Brazil – Terry Gilliam
Brazil. 1985Origine : Royaume-Uni
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Satire très noire d’une société totalitaire gouvernée par la bureaucratie, Brazil est le septième film de l’ex Monty Python Terry Gilliam.
Il nous raconte l’histoire de Sam Lowry, un fonctionnaire discret et sans ambition. Pour échapper à sa vie terne et monotone, il rêve chaque nuit qu’il est un chevalier volant, venant libérer une jeune femme angélique. Un jour, en tentant de réparer les dégâts causés par une erreur informatique, il rencontre enfin celle qu’il a tant désiré.
Gilliam nous décrit un monde totalitaire, où l’Etat bureaucratique contrôle tout, machine implacable à laquelle personne n’échappe (à l’image de Tuttle, qui finira enseveli sous les paperasses qu’il abhorre). Un univers très kafkaïen, au quotidien morne et triste, où le seul échappatoire possible est le rêve. C’est dans cet univers qu’évolue Sam Lowry, joué par un excellent Jonathan Pryce, qui arrive à nous rendre le personnage extrêmement sympathique. On s’identifie tous très vite à ce personnage naïf, victime d’un système qui le dépasse, et qui n’aspire qu’à être avec celle qu’il aime.
Tout le film est une sorte de descente aux enfers, plus Lowry s’affranchit de ce système pesant, plus la réalité le rattrape, et plus ses rêves se font violents et se confondent avec la vie réelle. A l’image de ce qui arrive à son appartement, un problème de chaudière sans gravité entraînera des conséquences de plus en plus catastrophiques, après avoir été réparé par Harry Tuttle, une sorte de réparateur indépendant recherché pour terrorisme…
Pourtant, et malgré cette histoire d’une rare noirceur, le film n’est jamais réellement tragique, Gilliam multiplie les tons avec talent, et parsème son film de scènes parfois hilarantes, touchantes, glaçantes ou véritablement poignantes. Cette richesse de ton s’accompagne d’une grande variété des thèmes traités. Ainsi Brazil est également une féroce attaque contre la chirurgie esthétique, les panneaux publicitaires disgracieux, la technologie qui envahit nos vies, l’alimentation qui se fait de moins en moins naturelle, la concurrence exacerbée entre les membres d’une même entreprise… Tout ceci est parfaitement orchestré par l’excellent metteur en scène qu’est Gilliam. Malgré le tournage épuisant, il trouve le ton juste dans chaque plan. Les décors y sont aussi pour beaucoup, tout est très soigné. Les personnages évoluent dans des salles immenses remplies de machines et d’énormes tuyaux qui sortent de tous les murs. Le look “science-fiction rétro” est très réussi, notamment le design des ordinateurs et des véhicules. L’interprétation est, elle aussi, exceptionnelle, surtout Jonathan Pryce qui est parfait, et le grand Robert de Niro, hilarant dans le rôle de Tuttle.
Le scénario garde toute sa cohérence et sa richesse malgré les nombreuses réécritures et modifications apportées au cours du tournage.
Co-produit par Universal, Brazil effrayera la major par sa noirceur. Ils décideront alors de remplacer la fin initiale par un happy end, mais c’était sans compter sur la ténacité de Gilliam qui se battra pour son film, n’hésitant pas à organiser des projections clandestines pour les journalistes. Finalement, le film sera acclamé par la presse américaine, mais ne sortira que dans un nombre réduit de salles…
Brazil est un chef d’œuvre fou, visionnaire et culte. Il reste plus que jamais d’actualité et fera réfléchir à chaque vision. Un film qui n’a pas d’égal, une œuvre foisonnante et incroyablement riche qui se laissera revoir de nombreuses fois sans problèmes, le spectateur découvrant quelque chose de nouveau à chaque vision.
A voir absolument.