrique et électrisant, en même temps que d’être absolument sans espoir aucun. La présence du jeune Burt Lancaster, découvert l’année précédente au sein des Tueurs de Robert Siodmak, n’y est pas étrangère et la présence qu’il apporte à son personnage assez peu épais, il faut bien l’admettre, est assez sidérante.

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Les personnages sont certainement ce qu’il y a de plus faible au sein du film dans le sens où ceux-ci sont assez caricaturaux en même temps que manichéens, et le gros défaut du film reste à mon sens d’avoir poser d’un côté des prisonniers un peu trop blancs pour être honnêtes, et de l’autre un gardien de prison dont le sadisme dépasse l’entendement, même s’il est également formidablement campé par Hume Cronyn. Maintenant, il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas d’une œuvre réflexive sur les conditions de détentions à laquelle nous avons à faire, mais d’un bien d’un brûlot contestataire qui sait ce qu’il pense et qui ne le livre brut de décoffrage. On ne saura donc le reprocher outre mesure à son scénariste et à son réalisateur qui entendent avant tout contribuer ici à quelque chose de politique et militant. Et si les traits sont un peu gros, c’est au profit d’une mise en scène la plus efficace pour le moins, qui soit. Efficace et surtout d’une puissance qui ne cesse de me hanter, tout comme la kyrielle de scènes formidables dont regorge le film. Les scènes de tortures physiques et mentales y sont ultra violentes, tout comme la grande scène de révolte des prisonniers qui réclament justice, et l’on quitte le film vraiment bluffé par tant de « force brute » dans sa charge, et la façon de vouloir passer en force, comme un footballeur américain tenterait de passer la ligne arrière adverse.
Si l’on rajoute à ça une partition grandiose de l’un de mes compositeurs préféré, l’immense Miklós Rózsa (Providence / Le Cid) qui vient rajouter une couche de puissance dans un film qui en est déjà plus que pourvu, c’est dire comment ce film là recèle encore aujourd’hui une force, un impact qui laisse scotché à la fin du film, puis carrément pantois lorsque l’on y repense ensuite. Bref, pour qui lirait ses lignes et qui n’aurait pas vu ce film, je ne peux que le conseiller avec ardeur, tant ici le terme « efficacité » n’a rien de péjoratif, mais rime tout simplement avec « modernité ». Modernité que l’on retrouvera aux antipodes dans le non moins excellent Naked City, chronique quasi-documentaire d’une enquête de police en même temps que d’une ville, précurseur par exemple (ce n’est pas le seul, mais celui qui m’est venu à l’esprit de façon la plus évidente à la vision du film de Dassin) d’un PTU de Johnny To. Pour finir, je ne saurais trop conseiller de revisiter l’œuvre de Jules Dassin. En tout cas, une chose me paraît certaine, rarement un titre (l’original) n’aura autant correspondu à son film à tous niveaux.

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