Les Chroniques de Riddick – Pitch Black – David Twohy
Pitch Black. 2000Origine : États-Unis
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Je ne vais pas me cacher derrière mon petit doigt. D’abord parce que ça ne cacherait pas grand chose, et ensuite parce que je n’ai pas la prétention d’écrire des critiques objectives. Je me lance donc: je suis un fan absolu des Riddick. Je pense que je dois même les regarder plus souvent que Star Wars (je trouve néanmoins Star Wars foncièrement meilleur)! Faut dire que je suis la cible parfaite d’un film comme Pitch Black ! Un personnage fort et charismatique, sombre et mystérieux, une planète inconnue, un univers propre avec ses règles et ses coutumes, et puis des monstres.
Bien sûr, ce genre de sujet est toujours un peu casse-gueule car c’est la porte ouverte à de la série Z de bas étage.
Pitch Black relate l’histoire de survivants d’un crash sur une planète inconnue et vraisemblablement guère accueillante. Parmi eux, un homme enchaîné, présenté comme dangereux et sur le point d’être emmené en prison par un chasseur de prime. Très vite on comprend que ce personnage qui a tout du parfait méchant sera notre héros. Détaché du sort des survivants, Riddick est un individualiste, un solitaire seulement intéressé par lui-même. Cet antihéros va tout faire pour se sortir de là, prêt à sacrifier les autres pour survivre… s’il le faut.
A vrai dire, le film s’ouvre sur ses pensées. On comprend qu’il ne ressent pas les choses comme les humains. Peut-être ne l’est-il pas…
La planète sur laquelle se trouve les survivants est un désert de sable et de roches sans vie. D’immenses carcasses laissent à penser qu’il y a eu de la vie sur cette planète et que quelque chose l’a stoppée…
Se dresse alors une galerie de portraits. Le chasseur de prime accro à la morphine, la pilote du vaisseau prête à sacrifier tous ses passagers pour sa survie, des musulmans en pèlerinage, un collectionneur d’art, un gamin qui se cherche… Toutes ces personnes que rien ne rapproche vont devoir cohabiter pour survivre à la planète désertique. Trouver de l’eau sera une priorité…
Le groupe cherche de l’eau et tombe sur un camp désaffecté. Après quelques fouilles, ils en déduisent que c’était un camp de géologues. Ils y trouvent de l’eau mais aussi un petit vaisseau. C’est leur salut. Sauf que les batteries sont mortes. Le vaisseau écrasé leur fournira les batteries manquantes. Mais voilà, il semble que cette planète ne soit pas déserte et que les géologues aient été tués par des bêtes sauvages. Les mêmes à qui l’on doit les carcasses d’animaux géants?
A vrai dire, les survivants comprennent rapidement que les monstres vivent terrés dans des cavernes et qu’ils craignent la lumière. Et sur une planète qui a trois soleils, il ne fait jamais nuit… sauf tous les 22 ans où une éclipse libère les monstres… Et ça tombe bien pour le film, ça va faire exactement 22 ans qu’il n’y a plus eu d’éclipses…
Pitch Black est un film mesuré. Ses ambitions sont subtiles. Pas question de faire un Alien. Le film ne se veut pas terrifiant. Bien sûr il y aura du suspense, de l’action, des morts horribles, des morts idiotes.
Mais au-delà de l’histoire et de l’univers qui se découvrent devant nous, c’est aussi un réalisateur qui se montre. Car Pitch Black n’est pas une commande, c’est véritablement le bébé de David Twohy. Écrit avec les frères Wheat qui imaginent le personnage de Riddick (et qui participeront aux suites, au dessin animé et aux jeux vidéo), Pitch Black, qui sera renommé plus tard Les Chroniques de Riddick: Pitch Black afin de le faire entrer dans une logique de saga, s’avère être un film abouti. Faut dire que David Twohy avait bossé sur une version du scénario d’Alien 3 que les producteurs lui avaient jeté au visage. Le mec ne s’est pas démonté. Il a fait son Alien à lui ou presque. D’abord tout se passe en monde ouvert. Pas de huis-clos, la planète est le champ d’action même si on en voit peu finalement. Il n’y a pas de tension comme dans le premier Alien par exemple où même au dixième visionnage, tu ne te demandes pas si l’Alien ne va pas surgir d’un coup sans que tu t’y attendes. Twohy n’utilise pas cette tension là. Car au fond ce qui l’intéresse, ce sont ses personnages face au danger. Les monstres ne sont que secondaires. En effet, sur cette planète, il y a plus dangereux que les monstres, il y a Riddick. Ainsi, avant l’arrivée des monstres, c’est bien Riddick qui fait peser la menace sur les survivants, et c’est là que le film est intéressant, il bascule d’une menace à une autre sans nous faire oublier que la première des menaces est toujours là.
Twohy réussit bien à gérer ces deux menaces grâce à une réalisation intelligente et originale. Sur une planète baignée par les lumières de trois soleils, il utilise par exemple différents filtres pour simuler le soleil dominant à ce moment de la journée. Cela confère une atmosphère unique à sa planète et donc à son film.
Mais ne nous voilons pas la face. C’est Riddick qui porte le film et par extension Vin Diesel. En 2000, Vin Diesel n’est pas la superstar qu’il est aujourd’hui. Son physique en impose déjà, mais son jeu d’acteur aussi. Diesel n’est pas qu’un amas de muscles, il tient son personnage comme Schwarzy tenait son Conan, il l’habite littéralement, ce qu’il confirmera avec les suites. Suites pour lesquelles il se battra pour qu’elles voient le jour. En effet, Pitch Black n’est pas un succès public. En revanche, son succès d’estime, son noyau de fans, et la nouvelle popularité de Vin Diesel permettront de lancer une suite plus ambitieuse et en tout point différente.
Vous l’aurez compris, la nuit va tomber sur le petit groupe, délivrant des milliers de bêtes décidées à manger tout ce qu’il y a de vivant. La menace vient de partout et Riddick et le groupe s’associent pour essayer de survivre. Bien entendu, ça ne sera pas simple.
Twohy signe ici un véritable film d’auteur. Fort d’un budget limité, le réalisateur réussit à sortir le meilleur de ses contraintes. Les effets spéciaux ça coûte cher ? Mettons nos monstres dans le noir comme ça nous n’aurons pas à trop les montrer. Ce procédé volé à Spielberg qui cachait son requin dans une eau sombre et trouble est brillamment réutilisé par Twohy qui nous livre un film certes moins effrayant que Les Dents de la mer, mais tout aussi efficace dans l’utilisation des contraintes et des limites techniques qui montrent toute l’ingéniosité du metteur en scène et des scénaristes.
Le casting n’est pas en reste. Outre Vin Diesel, deux autres acteurs dominent de par leurs rôles: Radha Mitchell et Cole Hauser. Tout deux n’ont certainement pas eu la carrière qu’ils méritaient, allant de petits rôles en rôles médiocres (Radha Mitchell pourra toujours se vanter d’avoir été la muse de Woody Allen pendant… un film –Melinda et Melinda-). Pourtant leur charisme est indéniable. Ils réussissent à se dresser au niveau d’un Vin Diesel possédé par son rôle. Reste l’excellent Keith David, qui encore une fois est sous-exploité, enfin, on pourra toujours revoir Invasion Los Angeles de Carpenter pour davantage profiter de cet acteur.
Pitch Black est un film sous-estimé qui n’a pourtant pas à rougir de ses qualités. Peut-être pourra-t-on regretter le manque de tension qui ne s’élève pas au niveau d’un Alien, mais ceci est compensé par l’ambiguïté de certains personnages et surtout celle de Riddick.
Un film assurément réussi et un univers qui mériterait d’être bien plus exploité.