2 Fast 2 Furious – John Singleton
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2 Fast 2 Furious. 2003.Origine : États-Unis – Allemagne
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En laissant s’enfuir Dominic Toretto de manière délibérée, Brian O’Conner a définitivement tiré un trait sur son objectif de devenir inspecteur de police. Plutôt qu’assumer son acte auprès de sa hiérarchie, il a pris la fuite à son tour, traversant les États-Unis d’Ouest en Est jusqu’à Miami. En son nouveau refuge, il trouve les conditions idéales à la pratique de sa passion, la course automobile clandestine. Après en avoir remporté une organisée par son ami Tej Parker, il se fait arrêter par la police. Il retrouve alors l’agent Bilkins du FBI qui, pas rancunier, lui propose un marché. Si il parvient à intégrer l’organisation du trafiquant Carter Verone en sa qualité de conducteur émérite afin de permettre à la police des douanes d’obtenir un flagrant délit, toutes les charges retenues contre lui seront effacées. Brian accepte à la condition de pouvoir faire équipe avec Roman Pearce, un ami d’enfance sous bracelet électronique. Et que celui-ci bénéficie des mêmes faveurs. Pour mener à bien leur mission, ils pourront compter sur l’appui de Monica Fuentes, une inspectrice des douanes infiltrée depuis un an auprès du trafiquant.
Sans surprise, Fast and Furious passe la seconde. Si le patron d’écurie reste le même, le pilote change. Cette décision ne résulte pas d’un désaveu de la part de Neil H. Moritz mais plutôt d’un choix conscient. Rob Cohen reste sous contrat et doit désormais présider au lancement d’une nouvelle franchise avec xXx, nouveau jalon sur le chemin doré qui doit mener Vin Diesel jusqu’à l’Olympe des stars du cinéma d’action. A la manière de ce que Tom Cruise envisageait avec la saga Mission : Impossible (enfin, jusqu’à ce qu’il s’acoquine avec Christopher McQuarrie), Neil H. Moritz confie les destinées de ce second volet à un nouveau réalisateur. Nommé aux Oscars dès son premier film Boyz N the Hood, John Singleton ne semble pas vraiment avoir le profil pour être à la tête d’un film tout public. Même si son remake de Shaft était déjà en soi une tentative d’attirer un plus large public en acceptant de travailler sous l’égide d’un grand studio, il continuait d’aborder la question raciale, thème qui irriguait jusque-là tous ses films. Rien de tel avec 2 Fast 2 Furious dont le propos se doit d’être le plus inoffensif et neutre possible. Un peu à l’image de son héros, en somme, ce Brian O’Conner qui reprend du service pour s’autoriser un nouveau départ tout en s’offrant des petits écarts motorisés au frais de la Princesse. Autour de ses retrouvailles avec un vieil ami qui n’a jamais digéré qu’il devienne flic, 2 Fast 2 Furious prend des allures de buddy movie dont les conflits ne dépassent jamais le stade de chamailleries de cours de récré. Les ressorts restent les mêmes, prouver à l’autre qu’on est le plus rapide et le plus habile derrière un volant. Brian O’Conner troque simplement la quête du respect de ses pairs contre la séduction d’une femme.
Tout fade qu’il soit abrité derrière son sourire ultra brite qu’il arbore en toutes circonstances, Brian O’Conner a néanmoins droit à un traitement de faveur en sa qualité de héros. Cette suite vise à combler les manques du premier film, ce dernier s’étant finalement montré plus interessé par la personnalité tourmentée de Dominic Toretto. Le personnage de Roman Pearce sert à cela, offrir un éclairage nouveau sur ce passionné de mécanique et de vitesse qu’est Brian O’Conner. Enfin nouveau, façon de parler. Disons qu’il apparaît plus immature qu’il le laissait déjà présager, aussi fidèle en amitié qu’il est volage en ce qui concerne les femmes. Roman le dépeint comme un type capable de perdre la tête dès qu’il y en a une dans les parages, prompt à jouer les jolis coeurs au mépris de sa mission. Toutefois, sa relation avec Monica ne sera pas aussi aboutie que celle avec Mia. Celle-ci se résume à un baiser volé au détour d’une scène, comme s’il s’agissait du résidu d’une sous-intrigue finalement abandonnée sur la table de montage. Monica Fuentes s’inscrit parfaitement dans la lignée des personnages féminins du premier film, la conduite sportive en moins. Elles sont placées au coeur de l’intrigue, donnant l’illusion qu’elles auront un vrai rôle à jouer avant de se révéler pour ce qu’elles sont, un simple ornement dans la course à la testostérone que se livrent ces messieurs. Infiltrée depuis un an, Monica Fuentes cultive autant le doute chez ses supérieurs par son manque de résultats que parmi les spectateurs par son absence de professionnalisme. Se rendre dans la demeure de Carter Verone dans la voiture conduite par Brian alors qu’elle est censée ne pas le connaître relève de la plus grande bêtise. Mais c’est le lot de son personnage, réduit à sa seule plastique et soumis à la suspicion d’à peu près tout le monde. Eva Mendes, alors à ses débuts, se fond de bonne grâce dans la défroque de la demoiselle en détresse, multiplie les toilettes seyantes et se prend au passage une main aux fesses. C’est comme cela que les hommes s’affirment dans les Fast and Furious. Et même lorsque l’un d’eux se fait rembarrer pour usage de métaphore graveleuse (Tej à Suki : “Quand est-ce que tu t’occupes de mon levier de vitesse ?”), c’est pour mieux finir avec l’objet de sa convoitise. Les Fast and Furious offre une prime à l’audace, que ce soit avec les femmes ou au volant d’une voiture.
Au-delà du jeu de mots du titre de cette suite autour du chiffre 2, 2 Fast 2 Furious promet une surenchère dans l’action. Celle-ci se retrouve bien évidemment lors des courses automobiles qui sortent du cadre restreint d’une simple ligne droite de 400 mètres pour offrir quelques virages à négocier – un bon juge de paix quant aux aptitudes au pilotage des différents concurrents – et quelques surprises comme ce pont levant qui s’ouvre devant les participants. Et il y a bien sûr les nombreux slaloms au milieu de la circulation, propice à quelques embardées et à de la tôle froissée. Cela dit, John Singleton reste dans les clous du premier film, à savoir une violence mesurée et aux dommages collatéraux absents. Pas un conducteur étranger à l’intrigue n’a à souffrir de ces fous du volant qui prennent l’autoroute pour un circuit. Les véhicules qui constituent le trafic autoroutier sont réduits à l’état de plots entre lesquels zigzaguent Brian, Roman et leurs poursuivants, sans jamais les perturber outre-mesure. Le film suggère que ces mordus de la vitesse ne sont un danger que pour eux-mêmes, et que chaque gadin ou accident ne fait qu’éliminer un concurrent de la course-poursuite, pas lui ôter la vie. A une exception près cependant, lorsqu’un des postulants au poste de chauffeur pour Carter Verone passe sous les roues d’un semi-remorque. Une scène qui passe en un éclair et qui ne s’attarde pas sur le conducteur supplicié, simple figurant. Même ledit Carter Verone souffre de cet aspect aseptisé, ne pouvant guère laisser libre cours à son mauvais fond. Sa tentative d’intimidation sur la personne d’un flic renégat, en s’inspirant tout de même d’une méthode de torture du Moyen-Age, se soldera par une grosse frousse pour tout le monde. Rien de plus. Cole Hauser, qui aurait pu à nouveau s’opposer à Vin Diesel après Pitch Black, n’a que des miettes à se mettre sous la dent. Dépourvu d’envergure, son personnage n’a de méchant que le statut. Il n’y a qu’à voir le sort qu’il réserve à Monica après qu’elle ait été confondue, une petite virée en bateau en sa compagnie. Voilà bien quelque chose qu’il partage avec Brian, oublier ses priorités dès qu’il se trouve en présence d’une jolie femme.
En tant que suite qui se doit de faire mieux que son modèle, 2 Fast 2 Furious fait l’effet d’un pétard mouillé. A l’image de la mise en scène de John Singleton, reprenant les gimmicks de son prédécesseur (alternance d’inserts sur les yeux du conducteur, la pédale d’accélération, le levier et le compteur de vitesse), cette suite n’apporte rien de neuf à un premier film qui n’avait déjà pas fait de l’originalité sa première préoccupation. On peut néanmoins trouver à cette suite un côté madeleine de Proust pour ceux qui comme moi ont grandi en regardant des séries comme Shérif, fais-moi peur (le saut final rappelle les acrobaties quotidiennes de Général Lee) ou Deux flics à Miami (l’infiltration, ça les connaît !) auxquelles le film fait par moment penser.