Masters of Horror 1-02 : Le Cauchemar de la sorcière – Stuart Gordon
Masters of Horror. Saison 1, épisode 02
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Walter Gilman, un étudiant, trouve enfin une chambre où se loger dans une grande maison et pour un loyer pas trop élevé. L’endroit ne paie pas de mine mais au moins respire t-il le calme, condition recherchée par le jeune homme pour mettre un point final à sa thèse. Or il va très vite déchanter, sa chambre se révélant hantée par une sorcière démoniaque.
Au regard de sa carrière, Stuart Gordon n’a pas usurpé sa place parmi les Masters of horror. Il demeure fondamentalement attaché au genre fantastique et, plus particulièrement, à l’écrivain H.P.Lovecraft, dont les écrits l’ont déjà inspiré à maintes reprises par le passé. Le Cauchemar de la sorcière ne déroge pas à cette règle quasi immuable et trouve donc son origine dans l’œuvre conséquente de l’écrivain. On retrouve alors ce mélange si caractéristique de sciences (occultes comme traditionnelles) et d’horreur gothique.
L’intrigue de cet épisode se déroule en huis clos, la grande majorité des scènes prenant place au sein de l’immense bâtisse où Walter Gilman a trouvé refuge. Cette maison n’a rien à envier aux plus fameuses des maisons hantées. L’endroit est insalubre et cache un passé inavouable et terrifiant. Une malédiction plane sur la demeure, une malédiction qui touche les occupants successifs de la chambre attribuée à Walter, lieu où une sorcière maléfique a élu domicile. Format série oblige, Stuart Gordon n’a guère le loisir de prendre son temps pour instaurer un climat angoissant. Il se doit d’aller à l’essentiel et d’être percutant. Alors, passé l’arrivée de Walter dans la lugubre maison qui évoque celle des adaptations de Dracula et autres Frankenstein (le propriétaire déplaisant dans la peau du majordome bossu et/ou inquiétant, notamment), les manifestations surnaturelles se déclarent rapidement. Walter ne tarde pas à recevoir la visite incommodante d’un rat à faciès humain. Son apparition marque le basculement de la vie de Walter dans l’horreur pure. Dès lors, il multiplie les cauchemars aux séquelles tangibles et devient une véritable menace pour son voisinage. Mais plutôt que d’axer son intrigue sur l’opposition entre l’esprit scientifique de Walter et les forces occultes qui le malmènent, Le Cauchemar de la sorcière mêle étroitement les deux. La thèse de Walter porte sur la possibilité de passer d’une dimension à une autre via le point de conjonction de deux dimensions. Alors qu’il travaille sur la théorie, la sorcière lui montre l’aspect pratique de son étude. Walter devient en quelque sorte le cobaye de ses propres recherches. Toutefois, il ne se laisse jamais griser par tout ce qu’il découvre. A l’inverse de Herbert West dans Re-Animator, il demeure profondément humain et sait encore hiérarchiser ses priorités. La vie humaine conserve toute son importance pour lui, à plus forte raison lorsqu’il s’agit de celle du bébé de sa charmante voisine. Totalement possédé et marqué dans sa chair, Walter doit faire preuve d’une solide volonté pour s’opposer aux pulsions infanticides de la sorcière. Un combat perdu d’avance comme en atteste le locataire d’une chambre au rez-de-chaussée. Il s’agit d’un homme étrange qui n’a de cesse d’alerter Walter sur la malédiction qui pèse sur sa chambre. Le cinéma fantastique nous a souvent habitué à ce type de personnage, dépositaire des clés qui permettront au héros de l’histoire de lutter plus efficacement contre le mal. Ce sont des personnages généralement étranges et asociaux que le courage n’étouffe guère. Ici, Stuart Gordon nous dépeint un homme rongé par la culpabilité et totalement impuissant face à ce qui arrive. Il vit prisonnier de la maison et se voit condamné à assister aux méfaits de la sorcière sans pouvoir y faire quoi que ce soit. Walter aurait pu connaître le même destin tragique si Stuart Gordon n’avait pas opté pour une fin plus spectaculaire et plus conforme à l’orientation gore qu’il a choisie.
A l’image de Castle freak et de Dagon, Le Cauchemar de la sorcière bénéficie d’une confection très classique. Bien qu’il ne s’interdise aucune référence au présent (Walter travaille sur un ordinateur portable), Stuart Gordon donne au Cauchemar de la sorcière une patine quelque peu hors d’âge, surannée. L’intrigue pourrait se dérouler 50 ans plus tôt que cela n’affecterait en rien son esthétisme. Réalisé avec soin, Le Cauchemar de la sorcière offre son lot de scènes fortes et épuise toutes les possibilités de son sujet, n’hésitant pas à sombrer dans le glauque. Si Stuart Gordon semble avoir perdu son sens de l’humour, il a néanmoins conservé son style efficace qui fait de cet épisode une des réussites de cette première saison.