CinémaHorreur

Destination finale 5 – Steven Quale

Final Destination 5. 2011.

Origine : États-Unis, Canada
Genre : Boucler la boucle
Réalisation : Steven Quale
Avec : Nicholas d’Agosto, Emma Bell, Miles Fisher, Ellen Wroe, Jacqueline MacInnes Wood, Arlen Escarpeta, P.J. Byrne, David Koechner, Courntey B. Vance.

Branle-bas de combat pour les salariés du pôle vente de la société Présage. Afin d’augmenter leur productivité, les employeurs leur ont concocté un week-end de séminaire lors duquel tests psychiques et physiques seront au programme. Sam Lawton a d’autres soucis en tête. A son manque d’appétence pour la vente s’ajoute le choc d’apprendre que Molly Harper, sa petite amie et collègue, ne voit plus d’avenir à leur relation. Lorsque le pont que leur car traverse commence à s’effondrer, il lui faut bien reconnaître qu’elle avait eu le nez creux. A moins que… Sam se ressaisit. Il se trouve toujours dans le car de l’entreprise mais le drame n’a pas encore débuté. Il s’empresse alors d’emmener Molly avec lui, suivi de quelques collègues, évitant ainsi de faire partie des victimes de cet effroyable événement. Partagés entre reconnaissance et incrédulité, ses collègues tentent de reprendre le cours d’une vie normale. Mais lorsque viennent à mourir coup sur coup deux des rescapés, les mots sybillins prononcés par un étrange individu lors des funérailles prennent tout leur sens. La Mort n’a pas vocation a laisser sa tâche inachevée.

Veuillez pardonner ce résumé qui sent un peu le réchauffé. Cela dit, c’est à l’image d’une série qui n’aura pas su se renouveler en dépit des promesses de certaines des phrases d’accroche mises en exergue sur les affiches. Il est ici question de nouvelles règles pour un résultat franchement pas révolutionnaire. Mais après tout, pourquoi s’en offusquer ? On se lance dans le visionnage d’un Destination finale comme on se lançait dans celui d’un slasher durant les années 80. L’histoire importe moins que les meurtres dont on attend qu’ils rivalisent en originalité. L’apport de la 3-D depuis Destination finale 4 va dans ce sens. Procurer des sensations fortes à des spectateurs qui ne demandent que ça. Ces divertissements pensés pour séduire un public cible sont les véhicules parfaits pour des réalisateurs prêts à se conformer à un cahier des charges strict pour le seul plaisir de passer enfin à la réalisation. Jusque là plutôt habitué à la télévision (le téléfilm catastrophe Superfire, l’enfer des flammes) ou à diriger des secondes équipes sur les gros films de James Cameron (Titanic, Avatar), Steven Quale profite de l’aubaine qui se présente à lui. Oeuvrer pour cette franchise lui garantit une sortie internationale et un concept clé en main qui ne demande pas une grande adaptation de sa part. Et puis personne n’attend cette suite étant donné que le précédent épisode devait clore l’affaire. Il joue donc sur du velours pour ce cinquième volet qui ne révèle sa véritable nature qu’au moment de sa conclusion. Si surprise il y a, elle réside dans ces quelques minutes en fin de film, petite astuce scénaristique qui tente de boucler la boucle. Ce qui ne va pas sans susciter quelques incohérences a posteriori propres à ce genre de procédé.

Destination finale 5 revient à l’essence du premier film en se focalisant sur un groupe distinct d’individus qui ont l’habitude de se côtoyer au quotidien. Aux élèves d’une classe en partance pour un voyage linguistique à Paris succèdent les employés d’une entreprise – dont le nom tient de la symbolique appuyée – en partance pour un séminaire de cohésion. Ces nouveaux personnages n’en restent pas moins proches en âge du public cible. Ils sont encore tout frais sur le marché du travail. Certains occupent un emploi précaire (Candice est stagiaire) ou hésitent encore quant à la suite à donner à leur vie professionnelle (parallèlement à son poste de commercial, Sam cuisine dans un restaurant huppé de la ville). Cet aspect vie en entreprise avec tout ce que cela présuppose en rapports hiérarchiques délicats et ambitions personnelles à assouvir ne sert finalement que de decorum à un récit qui se refuse à calquer son programme horrifique sur celui du monde professionnel. Au bal des ambitieux, le nouvel axiome selon lequel il suffit de tuer quelqu’un pour se faire oublier – un temps – de la Mort aurait pu conférer un côté Le Couperet au film. D’autant plus que le seul qui envisage cette donnée comme une issue potentielle à son sort funeste s’avère être le plus carriériste de la bande. Sauf que le récit préfère se concentrer sur le couple tout propret que forment Molly et Sam, le second étant d’ailleurs le dépositaire de la prémonition initiale. Peter ne représente donc pas un danger sur le plan professionnel mais plutôt sur le plan émotionnel puisqu’il finit par voir en Molly, la seule qui ne meurt pas selon la prémonition de Sam, sa porte de salut pour une “seconde vie”. La menace qu’il incarne de manière fugace – il fallait bien nourrir le climax – permet à Sam de jouer au chevalier servant, prouvant ainsi de manière éclatante tout l’amour qu’il a pour Molly. Un ressort déjà à l’oeuvre dans le précédent épisode qui ici se drape dans une ironie de bon aloi malheurement inopérante. Dans les récurrences des Destination finale, la fin en mode funèbre fait partie des attendus. Il n’y a donc pas lieu de s’en émouvoir, pas plus que de l’astuce scénaristique qui la sous-tend. A l’exception peut-être du premier Destination finale, qui avait pour lui le charme des premières fois, les films de la série n’ont jamais fait grand cas de leurs personnages. Ils ne cultivent donc pas d’empathie particulière à leur endroit, s’amusant volontiers de leurs déboires et de leurs vains efforts pour tenter de réchapper à l’inéluctable. Sauf qu’ici, l’aspect ludique prend du plomb dans l’aile du fait d’un manque flagrant d’imagination. Au-delà de l’utilisation de la 3D qui limite les meurtres à des gimmicks, leur mécanique à base de fausses pistes et certains des lieux choisis tendent à sentir le réchauffé. Il n’y a pour ainsi dire aucune mise à mort marquante à se mettre sous la dent. Ou alors pour de mauvaises raisons (Olivia qui doit son décès à un talon cassé sur l’oeil en plastique d’une peluche et un simple vitrage).

En revanche, cette énième itération permet de s’attarder sur un détail qui devient récurrent depuis Destination finale 3, à savoir la propension de la Mort, par ses meurtres, à jeter l’opprobre sur de petits commerçants et praticiens. Il faut imaginer la mauvaise publicité que le décès de deux étudiantes a pu générer pour le salon de beauté où elles allaient faire leurs U.V. (le 3e épisode) ou pour ce centre de bien-être dans lequel Isaac Palmer a perdu la vie (5e film). Difficile de se relever d’un tel drame. La mort physique de personnes données s’accompagne de la mort économique de personnages tiers que le récit ne retiendra pas. Pas plus qu’il ne s’apesantit sur le traumatisme des auteurs d’homicides involontaires (souvent un pauvre conducteur). A travers ces derniers épisodes se dessinent en creux les contours d’un pays – les États-Unis – qui connaît des défaillances à tous les niveaux, de ses infrastructures vieillissantes (aujourd’hui un pont ou un gymnase, hier un circuit automobile) à ses ouvriers qui passent outre les règles de sécurité d’usage (les produits inflammables et explosifs laissés en plein chantier du centre commercial du précédent épisode) en passant par ses petits commerçants aux locaux et matériels obsolètes. Le danger est partout dans les Destination finale. Il se niche dans les détails, jaillit au détour d’une vis mal fixée, d’un système électrique déficient. Et malgré cet état de fait anxiogène en diable, la peur, elle, est nulle part. Voilà une série qui réussit l’exploit de rendre l’horreur ludique en tuant la plupart de ses personnages deux fois tout en se basant sur la sempiternelle formule de l’effet domino. Un argument publicitaire parfaitement assumé qui ne relève même plus du simple plaisir de jouer à se faire peur mais seulement de celui de développer une mécanique infernale déclinable à l’infini. De l’horreur pop corn qui se déploie dans des endroits proprets et chics que l’usage intempestif d’effets numériques rend encore plus inoffensifs.

Destination finale 5 a tout du film de trop jusque dans certains détails dont cette journaliste présente aux funérailles des rescapés du car qui semble en savoir aussi long que le croquemort joué par Tony Todd (elle parle des suvrivants comme des “8 chanceux [qui] font désormais face à un avenir plus qu’incertain”). Cet épisode n’apporte rien à la mythologie, si on peut appeler cela comme ça, et ennuie vite par la manque d’entrain qui préside aux différents meurtres. Et pourtant la franchise n’a pas fini de faire parler d’elle à la faveur d’un inattendu 6e épisode sorti cette année sur les écrans et qui a cartonné un peu partout. Il n’en faut pas plus à la New Line, filiale de la Warner Bros, pour lancer l’écriture d’un 7e épisode. La mort n’attend pas.

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