Le Monstre – Val Guest
The Quatermass Xperiment. 1955Origine : Royaume-Uni
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Panique en Angleterre ! Un objet volant s’est écrasé en rase campagne. Il s’agit d’une fusée que le professeur Quatermass a envoyé pour raisons scientifiques, et dans laquelle n’a survécu qu’un astronaute sur trois. Ce dernier, Victor Carroon, n’est pas au meilleur de sa forme. Et pour cause ! Il a été contaminé par une entité extraterrestre. Après s’être évadé de l’hôpital où il subissait des tests, il erre dans la ville semant la terreur à tout va. Une chasse à l’homme (alien) commence…
Avant d’être un film, qui accessoirement a remis la Hammer sur de bons rails pour le succès qu’on lui connait, The Quatermass Experiment s’est décliné en une mini-série de six épisodes de 30 minutes écrite par Nigel Kneale. Val Guest et Richard Landau reprennent la même trame et nous entraînent à la suite de Victor Carroon, pathétique astronaute dont les dernières bribes d’humanité ont bien du mal à prendre le dessus sur son puissant hôte extraterrestre. Victor Carroon est ce qu’on peut appeler une victime faite au nom de la science. Le docteur Quatermass est un pur homme de science ne vivant que pour ses recherches. Il ne fait que peu de cas de la mort des astronautes, sa préoccupation première étant de vite savoir ce qui a fait capoter la mission pour très vite en entreprendre une nouvelle. En tant qu’individu, Victor Carroon l’indiffère totalement. Par contre, en tant que réceptacle d’une entité extraterrestre, il suscite grandement son intérêt. Dès lors, Quatermass va activement participer à sa recherche. A la fois pour en savoir plus sur cette nouvelle forme de vie, mais également pour éviter que l’astronaute ne fasse trop de morts. Si le scandale est trop grand, cela pourrait nuire à ses recherches scientifiques, ce qu’il ne souhaite absolument pas. C’est un être froid, n’inspirant aucune sympathie, et qui à cet égard va à l’encontre de l’imagerie habituelle du héros. Pour ceux qui recherchent une once d’humanité à laquelle se raccrocher, c’est du côté de la femme de l’astronaute qu’ils la trouveront. Toute heureuse de savoir son mari vivant, elle n’accepte pas qu’on le tienne éloigné d’elle sous prétexte d’analyses médicales. Elle organise donc son évasion, et dans un même mouvement, entraîne le décès d’une poignée d’individus, son mari ne manquant pas de se faire la malle avant même qu’elle puisse le serrer dans ses bras. Quelle ingratitude ! Une fuite qui au détour d’une scène fait écho à celle de la créature de Frankenstein. Dans les deux cas, nous avons affaire à un être un peu fruste découvrant pour la première fois le monde extérieur. Du fait de son aspect humain et de la dualité qui transparaît entre l’occupant et l’occupé, le monstre en devient touchant. On ressent toute sa souffrance et le dépit de l’homme Victor Carroon face à une transformation qu’il sait inéluctable.
Bien que confiante dans les réelles capacités de rentabilisation d’un tel film, la Hammer n’a alloué qu’une faible somme d’argent à Val Guest. Ce dernier s’en sort pourtant à merveille, et Le Monstre ne souffre à aucun moment de la faiblesse de son budget. L’entité extraterrestre dans sa forme abominable et néanmoins coutumière, ne nous est révélée qu’à la toute fin du film. Avant cela, nous en aurons un bref aperçu via une excroissance récupérée sur les lieux de l’un de ses forfaits, et une longue traînée de bave sur un mur en briques. La créature prend l’aspect d’une sorte de pieuvre informe à la taille conséquente. Pour pallier à son manque de mobilité, Val Guest joue habilement de ce qui a précédé. Autrement dit, la créature digère les quelques victimes qu’elle s’est mise sous la dent tout en continuant à se développer.
Le Monstre fait incontestablement partie des grandes réussites du studio. D’ailleurs, il donnera lieu à la réalisation de deux suites, à la réputation toute aussi flatteuse. Sans nier les bienfaits de la recherche scientifique, Le Monstre met en lumière le jusqu’au boutisme de certains hommes de science qui les conduit à sacrifier des vies humaines sans s’en émouvoir outre mesure. Ce n’est en aucun cas un film moralisateur. C’est avant tout un bon film de science-fiction teinté de petites touches de quotidien qui s’intègrent habilement au récit sans que le rythme de l’ensemble n’est à en pâtir. Bref, une réussite.