CinémaPéplum

Hercule contre les tyrans de Babylone – Domenico Paolella

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Ercole contro i tiranni di Babilonia. 1964.

Origine : Italie
Genre : Péplum
Réalisation : Domenico Paolella
Avec : Rock Stevens, Mario Petri, Helga Line, Anna Maria Polani…

Esperia, la reine des Hellènes, se retrouve bien malgré elle au cœur d’une lutte de pouvoir qui oppose les trois dirigeants de Babylone (deux frères et une sœur) et le roi des Assyriens. Les babyloniens ont récemment fait capturer de nombreuses femmes grecques dans le but de les asservir. Ce sont ces esclaves que convoite le roi des Assyriens, lui qui sait que la reine Esperia compte parmi les prisonnières. Partant de là, il propose beaucoup d’or aux trois dirigeants de Babylone en échange de toutes les esclaves du royaume. Soupçonneux, les trois tyrans parviennent à découvrir le pot aux roses, et ils décident à leur tour de mettre la main sur la reine. Heureusement pour elle, le brave Hercule est lui aussi parti à sa recherche, mais pour la sauver.

Depuis les années 50, l’éclectisme des réalisateurs italiens n’est plus à prouver. Ils vont toujours là où les attend le public, ce qui donne à leurs films une dimension immédiatement populaire. Jusqu’alors plus intéressé par les films de pirates, Domenico Paolella s’oriente au début des années 60 vers les films d’aventures mythologiques, autrement dit le péplum. En l’espace de sept films, il se plaît à narrer les exploits de surhommes tels Ursus, Maciste et le plus célèbre d’entre eux, Hercule. En cette année 1964, il réalise pas moins de deux films qui ont pour vedette le fameux demi dieu. Il s’agit d’abord de Hercule défie Spartacus (peut-être le signe d’une volonté d’en découdre avec le péplum américain), puis de Hercule contre les tyrans de Babylone. Pour incarner le héros de légende, Domenico Paolella fait appel les deux fois au culturiste américain Rock Stevens qui, quelques années plus tard, goûtera à la célébrité dans son pays en incarnant sous son vrai nom -Peter Lupus- l’un des agents de Jim Phelps dans la série Mission : impossible.

Dans la mythologie grecque, Hercule (Héraclès) personnifie la Force. Néanmoins, tout héros qu’il soit, sa vie se retrouve jalonnée de drames et d’épreuves en tout genre qui confère à celle-ci un élan tragique. Le péplum transalpin préfère ne conserver que le côté héroïque du personnage en écartant sciemment tout signe de faiblesse. Toutefois, cet aspect héroïque ne s’illustre que dans la défense de son pays, la Grèce. Dans Hercule contre les tyrans de Babylone, tous ses actes ne sont dictés que par l’amour qu’il porte à Esperia et, par extension, à sa très chère patrie la Grèce. Laisser la reine entre des mains mal intentionnées conduirait son peuple à subir des souffrances qu’il ne lui souhaite pas. C’est ainsi qu’il se retrouve -seul- en Mésopotamie pour libérer la reine et tous les autres esclaves. Domenico Paolella joue de son statut de demi dieu à plein régime, l’homme étant capable de repousser les armées Babyloniennes sans l’aide de quiconque, et armé de son seul gourdin. La réussite de son entreprise ne souffre d’aucune contestation, quand bien même les traîtres pullulent tout au long de son périple. Lui n’en a cure, n’est dupe de rien, et ne s’associe à ses alliés de circonstance que pour mieux déjouer leurs plans. Le plus drôle c’est que nul n’ignore qui il est et pourtant, tous croient pouvoir le rallier à eux. C’est que Babylone est en proie à une lutte d’ego qui aveugle les principaux protagonistes. Au nom de leur fratrie, Assur, Salmanassar et Tanit tentent de régner conjointement sur Babylone. De l’extérieur, ils donnent l’impression de gouverner en bonne entente alors que secrètement, chacun d’eux rêve d’être le seul (ou la seule) dépositaire des pleins pouvoirs. La fragilité de leur association trouve son illustration dans les profondeurs de la cité. Babylone repose tout entière sur un gigantesque rouet, chaque pilier de la cité lui étant rattaché par une chaîne. Pour qui bénéficie du soutien d’une centaine d’hommes peut entreprendre de mettre le rouet en action, ce qui, au prix de maints efforts, aboutirait à la destruction pure et simple de la ville. Mais lorsqu’on se nomme Hercule, on n’a pas besoin d’aide extérieure pour rayer une cité de la carte, ce dont il ne se privera pas pour le plus grand plaisir des amateurs de destruction à grande échelle.

On touche là à l’ambiguïté du personnage, une ambiguïté contrebalancée par l’interprétation très neutre de Peter Lupus. Durant tout le film, nous le voyons combattre vaillamment contre les Babyloniens pour les empêcher de faire des esclaves. Il combat sans haine et sans plaisir apparent, mû par sa noble cause. Et puis, au détour d’un banal échange, il fait part de la haine qu’il voue aux Babyloniens, coupables de venir tourmenter le brave peuple grec, sans se départir de cette inexpressivité si courante chez les différents gros bras qui ont contribué au succès du péplum italien. A l’aune de cette réplique, on ne s’étonne donc pas qu’il fasse si peu de cas des habitants de Babylone, qui meurent dans l’indifférence générale à cause des trop hautes ambitions de leurs maîtres. A cette occasion, le Hercule cinématographique se rapproche du Hercule mythologique. Il n’est alors plus cet être parfait, ce héros sans aspérités qu’on nous montre trop souvent. En cela, il se rapproche du Hercule de Cottafavi dans Hercule à la conquête de l’Atlantide, qui lui aussi, détruisait une cité entière sans aucun état d’âme. Maintenant, il faut bien reconnaître que cela n’a guère d’impact dans le film, du fait de la grande naïveté du récit et de la tonalité bon enfant qui s’en dégage. Le péplum possède ce côté théâtral qui fait qu’on ne peut pas prendre ce genre au sérieux. Les différents combats s’apparentent à des combats de catchs orchestrés par des non professionnels, tant les efforts que déploient les comédiens pour ne pas faire mal à leur adversaire transparaissent à l’écran. Et que dire de ces figurants imperturbables, qui continuent vaille que vaille à décocher leurs flèches alors que Hercule assomme leurs congénères par groupe de deux juste à côté d’eux. Ou encore ces mêmes figurants qui ont le malheureux réflexe d’attraper les rochers que leur envoie le décidément très actif Hercule, trahissant leur nature en carton pâte. Loin de plomber le film, ce sont tous ces petits détails qui contribuent au charme de l’ensemble.

Hercule contre les tyrans de Babylone est un film très sage dans lequel les méchants sont très méchants, rongés par l’orgueil et l’individualisme, alors que les bons brillent par leur altruisme et leur cohésion. Il ne s’agit pas là du meilleur représentant du péplum transalpin, le réalisateur se contentant d’agrémenter son film des ingrédients habituels du genre, sans y apporter une petite touche personnelle. Toutefois, le spectacle proposé est d’honnête facture, et permet de passer un agréable moment dans un monde où la beauté des femmes n’a d’égale que la noirceur de leur âme.

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