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L’Aventure du Poseidon – Ronald Neame

aventureposeidon

The Poseidon Adventure. 1972

Origine : Etats-Unis 
Genre : Film catastrophe 
Réalisation : Ronald Neame 
Avec : Gene Hackman, Ernest Borgnine, Shelley Winters, Roddy McDowall…

 

Percuté par une gigantesque vague en pleine mer Méditerranée, le vieux paquebot de croisière nommé Poseidon se retrouve la coque en l’air et les cheminées sous l’eau. Seul un petit groupe de passagers refuse de suivre les consignes du personnel de bord, et s’en va tenter sa chance à travers le navire, avec comme objectif d’arriver jusqu’à la partie la plus fine de la coque et de réussir à la percer. Malgré les vitupérations de Rogo (Ernest Borgnine), flic récemment marié à une ancienne pute, c’est le Révérend Scott (Gene Hackman), pasteur rebelle chahutant volontiers les traditions du Culte, qui va prendre la tête du groupe, qui comprend également deux petits vieux, un gamin et sa soeur adolescente, un humble membre d’équipage (joué par le bon Roddy McDowall), un petit vieux célibataire et une frêle jeune femme qui ne se remet pas du décés de son frère au moment où le Poseidon s’est renversé.

Ce film catastrophe des années 70, comportant également l’anecdote de l’armateur voulant jouer avec les règles de sécurité malgré les conseils avisés de son commandant de bord (ici Leslie Nielsen), est un peu l’ancêtre du Titanic de James Cameron, en mieux. Déjà, Ronald Neame ne perd pas de temps dans la présentation de ses personnages, et celle-ci se fait en cours de route, parrallèlement ou dans les creux d’une action incessante. Le révérend Scott fait office de berger guidant son troupeau, lui qui justement avant le drame répétait à qui voulait l’entendre que Dieu, plongé dans un projet à long-terme pour l’humanité, ne se souciait guère du destin immédiat de ses ouailles. Celles-ci doivent se battre elles-mêmes et ne pas compter sur la prière. Ce qui explique l’aspect résolument fortiche du personnage, qui en faisant face à tous les obstacles de la situation dans laquelle il est plongé prouve dans les actes la pertinence de sa foi personnelle. Neame, se basant sur un livre de Paul Gallico, égratigne la religion en temps qu’organisation, livre une vision particulière de sa croyance (ou de celle de l’auteur, ou des producteurs, après tout je n’en sais rien, vu que je ne connais pas ce cinéaste) et en profite au passage pour faire de son personnage principal un homme fort, très fort, donnant à Gene Hackman l’occasion de prouver ses talents dans un rôle très physique.

Car L’Aventure du Poseidon est riche en péripéties, menées sans trop de temps mort. Le temps presse, l’eau grimpe en même temps que les personnages, et ce n’est pas tâche aisée que de remonter vers la coque, alors que toutes les voies d’accès ne sont pas accessibles, que certaines sections sont sous l’eau, que d’autres sont la proie des flammes et qu’enfin la vague a fait de très gros dégâts matériel. En revanche, le réalisateur passe un peu à côté de l’obstacle qu’aurait pu constituer la particulière situation du bâteau (renversé) : les personnages ont toujours la chance de tomber sur une échelle, sur une voie d’aération ou sur un couloir innondé pouvant cependant être traversé en sachant nager sous l’eau (élément récurrent dans les films “marins”). Mais ce défaut n’en est pas vraiment un, puisqu’on serait bien embêtés si nos héros tombaient dans un cul de sac au bout d’une demi-heure. Et puis il y a aussi d’excellents décors, crasseux et humides à souhait : la nature même de l’intrigue fait que les personnages sont amenés à se rendre dans les parties les moins visitables du Poseidon (les cuisines, la salle des machines…), devenues carrément infréquentables à cause des dégâts matériels. Révérend Scott ou pas, tout le monde en chie quand même beaucoup (plusieurs personnes ne survivront pas), et ce sera une autre bonne occasion pour Ronald Neame de continuer à dresser le caractère de ses personnages face à l’adversité. Mais il faut bien reconnaître qu’en dehors du rôle tenu par Gene Hackman, les protagonistes sont assez peu pertinents. C’est l’ex flic campé par Ernest Borgnine qui tient le second rôle principal : il apparaît comme un gueulard de mauvaise foi, râlant sans cesse après les décisions du Révérend. On pourra le comprendre, au début, mais son insistance perdurant jusqu’à la toute fin, alors même que le happy end se rapproche à grands pas, cela deviendra un poil pénible. L’objectif était visiblement de montrer une certaine forme d’opposition grande-gueule de la part d’un homme raté, constamment sur la défensive (ce que son mariage avec une ex pute notoire n’a pas dû arranger) et qui pourtant, en fouillant bien, peu avoir un coeur gros à peu près comme la vieille dondon jouée par Shelley Winters. Celle-ci, grosse bourgeoise sensible, est venue sur le Poseidon avec son brave mari pour aller voir leur petit-fils, qu’ils n’ont plus vu depuis trop longtemps.

Ce sera là un autre élément “titanesque” du film, assurément un autre défaut : le côté émotionnel parfois un peu trop appuyé, voire niais, insuflé par certains personnages. Car il faut bien faire quelque choses des autres membres du groupe, ceux qui n’ont pas de personnalités aussi fortes que celles du Révérend ou de Rogo, et les scénaristes ont choisi de les associer en couples, préalablement formés ou en cours de l’être. Ce qui a chaque fois verse dans des relations intimistes dictées par des considérations et des sentiments aussi généreux mais aussi conventionels que la compassion, l’amour ou l’entraide. Le héros n’est pas un révérend pour rien, après tout. Pourtant, certaines fois, le réalisateur se sera permis de charger ses personnages, principalement celui de Shelley Winters, raillée ou critiquée pour son obésité que l’on pense rédhibitoire dans l’ascension vers la coque. Mais il reviendra vite à la sagesse, lui rendant régulièrement hommage et se permettant même une scène particulièrement stupide et tirée par les cheveux dans laquelle cette même Shelley Winters, que l’on imagine incapable de nager sous l’eau, révèle qu’elle fut une brillante nageuse, et que donc, y’a pas de problèmes. Il y en a quelques uns, de ces capillotractages, et certains personnages féminins psychologiquement sous-developpés à qui on confia finalement la touche sexy en sera un autre. Ainsi, dès la première péripétie, on demande à ces dames de retirer leur robe, parce que ça va pas être pratique pour l’escalade (et là, protestation de Rogo, qui entre autres défauts est jaloux)…

Si elle n’est pas parfaite, L’Aventure du Poseidon tape tout de même dans le haut du panier des films catastrophe de son époque. Indéniablement plus intelligent (même si c’est pour un thème vaguement religieux qui personnellement m’indiffère) que bien de ses confrères, tout en ne se dispersant pas trop et en restant fidèle à son sujet de base, le film de Ronald Neame se regarde avec plaisir, comme un spectacle à gros budget (mais pas assez puisque certaines scènes ne purent être tournées) avec de bons acteurs, de bons effets spéciaux et avec un respect du public qui ne se dément jamais, même dans les quelques moments faibles. James Cameron aurait dû en prendre de la graine, encore que pour être honnête, la mention de films comme Un cri dans l’océan ou Daylight serait plus judicieuse, si l’on voulait comparer L’Aventure du Poseidon à un film moderne.

 

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