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Les Formidables aventures de Lapinot, tome 0 : Slaloms – Lewis Trondheim

 

Les Formidables aventures de Lapinot
Slaloms. 1993

Origine : France
Genre: Humour
Dessins : Lewis Trondheim
Scénario : Lewis Trondheim
Editeurs : L’Association puis Dargaud

Première aventure de Lapinot (enfin pas vraiment, parce qu’il y a eu Les Carottes de Patagonie avant, une BD de 500 pages) éditée chez Poisson Pilote (Dargaud, mais éditée avant à L’Association, comme Les Carottes de Patagonie), redessinée d’ailleurs pour l’occasion et quelque peu réécrite par Trondhein, bref, Slaloms, la zéroième aventure de Lapinot est une BD atypique.

Atypique parce qu’elle bouscule les convenances si j’ose dire. C’est une BD qui raconte juste une semaine au ski, où il ne se passe pas grand chose (là où on pourrait s’attendre à de l’aventure, parce qu’il s’agit des Formidables aventures de Lapinot). Mais la force de cet ouvrage, c’est de raconter la vie comme elle est, ou comme elle vient (qui rappelle bien évidemment le titre d’un album de Lapinot).

Ainsi, nous voilà embarqué dans une histoire banale d’un groupe d’amis qui va faire du ski. Et tout tient sur leurs confrontations, sur leur capacité à n’être que des êtres humains avec leurs défauts, leurs envies, leurs doutes, leurs soucis. Ainsi, Lewis Trondheim nous brosse le portrait d’une génération qu’il aime résumer ainsi :

Richard : Il faut bien admettre qu’on est tous devenus des adultes responsables.
Titi : Ou en tout cas des adultes…
Lapinot : Légalement parlant.

Ainsi, les quatre amis vont se trouver confrontés dès leur premier jour à une interdiction formelle de skier. Un loup a fait plusieurs victimes dans la vallée, il est donc interdit d’aller sur les pistes. Mais cela ne dure pas et Richard, grand amateur de jeux d’hivers (qui aime montrer qu’il est meilleur que les autres) chausse ses skis et file sur la neige accompagné de ses trois acolytes plus ou moins bons skieurs.

Bien sûr, ça sera l’occasion pour Lewis Trondheim de mettre en avant les caractères de ses personnages. Lapinot qui sort d’une rupture se contente de se laisser porter par les évènements, tandis que Richard et Titi font tout pour créer ces mêmes évènements. Richard amène ses amis dans des endroits où il est interdit de skier, juste pour montrer sa technique supérieure, et Titi ne pense qu’à se trouver des filles à draguer sur les pistes de ski ou de danse. Reste Pierrot, l’intello, celui qui ramène tout à la morale, au bon sens et à la logique. Celui qui n’aime pas l’humour de Richard qui se moque de tout, même de la mort. Celui qui refuse de faire du hors-piste à cause du risque d’avalanche, bref, le seul véritable adulte qui est capable de citer Kant dans une soirée jeux de société.

C’est donc ça Slaloms, des types banals avec leurs qualités et leurs défauts, qui doivent éviter les obstacles de la vie au fur et à mesure qu’ils se présentent. Et quand Lapinot fait la connaissance de Nadia, un nouvel obstacle se présente à lui : doit-il l’éviter pour ne plus être confronté un jour à une nouvelle déception amoureuse ?

Ainsi, avec cet album, Trondheim met en scène une sorte de microcosme générationnel. La morale et l’immorale, l’amour et la mort, le risque et la vie. Au milieu de tout cela, il ponctue ses dialogues de tournures humoristiques formidables qui deviendront sa marque de fabrique. Des dialogues souvent cons, souvent absurdes, mais qui font toujours mouches. Oui, Slaloms est en quelque sorte une BD absurde.

Bref, avec cette deuxième formidable aventure de Lapinot (bien qu’il soit le zéroième), Trondheim confirme qu’il a des idées et des choses à dire. Il continue sur sa lancée après un Lapinot et les Carottes de Patagonie qui fut de ces albums qui révolutionnèrent la bande dessinée. Il confirme qu’on pourra compter sur lui. De plus, il impose son style et son trait simple qui s’appuie plus particulièrement sur les expressions corporelles des personnages. Trondheim sait les faire bouger (la scène dans la boîte de nuit sur Alexandri-Alexandra est mythique, les scène de schuss énormes !), sait les faire grimacer, il maîtrise ses sujets. Entre Les Carottes de Patagonie et ce Slaloms-ci, il y a des progrès évidents, et dans la mise en scène et dans sa faculté à construire une histoire.

Re-bref, Slaloms a ouvert la voie a une série tout simplement exceptionnelle.

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