Carnage – Tony Maylam
The Burning. 1981Origine : Etats-Unis
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Avant d’être une compagnie de distribution et de production très réputée (entre autres pour les films de Tarantino) et très décriée, la Miramax de Bob et Harvey Weinstein fut une compagnie indépendante comme il en exista tant au début des années 80. C’est ainsi fort logiquement que le premier film des frères Weinstein (Bob au scénario, Harvey à la production) vogua sur la mode de l’époque, le slasher, avec une influence toute particulière du Vendredi 13 de Sean S. Cunningham. Comme dans celui-ci, l’histoire se limite à peu de choses : alors qu’il participait à une colonie de vacances, un pauvre bougre victime d’inconscients notoires revient près du lieu de sa mésaventure pour se venger de toute une jeunesse décadente qu’il exècre.
Sorti une semaine après Vendredi 13 chapitre 2, et donc guère soupçonnable de plagiat, on peut déjà signaler que Carnage semble s’être lui-même orienté dans la direction d’un tueur connu dès le début du film, contrairement à Vendredi 13 premier du nom qui jouait encore la carte du “whodunit”. Tony Maylam, le réalisateur, saute ainsi consciemment l’étape de la maman revancharde (il est vrai inutile), et évacue d’entrée de jeu toute question mythologique : Cropsy, notre tueur, fut un moniteur de colonie de vacances particulièrement sévère, qui fut sévèrement brûlé par des garnements auteurs d’une blague qui tourna mal. Défiguré, très mal en point, il ne s’en est pas moins sorti et cinq ans après sa mésaventure, il devient donc un tueur faisant ses premières armes sur une prostituée, en ville, avant d’aller se venger sur tout ce qui est jeune et qui participe au camp d’été organisé juste à côté du lieu maudit où il faillit périr. Notre homme n’est pas sectaire : il s’attaque aussi bien aux moniteurs qu’aux gamins. Il faut dire que ceux-ci sont déjà des adolescents bien mûrs, ce qui entraîne parfois la confusion pour les distinguer de leurs surveillants et ce qui permet de ne pas choquer la censure. Jason n’en faisait pas autant, prenant pour excuse que sa vengeance concernait seulement les vrais responsables de sa noyade et de la décapitation de sa mère : les moniteurs et non les enfants. Une excuse facile pour ne pas faire mourir des gamins. Maylam ne s’embarasse pas de telles justifications, ses adolescents bien tassés permettant en outre de marcher sur les pas des moniteurs de Vendredi 13. C’est ainsi que la première partie du film tournera surtout autour des futures victimes, avec le personnage de gros dur, avec les comiques de service, avec les conversations sentimentales, les histoires macabres (celle de Cropsy) racontées au coin du feu, les bains de minuit, le sexe etc etc… Tout ceci est bien futile. Maylam épice cependant cette longue introduction avec beaucoup de nudité et avec un personnage de voyeur timide persecuté par la brute de la colonie. De temps à autres, il place également une vue subjective et utilise une musique morbide (pas mauvaise, d’ailleurs) nous rappelant que le bon Cropsy est toujours dans le coin, et qu’il n’attend qu’une bonne occasion pour sévir. Tout n’est cependant pas dépourvu d’une once d’originalité puisqu’aucun personnage n’est désigné comme étant le héros du film. Le voyeur est certainement le personnage sur lequel le réalisateur s’attarde le plus, mais sa nature peureuse fait qu’il ne semble pas pouvoir jouer ce rôle. Quant aux moniteurs, ils surveillent, ils gueulent de temps à autre, organisent des jeux… Et se comportent en adultes. Si, si. Car Carnage se démarque également d’un Vendredi 13 quelconque en ayant recours à une certaine logique : dès que les meurtres seront connus de tout le monde, les moniteurs appellerons la police et pousseront leurs ado vers un lieu en sécurité dans lequel ils ne seront pas dérangés. On ne peut pas dire que cela soit très palpitant non plus à regarder, mais il a suffisament été reproché aux films d’horreur de manquer de logique pour que cela soit signalé.
Venons en maintenant à tout l’intérêt du film : les meurtres, puisqu’un tel film ne repose que sur eux. Cropsy passera à l’action d’abord de façon discrète, assassinant une baigneuse de minuit isolée, que ses petits camarades iront vainement rechercher le lendemain en même temps que les canoës du groupe, seuls moyens de retourner à la civilisation et qui se sont fait la malle durant cette même nuit. C’est alors que la scène de bravoure, la meilleure du film, interviendra. Un véritable massacre en règle auquel se livre Cropsy sur une foule de jeunes partis sur un radeau de fortune. Les meurtres sont très gores (notons que Tom Savini se chargea de leur conception), Cropsy fait des merveilles avec les cisailles qui lui servent d’armes de prédilection, et lorsque l’équipage de ce radeau reviendra en morceau, ça sera la panique générale, alors que Cropsy s’est décidé à butter son monde. Le film demeure alors dans la même lignée que Vendredi 13 (climax, démasquage du tueur, opposition avec les survivants…), mais avec une optique beaucoup plus radicale, ce qui suffit à faire de Carnage un bon slasher. On regrettera juste qu’il ait fallu autant de temps pour que les choses sérieuses ne commencent.