Braquage à l’anglaise – Roger Donaldson
The Bank Job. 2008Origine : Royaume-Uni
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Comme son titre français ne l’indique pas, Braquage à l’anglaise ne parle pas d’un braquage, mais d’un casse. Et derrière ce titre plutôt maladroit se cache un film au moins aussi maladroit, quand bien même il disposait d’un scénario intéressant et plein de potentiel.
Ce scénario se base sur une histoire vraie pour nous conter l’incroyable histoire de ce casse orchestré par une bande de petits truands minables qui vont dévaliser les coffres d’une banque londonienne profitant d’une panne du nouveau système d’alarme. Mais sans le savoir ils vont se retrouver mêlés à des affaires louches impliquant mafia, pornographes, activistes noirs et membres de la famille royale.
Le scénario est correctement ficelé, disposant de tous les ingrédients pour faire du film quelque chose de grand. Dans un premier temps, le petit groupe de bras cassés qui va faire le casse nous est assez rapidement sympathique, comme le sont souvent ces bandes de loosers un peu truands au cinéma. Mais déjà on constate que quelque chose ne fonctionne pas. Tout d’abord les acteurs peinent vraiment à trouver le ton juste pour incarner leur personnage. Ils manquent tous de charisme et semblent hésiter entre un style de jeu décalé qui conviendrait aux parties humoristiques et un style plus sérieux pour les parties les plus sombres du récit. Ceci s’explique sans doute par le fait que le réalisateur lui même semble ne pas trop savoir ce qu’il veut faire de cette histoire, tant il multiplie les angles d’approche sans jamais les approfondir. En effet, s’il décide d’emblée de l’inscrire dans la continuité du polar comique british à la Guy Ritchie, son film reste cependant assez sobre et ne sort presque jamais des sentiers balisés. L’amorce de réflexion sociale qu’il tente d’injecter annihile toute tentative de faire de l’humour et l’attitude so cool qu’il donne aux personnages ôte toute noirceur au récit. En tentant de jouer sur plusieurs tableaux à la fois, Donaldson ne parvient jamais à livrer quelque chose d’abouti, et son film ne parviendra jamais à être plus qu’un inoffensif divertissement pêchant ses influences à droite à gauche.
La première moitié du film se révèle ainsi être d’une fadeur extrême, la description des préparatifs du casse et du casse en lui même se déroule sans surprise, accumulant poncifs et personnages inintéressants. Les tentatives de créer du suspens en dressant des obstacles divers (venue des policiers, passants qui entendent le bruit du marteau piqueur, radio-amateur qui surprend les conversations au talkie-walkie, etc…) échouent toutes et le casse soit disant exceptionnel nous paraît alors plutôt convenu. Heureusement tout n’est pas perdu puisque la deuxième partie, après le casse, se révèle bien plus intéressante. On se surprendra même à frissonner pour les personnages lors d’une scène de torture ma foi plutôt efficace. Et c’est finalement cette seconde partie qui donne à ce casse ses caractéristiques exceptionnelles, puisque notre bande de voleurs minables se retrouvera pourchassée par la police qui désire arrêter les malfaiteurs, par les services secrets qui veulent empêcher le scandale et enfin par les mafieux qui veulent profiter de l’occasion. A partir de là, le film semble enfin sortir du sentier tout tracé dans lequel il s’était engagé et l’histoire commence à devenir intéressante par ses implications sociales et politiques. En effet l’intérêt majeur de cette histoire c’est finalement le portrait très noir qu’elle dresse de notre société, où l’État a des méthodes comparables à celles de mafieux et où les causes les plus nobles cachent les pires trafics.
Mais évidemment, comment espérer faire ressentir cette noirceur avec des personnages caricaturaux qui misent tout sur leur attitude cool héritée de Tarantino? Donaldson en tout cas n’y arrive absolument pas, d’autant plus que sa mise en scène s’avère particulièrement plate, sans personnalité ni intérêt. A titre d’exemple, l’utilisation de la musique s’inscrit tout à fait dans les canons hollywoodiens et manque totalement d’inspiration : les partitions branchées résonnent lors du casse, pour bien insister sur la “coolitude” des héros, tandis que lors de la mort des personnages, des morceaux mélodramatiques très lourds viennent dire au spectateur ce qu’il doit ressentir à ce moment là. En tout cas à aucun moment la musique ne fera corps avec les images et tout ce qui en ressort, c’est une impression désagréable d’artificialité. Cette même impression qui ressort du look seventies donné au film, alors même que sa mise en scène a toutes les caractéristiques du cinéma de divertissement moderne, cadrages obliques et ralentis à l’appui.
Braquage à l’anglaise n’est finalement rien d’autre qu’un inoffensif divertissement très actuel qui n’exploite jamais le potentiel de son scénario, et finalement malgré le coté engagé qu’il tente de se donner, le film est bien plus proche d’un Ocean’s Eleven tout lisse que du brillant Inside Man de Spike Lee. Le film de Donaldson ne plaira qu’aux spectateurs les moins exigeants.